Une énième scission et des questions en cascade. Sur fond de désaccords politiques et stratégiques, les délégués du Nouveau parti anticapitaliste (NPA) ont acté l’explosion du parti lors d’un congrès début décembre. La moitié des militants, réunis derrière Philippe Poutou, entendent se remettre au travail en lorgnant notamment du côté de « la gauche antilibérale ».
Marceau Taburet : Au NPA, la scission était-elle devenue nécessaire ?
Philippe Poutou. Oui. La situation était intenable. En interne, la crise couvait depuis longtemps. Il y avait deux orientations complètement différentes. Les années passant, avec l’usure, on s’est rendu compte que cela ne pouvait plus durer. On n’en pouvait plus de s’engueuler, tous les sujets étaient matière à dispute : la question électorale, mais aussi la guerre en Ukraine par exemple. On n’a pas de garantie sur la suite, mais on veut reconstruire une gauche radicale. Il nous faut un parti plus large, plus ouvert, qui se mêle de ce qui se passe dans la gauche antilibérale, du côté de La France insoumise notamment.
Etes-vous satisfait du niveau actuel de votre camp social et politique ?
C’est évident que par rapport à la gravité de la situation, on est loin du compte. Il y a des embryons de révolte et de lutte, mais le rapport de force est loin de nous être favorable. Il nous manque les outils, tant politiques que syndicaux, pour nous défendre. Tout est à refaire. Seul le mouvement social peut nous redonner un souffle. Quand il est fort, nos organisations sont en forme. Il y a vingt ans, le mouvement altermondialiste, la lutte des chômeurs et la bataille contre l’extrême droite étaient beaucoup plus importants qu’aujourd’hui. Cela s’est traduit dans les urnes, avec une extrême gauche à près de 10 % en 2002.
L’extrême gauche peut-elle redevenir forte en France ?
Aujourd’hui, la bataille contre la retraite à 65 ans est à préparer. On entre peut-être dans une période où ça va remuer. Il existe, notamment dans la jeunesse, des militants qui ont envie d’agir. Je n’écarte pas la possibilité d’un nouvel essor des courants les plus radicaux. Nous ne sommes pas énormément de militants mais ce qu’on dit suscite de la sympathie. Il y a un décalage entre nos résultats électoraux et notre popularité. Nos idées sont bien perçues. Cela dit, notre obsession n’est pas le NPA.
Continuez-vous de vous réclamer du trotskisme ? Et de l’extrême gauche ?
Je ne le revendique plus. Le trotskisme, c’est du marxisme, mais à une époque très particulière qui correspond à la lutte antistalinienne. Aujourd’hui, on n’est plus du tout là-dedans. Le NPA n’est pas un parti trotskiste. On n’a pas complètement réussi ce qu’on voulait faire, mais notre ambition de départ était de construire un parti qui réunisse différentes traditions militantes : des libertaires, des trotskistes, des communistes révolutionnaires… L’étiquette extrême gauche ne me gêne pas, mais je préfère me dire anticapitaliste ou révolutionnaire. Après, cela voudrait dire que nous sommes les plus éloignés de l’extrême droite sur l’échiquier. Ce n’est pas pour me déplaire.
Avez-vous des discussions avec LFI ?
En ce moment on participe à des réunions pour préparer la manifestation du 21 janvier. On s’est également retrouvés après l’assassinat des Kurdes à Paris, on a signé un appel commun. Nos organisations se retrouvent sur plein de sujets.
Serez-vous de nouveau candidat en 2027 ?
Ce ne serait pas raisonnable que j’y retourne. Il faut qu’après moi, ce soit une camarade qui prenne le relais, on n’a pas le choix. Ceci dit, on aimerait bien que, d’ici quatre ans, il n’y ait pas une candidature LFI, une candidature LO, une candidature NPA… Je préférerais qu’il y ait une candidature large.