Elle s’appelait Sabrine Khoueira, elle avait 30 ans. Le 22 novembre dernier, son corps sans vie a été retrouvé chez elle, dans le petit village de Kafr Niima, près de Ramallah, dans les Territoires palestiniens. Elle avait été poignardée.
L’agresseur a été arrêté quelques heures plus tard. Il s’agit du mari de la victime, raconte le journal palestinien Al-Quds. Ses vêtements étaient tachés de sang au moment de l’arrestation. Dans sa folie, il s’en était également pris à sa belle-mère, 75 ans, qui a été sérieusement blessée.
Ce féminicide “a provoqué un émoi parmi les Palestiniens”, qui dénoncent “la persistance de la violence domestique et des normes patriarcales dans la société palestinienne”, peut-on lire sur le site d’Al-Jazeera.
“Tuée deux fois”
Depuis le début de l’année, note le média panarabe, au moins 20 femmes, victimes de violences domestiques, ont été tuées dans les Territoires palestiniens, et au moins 15 autres Palestiniennes sont mortes en Israël.
C’en est trop pour le journal palestinien Al-Ayyam,, qui signe un éditorial tout simplement intitulé “Sabrine”, du nom de Sabrine Khoueira. L’auteur y exprime une profonde colère, craignant que le dossier de la jeune femme “ne devienne un numéro de dossier en attendant la prochaine victime” :
“Sabrine pourrait désigner une société habituée à passer sous silence toutes les questions sociétales, politiques, culturelles et économiques. […] Sabrine est le nom de notre honte collective car elle a été tuée deux fois : la première sous les coups de son mari, la deuxième sous les coups de la société, qui se ment à elle-même.”
“Pour de nombreuses femmes, le foyer est devenu un endroit totalement insécurisé, peut-on lire dans cet édito. Nombreuses sont celles qui ne se plaignent pas des violences et des menaces de leur époux, de leur frère, voire de leur fils.”
Pas de loi contre la violence domestique
Depuis plusieurs années, les associations de défense des femmes “dénoncent l’absence d’une loi palestinienne protégeant les femmes de la violence domestique”, explique Al-Jazeera. Un projet de loi sur le sujet, rédigé “il y a plus de dix ans”, est bloqué depuis 2016, souligne le média panarabe.
Selon une étude menée en 2019 par l’Autorité palestinienne, citée par Al-Jazeera, 29 % des femmes actuellement mariées ou ayant déjà été mariées en Palestine ont déclaré avoir subi une forme de violence – physique, sexuelle ou psychologique – au moins une fois de la part de leur mari. Le chiffre est de 24 % en Cisjordanie, et s’élève à 38 % dans la bande de Gaza.
Courrier International
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