Retour sur les prévisions moins alarmistes du COR et les intentions gouvernementales
Rappelons en préalable que la question du financement a été dramatisée par le gouvernement. En effet, pour le Conseil d’orientation des retraites (COR), dans un contexte d’une stabilisation de la part des dépenses de retraite dans le PIB, le solde du système de retraite accuserait un faible déficit d’ici 2032 (0,5 à 0,8 point de PIB). Un déficit que les réserves du système de retraite (8,3 % du PIB) pourraient d’ailleurs couvrir.
Rappelons également que les systèmes de retraites sont financés par les cotisations sociales et l’impôt. Il existe en effet des transferts financiers de l’État vers la branche vieillesse de la Sécurité sociale, outre le financement des pensions de retraite des fonctionnaires par l’impôt. C’est en réduisant sa contribution que l’État entend dégager des moyens budgétaires. Ce qui pourrait lui permettre par ailleurs, en abaissant le montant moyen des pensions, de favoriser les régimes privés complémentaires, la retraite par capitalisation, dans l’intérêt des fonds de pension ce qui constitue de longue date l’un des principaux objectifs des « réformes ».
Un autre financement est possible
Le besoin de financement des retraites pourrait atteindre 10 milliards d’euros en 2027, 13,5 milliards d’euros en 2030 et davantage après selon le gouvernement qui a retenu l’hypothèse du Conseil d’orientation des retraites la plus défavorable. Le COR estime qu’il faudrait que chaque actif cotise entre 21 et 28 euros de plus par mois en 2027. Il existe cependant d’autres pistes plus justes pour financer les retraites et rétablir davantage de justice fiscale.
Dans le cadre d’une « revue des niches fiscales et sociales » telle qu’Attac la préconise, d’autres mesures sont envisageables comme revoir les politiques d’exonération de cotisations sur les bas salaires, dont le périmètre s’est étendu aux cotisations de retraites complémentaires en 2019. Ces exonérations représentaient 15,7 milliards d’euros en 2021 pour la branche vieillesse de la Sécurité sociale. Soit davantage que le besoin de financement prévu en 2030.
On peut également préférer agir sur la fiscalité pour améliorer la participation de l’État aux finances de la Sécurité sociale. De ce point de vue, les solutions sont nombreuses :
– Annuler la suppression de la Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) en 2023 et 204 pour un montant de 8 milliards d’euros et revenir sur son allègement de 50 % appliqué dès 2021, ce qui permettrait de dégager plus de 16 milliards d’euros rapidement. Davantage là aussi que le besoin de financement pour 2030.
– Instaurer un impôt de solidarité sur la fortune permettrait de rapporter au bas mot 7 à 10 milliards d’euros de plus que l’actuel impôt sur la fortune immobilière (2 milliards d’euros). Soit presque autant que le besoin de financement estimé pour 2027.
– Supprimer le prélèvement forfaitaire unique (la flat-tax) pour imposer l’ensemble des revenus financiers au barème progressif de l’impôt sur le revenu (selon les estimations, 2 à 5 milliards d’euros en plus).
– Renforcer véritablement les moyens alloués à la lutte contre la fraude fiscale (80 à 100 milliards d’euros par an) pour envisager un doublement des résultats du contrôle fiscal (environ 15 milliards d’euros et dont plus de 10 milliards d’euros recouvrés rapidement). Soit davantage que le besoin de financement estimé pour 2030.
– Réduire le nombre et le coût des niches fiscales (90 milliards d’euros pour 2023) pour renforcer la progressivité de l’impôt et dégager des ressources.
Nous ne faisons que rappeler ici certaines propositions d’Attac qui passent bien entendu par la hausse des salaires et la réduction des inégalités salariales entre les femmes et les hommes notamment. Une véritable justice fiscale, sociale et écologique doit passer par la mise en œuvre de l’ensemble de ces propositions. En attendant, s’agissant des retraites, on peut être certain que leur financement peut être assuré durablement sans organiser un nouveau recul des droits sociaux.
Attac