Comme il semble improbable que Philippe Poutou sois élu président de la République française, nous nous contenterons de présenter ce pourquoi nous combattons. Nous devons aussi reconnaître que nous n’avons qu’une connaissance limitée de la situation actuelle au Tibet (dans votre acceptation du terme) sous occupation chinoise.
Nous défendons le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, le droit d’autodétermination. Pour les Tibétains, donc, ainsi que pour les autres peuples concernés dans l’espace d’expansion chinois, Ouïgours compris.
Le peuple tibétain ne semble pas soumis à des violences aussi extrêmes (génocidaires selon certains) que les Ouïgours, mais nous craignons que l’oppression sociale, nationale et religieuse à laquelle il est soumis ne se soit qualitativement aggravée sous Xi Jinping.
Le haut plateau tibétain a toujours été, aux yeux de Pékin, une région clé d’un point de vue géostratégique : elle commande notamment la longue frontière sino-indienne dont le tracé reste parfois contesté et qui est le théâtre de tensions militaires récurrentes. Cette importance se voit aujourd’hui accrue du fait du réchauffement climatique, le contrôle de l’eau et des sources de fleuves qui irriguent l’Asie du Sud et du Sud-Est devenant un enjeu déterminant. Par ailleurs, le développement des infrastructures de transports (autoroutes, trains à grande vitesse) en Chine a facilité la mise en œuvre d’une véritable politique de colonisation de peuplement au Tibet. Cette politique signifie l’intégration forcée au nouveau capitalisme d’Etat chinois, avec l’appui d’une administration aux ordres. Aucune autonomie politique n’est accordée à la Région autonome du Tibet, qui reste soumise au contrôle des autorités chinoises.
Nous ne connaissons pas l’actuelle structure sociale du Tibet, mais elle semble en évolution rapide, conditionnée par la logique coloniale propre au capitalisme chinois : exode rural forcé, constitution d’un prolétariat sans droits, surexploitable, exportation dans d’autres régions du pays d’une main d’œuvre vers des emplois sous-payés (textile, construction…). Nous craignons aussi que le coût écologique des nouvelles « routes de la soie » chinoise ne soit très élevé et ne prive le peuple tibétain de son droit à un environnement sain.
La volonté, proprement grotesque, du régime chinois de choisir qui sera la prochaine « réincarnation » du Dalaï-Lama montre jusqu’où les droits religieux des Tibétains peuvent être niés.
Nous nous réclamons du socialisme, du communisme, et de la tradition léniniste en matière de droits à l’autodétermination. Ce droit était reconnu dans la Constitution de 1931 (celle des « soviets » constitués par le PCC), il a été foulé aux pieds. Dans son « testament », Lénine avait dénoncé le chauvinisme Grand’ Russe. Nous dénonçons de même le chauvinisme Grand’ Han, dont les communistes tibétains ont d’ailleurs été eux-mêmes les victimes. Ainsi, Phuntso Wangye, qui avait fondé le Groupe communiste tibétain en 1939, a été purgé en 1957 et emprisonné dix-huit ans en compagnie de nombre de ses camarades.
Le gouvernement en exil de Penpa Tsering constitue la seule représentation tibétaine sur le plan international, même si le parlement n’est élu que par les Tibétains en exil et s’il n’est formellement reconnu par aucun pays. Nous en sommes conscients. Le Dalaï-Lama ne prônait pas l’indépendance, mais une autonomie au moins comparable à celle dont a bénéficié par le passé Hong Kong dans le cadre « un pays, deux systèmes ». Malheureusement, Xi Jinping a brutalement et unilatéralement dénoncé cet accord et il ne reste aujourd’hui plus rien des (relatives) libertés politiques et civiques qui avaient été accordées sur le tard aux Hongkongais. En Chine même, la « société de surveillance » est plus développée que partout ailleurs par un régime de dictature orwellienne. L’heure n’est pas au compromis, d’autant plus qu’aucun Etat « de poids » n’est prêt à engager un bras-de-fer avec Pékin en sa défense.
Notre champ d’action n’est pas la diplomatie, mais la solidarité internationaliste. Nous poursuivons des campagnes de solidarité que nous voulons aussi efficace que possible, y compris en Asie. Nous n’avions aucun lien en Birmanie, mais nous sommes néanmoins mobilisés dès les lendemains du putsch militaire du 1er février 2021 et nous continuons à le faire aujourd’hui. Nous devons cependant reconnaître que nous n’avons pas réussi à faire de même pour le Tibet.
Le peuple tibétain est soumis par le régime chinois à une domination coloniale qui nie ses droits les plus fondamentaux, sociaux et politique, culturels et linguistiques, environnementaux, sa liberté de culte et de croyances… Il mérite d’être soutenu dans cette épreuve et nous vous remercions d’assurer avec constance ce soutien.
L’équipe de campagne de Philippe Poutou, candidat du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA)
Le questionnaire de la FIDH, de l’ICT et de la LDH
1. Comment évaluez-vous la situation des droits humains au Tibet (par Tibet nous entendons la Région autonome du Tibet ainsi que les comtés et préfectures autonomes tibétaines des provinces de Sichuan, Qinghai, Gansu et Yunnan), et quelles conséquences les violations systématiques des droits humains commises par le Parti communiste chinois (PCC) devraient-elles avoir sur les relations franco-chinoises ?
2. Rencontrerez-vous le nouveau Président du Gouvernement tibétain en exil (Administration Centrale Tibétaine) M. Penpa Tsering et/ou appellerez-vous les membres de votre gouvernement à le rencontrer ?
3. Votre gouvernement sera-t-il favorable à la reprise du dialogue sino-tibétain dans le but de trouver une solution durable au conflit sino-tibétain et si tel est le cas, quelles mesures la France pourrait-elle prendre pour pousser le gouvernement chinois à retourner à la table des négociations ?
4. Quelles mesures prendrez vous pour contrer les interférences du gouvernement chinois dans la liberté de religion des bouddhistes tibétains – et en particulier son projet de sélectionner le prochain Dalaï-lama ?
5. Comment évaluez-vous l’impact du PCC sur le système international de protection des droits de l’homme ? Soutiendrez-vous la création d’un mécanisme indépendant des Nations Unies chargé de se pencher sur les violations des droits humains commises par le gouvernement chinois comme recommandé par 50 experts des Nations Unies en juin 2020 ?
6. De quelle manière votre gouvernement prévoit-il de s’attaquer au problème du non-respect des droits des Tibétains lors de la mise en œuvre de politiques environnementales, climatiques et de développement que soit au niveau bilatéral ou multilatéral ?