A l’attention de Monsieur l’Ambassadeur de Colombie en France,
Ambassade de Colombie,
22 rue de l’Elysée- 75008 Paris
Par Fax : 01 42 66 18 60
Paris, vendredi 1er juin 2007.
Monsieur l’Ambassadeur,
France Amérique latine vient d’être informée que dans la nuit du 31 mai 2007 les forces colombiennes anti-émeutes (Escuadrón Móvil Antidisturbios, ESMAD) ont investi par la force l’UNIVERSITÉ DU CAUCA à POPAYÁN (en Colombie) occupée par des étudiants en grève depuis près d’un mois qui dénonçaient la privatisation du système universitaire. Il est à déplorer de nombreux blessés et l’arrestation de 16 étudiants sur le fondement de « terrorisme ». Parmi eux figurent trois dirigeants de l’Association Colombienne des Etudiants Universitaires (ACEU) : Jaime Muñoz, Alfredo Apréz et Alejandro Vega.
France Amérique Latine, organisation de défense des Droits de l’Homme qui déploie une grande partie de son activité en direction de la jeunesse, dénonce l’investissement d’une université par la force et l’arrestation d’étudiants en grève sous l’inculpation de « terrorisme ».
Elle réaffirme sa préoccupation devant la criminalisation croissante des manifestations étudiantes et syndicales.
Elle demande au gouvernement colombien :
– la libération immédiate des étudiants emprisonnés,
– l’abandon des charges judicaires à leur encontre,
– le retrait des forces armées et policières de l’université du Cauca
Et plus généralement :
– l’arrêt immédiat de la répression à l’encontre des étudiants et de leurs organisations représentatives
– une enquête approfondie sur les assassinats de militants du syndicalisme étudiant,
– le respect du syndicalisme étudiant
Nous vous serons infiniment gré de transmettre nos vives préoccupations à votre gouvernement et de nous tenir informé des suites réservées à notre requête.
Nous vous prions de recevoir, Monsieur l’Ambassadeur, nos respectueuses salutations,
Sophie Thonon Wesfreid
Présidente Déléguée de France Amérique Latine
INFORMATIONS COMPLEMENTAIRES
Cette brutale répression a été ordonnée par le président colombien Alvaro Uribe Veléz alors que précisément le dialogue était recherché avec une sincère et ouverte volonté de négociation. Les forces anti-émeutes continuent d’assiéger l’université. L’ordre d’expulsion est valable pour toutes les enceintes universitaires du pays. De nouvelles interventions violentes de la part des forces de sécurité pourraient donc intervenir dans les heures à venir sur les campus, dans un contexte où de nombreuses universités colombiennes demeurent occupées par les étudiants en grève, rejoints par des enseignants et des parents d’élèves.
Depuis le 9 mai, des étudiants occupaient pacifiquement le « CLAUSTRO DE SANTO-DOMINGO », siège principal de l’Université du Cauca, où se trouve actuellement la Faculté de Droit, Sciences Politiques et Sociales et le siège administratif du campus universitaire. Cette occupation se déroulait dans le cadre des multiples mouvements de protestation pacifiques entrepris contre la privatisation du système universitaire et de la grève générale décrétée le 26 mai par les universitaires colombiens.
Depuis un mois, la Colombie vit en effet au rythme de mobilisations constantes, pacifiques et massives des étudiants universitaires, qui s’opposent à l’adoption au congrès du Plan National de Développement (PND), qui signifie la disparition des Universités Publiques. Actuellement, et pour des motifs semblables, qui trouvent dans le rejet du PND leur principale cause, la majorité des Universités Publiques sont en GRÈVE GÉNÉRALE d’ÉTUDIANTS, accompagnée par des assemblées permanentes de professeurs et travailleurs de l’éducation. Le 30 mai, une manifestation à Bogota a réuni 200.000 manifestants. Cette manifestation faisait suite à une marche de 4 jours, qui avait rassemblé 60.000 marcheurs (professeurs, étudiants et parents d’élèves) et traversé les villes de Tunja, Honda, Girardot et Villavicencio, rejoignant les 7 marches convoquées par la Fédération Colombienne des enseignants.
Il convient de signaler que les syndicalistes étudiants sont particulièrement visés par la répression.
A l’occasion d’une tournée effectuée en Europe en mars dernier, France Amérique Latine avait reçu à Paris, Diego Fernando MARIN RIOS, secrétaire général de l’ACEU. Cette organisation étudiante nationale, indépendante des partis, est présente dans 38 universités publiques et 15 universités privées.
Lors de cette rencontre M. MARTIN RIOS avait pu expliquer de manière très détaillée ce qu’il qualifiait de « CRISE HUMANITAIRE DU SYNDICALISME ETUDIANT EN COLOMBIE » : ces derniers 18 mois ont été commis 8 assassinats ciblés de dirigeants estudiantins, une trentaine de menaces de mort ont été reçues, 10 étudiants ont été incarcérés et sont victimes de montages judiciaires, 20 ont été contraints à quitter leur lieu de vie et de militance face aux menaces de mort et pressions répétées exercées à leur encontre.