Du 13 au 15 décembre 2022, l’administration Biden a organisé un sommet USA/Afrique. L’ensemble des dirigeants des pays membres de l’Union africaine (UA) était convié. Manquaient à l’appel les présidents du Soudan, du Mali, du Burkina Faso et de la Guinée-Conakry dont les pays sont suspendus de l’UA pour cause de coup d’État. Les dirigeants d’Érythrée et du Sahara occidental n’étaient pas invités en l’absence de relations diplomatiques avec les USA. Le dernier sommet de ce genre date de l’ère Obama. Il s’agit donc pour la Maison Blanche de rattraper le temps perdu.
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Être dans la course
Si Joe Biden a nié que ce sommet visait à concurrencer les autres puissances impérialistes en Afrique notamment celles qui sont considérées comme adversaires — la Russie et la Chine —, cela ne trompe personne. Washington paie son désintérêt pour l’Afrique depuis 2000, mis en exergue par la finesse diplomatique de Trump considérant certains États africains comme des « pays de merde ».
Dans le domaine militaire, les USA n’ont fait que le service minimum, notamment en Somalie, en aidant les armées somalienne et kenyane par des frappes de drones contre les Shebabs. En Afrique de l’Ouest, ils laissent volontiers l’armée française tenter de sécuriser la région contre les différents groupes jihadistes.
Quant aux échanges économiques avec l’Afrique ils sont en berne. De 142 milliards de dollars en 2009 ils ne représentaient plus que 64 milliards en 2021.
Parallèlement, la Russie avance ses pions grâce à ses exportations jugées stratégiques pour les pouvoirs africains. Il s’agit du blé et des engrais, ainsi que de l’armement qui souvent s’accompagne de traités militaires. La Chine, elle, poursuit son projet de la « route de la soie » avec des échanges commerciaux qui atteignent les 254 milliards de dollars, soit quatre fois plus que les USA.
Un sommet de rattrapage
Bien conscient de ces écarts économiques, mais aussi de la prise de distance de beaucoup de pays africains vis-à-vis de l’Occident, les USA ont mis sur la table des nouvelles propositions. D’abord un engagement à rénover l’AGOA (African Growth and Opportunity Act) permettant aux produits africains d’être exonérés de taxes. Dans la réalité, cette loi datant de 2000 n’a favorisé que moins de 10 % des échanges commerciaux avec le continent. Par contre Biden est fortement intéressé par la zone de libre-échange africaine (Zlecaf) qui va ouvrir un marché de plus d’un milliard de personnes. Des sommes vont être débloquées pour la lutte contre l’insécurité alimentaire soit 2,5 milliards de dollars. Ces dépenses s’inscrivent dans le provisionnement de 55 milliards de dollars sur trois ans.
Des sommes supposées favoriser les quatre items décrits dans la feuille de route de l’administration Biden : favoriser les sociétés ouvertes capables « de contrer les activités préjudiciables de la République populaire de Chine, de la Russie et d’autres acteurs » ; améliorer la sécurité et la démocratie ; favoriser les opportunités économiques ; et enfin aider à la transition climatique. Comme tous les dirigeants occidentaux depuis des années, Joe Biden a déclaré lors du sommet qu’il agirait afin que l’Union africaine soit membre des principales structures internationales, notamment le G20 et le conseil permanent de sécurité des Nations unies.
Beaucoup de promesses donc qui, même réalisées, auraient peu d’impact positif pour les populations.
Paul Martial