Le 16 septembre 2021, les 10 millions d’habitants de Jakarta pensaient enfin pouvoir respirer un peu plus sainement après la décision d’un tribunal de donner raison à l’action en justice citoyenne intentée contre la pollution de l’air de la capitale. Mais voilà qu’une nouvelle source de contamination les menace : le paracétamol, dont d’importantes concentrations ont été détectées dans les eaux de la baie de la capitale par le département d’océanographie de l’Agence nationale (indonésienne) de recherche et d’innovation (Brin), en collaboration avec l’université britannique de Brighton. Ils viennent de rendre leur rapport.
“Les résultats montrent que les échantillons prélevés dans les eaux d’Angke et d’Ancol [deux quartiers surpeuplés du littoral de Jakarta] contiennent les taux les plus élevés de paracétamol, soit respectivement 610 nanogrammes et 420 nanogrammes par litre”, rapporte Kompas.
Selon les chercheurs de la Brin, ces résidus peuvent provenir de trois sources : les hôpitaux, l’industrie pharmaceutique et la population. C’est cette dernière hypothèse qui est mise en avant par l’océanographe Wulan Koagouw, coauteure de cette étude, lancée en 2017. En effet, contenu dans une variété de médicaments bon marché et accessibles sans ordonnance, le paracétamol est massivement consommé par les Indonésiens. “Avec le grand nombre d’habitants de Jakarta, qui, en 2017, était entrée dans le top 10 des villes les plus densément peuplées du monde, je me suis intéressée à ce sujet”, a déclaré Wulan à Kompas.
Altération de l’expression des gènes
La chercheuse déplore le manque d’éducation du public, auquel s’ajoute la désinvolture des industries pharmaceutiques dans le traitement de leurs déchets, d’autant que le système de gestion des eaux usées dans le monde n’est pas encore en mesure de filtrer le paracétamol.
“Bien que la concentration en paracétamol ne soit pas aussi élevée que les doses normalement consommées par les humains sous forme de médicaments, observe Kompas, les chercheurs ont examiné les effets de la contamination par le paracétamol des coquillages, qui vivent de manière sédentaire dans l’eau.”
Or, rapporte le quotidien, “à partir d’une exposition de sept à vingt-quatre jours, il a été constaté que les follicules et les gamètes étaient altérés. Des effets ont également été notés sur l’expression des gènes des cellules de ces coquillages.”
Courrier International
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