Rassemblés le 18 décembre devant le siège du gouvernement serbe, les opposants au projet porté par le géant minier anglo-australien Rio Tinto ont annoncé la poursuite du mouvement après le Noël orthodoxe, le 7 janvier, “jusqu’au départ définitif de Rio Tinto”, revendication formulée par le collectif à la tête du mouvement, rapporte le quotidien Danas.
Tous les week-ends depuis fin novembre, des milliers de manifestants bloquent des centres-villes et des grands axes routiers à travers le pays, protestant contre un plan soutenu par le gouvernement pour permettre à la société minière d’extraire du lithium dans la vallée du Jadar, dans l’ouest du pays. Ils reprochent au président serbe, Aleksandar Vucic, de ne pas avoir abordé les questions de la pollution et de la protection de l’environnement dans cette région agricole.
“Vucic a cédé mais n’a pas rassuré les citoyens”
Les concessions récentes du gouvernement de Belgrade et des autorités locales ne semblent pas avoir apaisé leur colère. Le 15 décembre, la municipalité de Loznica, dans la vallée du Jadar, a suspendu le plan d’aménagement du territoire permettant à Rio Tinto de réaliser son projet, dont la valeur est estimée à 2,4 milliards de dollars.
Cette décision fait suite à la promesse du président serbe de demander au Parlement de reconsidérer deux récents changements législatifs qui auraient permis à Rio Tinto de commencer plus facilement ses opérations près de la ville.
“Le président serbe, Aleksandar Vucic, a cédé mais n’a pas rassuré les citoyens, et ce d’autant qu’il ne s’agit pas seulement de Rio Tinto, le gouvernement serbe ayant autorisé les recherches minières dans une quarantaine d’endroits, ce qui est trop pour la petite Serbie”, estime Danas.
Selon le quotidien Politika, “la suspension du plan d’aménagement de Loznica favorisant l’ouverture de la mine de lithium de Rio Tinto ne change pas de manière significative le plan national minier, un document stratégique, les pouvoirs locaux disposant seulement du droit d’apporter des modifications mineures à ce plan”
Les protestations écologiques revêtent une dimension de plus en plus politique contre le président Vucic et son Parti du progrès serbe (SNS), qui gouverne depuis 2018 quasiment sans opposition après le boycott des élections par l’opposition. À quatre mois de l’élection présidentielle, Vucic louvoie entre les projets industriels et les investissements étrangers, censés booster le développement de l’économie serbe, et le mécontentement de la population face à la pollution, la corruption et la mainmise du pouvoir sur les médias.
D’importants gisements de lithium – un composant clé des batteries de voitures électriques – ont été découverts en Serbie, qui pourrait détenir 10 % des ressources mondiales de ce métal très prisé. Le président serbe défend ardemment le projet de Rio Tinto, qui pourrait rapporter selon lui 600 millions d’euros par an.
Kika Curovic
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