La campagne électorale pour les élections législatives prévues le 8 novembre prochain a démarré en Birmanie. Mais les principaux meetings électoraux ont été annulés du fait de l’augmentation récente de la propagation du Covid-19 dans le pays.
Ainsi, raconte Myanmar Times, c’est sur Facebook qu’Aung San Suu Kyi, la chef de l’État de fait, et présidente de la Ligue nationale pour la démocratie (LND), a appelé ses partisans à défendre son bilan.
“Aujourd’hui commence notre parcours vers la victoire. Cette victoire sera une victoire pour notre nation.”
Remporter le scrutin du 8 novembre permettra une “paix durable, le développement et la prospérité”, a-t-elle ajouté de “derrière sa visière et son masque rouge doté du paon, emblème de son parti.”
Limiter les rassemblements électoraux
“Elle devait lancer sa campagne depuis Rangoon, mais les autorités sanitaires lui ont déconseillé à cause de l’augmentation de cas de Covid-19.”
Le plus grand parti d’opposition, le Parti de la solidarité et du développement de l’Union, soutenu par l’armée, a demandé le report du scrutin du fait de l’épidémie. Sa campagne “verte” s’accompagne de distribution des documents de prévention de santé, des masques et du gel nettoyant pour les mains.
Le porte-parole du parti a d’ailleurs précisé au Myanmar Time :
“Le parti passe après la crise sanitaire.”
Test de popularité pour Aung San Suu Kyi
“Ces élections parlementaires qui permettront de renouveler les Parlements au niveau national, mais aussi au niveau des États de l’Union, constituent, explique Myanmar Times, le premier test majeur de popularité pour Aung San Suu Kyi et son parti depuis leur victoire triomphale de 2015.”
Aung San Suu Kyi dirige un gouvernement mixte composé de ministres issus de son parti, les militaires conservant, en vertu de la Constitution, le contrôle de quatre ministères clés, liés à la sécurité.
Pour le quotidien, ce sera, cette année, un scrutin très différent de celui de 2015 lorsque des “foules de partisans de la LND se rassemblaient dans le pays pour voir la Prix Nobel de la paix”.
“Ces trois dernières semaines, note le quotidien, les cas de Covid-19 ont triplé pour atteindre 1 700 contaminations avec 10 morts.”
Les rassemblements de plus de 50 personnes ont été interdits et les voyages domestiques ont été limités. Début septembre, l’accès à la capitale Naypyidaw a été limité avec quarantaine obligatoire et test pour tous les visiteurs.
Le gouvernement a également imposé des mesures de confinement dans la capitale économique Rangoon, avec l’obligation de rester à la maison dans certains quartiers, et la fermeture des restaurants. Les écoles sont fermées dans tout le pays.
Problème dans les zones de conflit
Dans l’État d’Arakan, les conditions pour mener campagne sont-elles remplies ? interroge d’ailleurs le Parti national de l’Arakan, le parti ethnique le plus important, explique Myanmar Times.
Car le confinement lié au Covid-19 oblige les citoyens à rester chez eux et les combats entre l’armée et la guérilla de l’armée de l’Arakan forcent des milliers de personnes à se réfugier dans des camps.
Par ailleurs, du fait de ce conflit, le gouvernement a bloqué la 3G et la 4G limitant l’accès à Internet à de nombreux habitants de l’Arakan et de l’État de Chin. Un handicap majeur durant la campagne qui se tiendra essentiellement sur le web.
Pour The Diplomat, “la propagation du virus aura des effets imprévisibles sur la manière dont le scrutin se tiendra et sur ses résultats”.
Des minorités ethniques déçues
Certes, remarque le journal en ligne, la limitation du nombre de rassemblements électoraux et une campagne essentiellement menée sur Internet devraient bénéficier aux formations politiques les plus importantes. À ce titre d’ailleurs, souligne The Diplomat, la LND part avec un avantage, étant l’un des partis avec le plus d’abonnés à son compte Facebook.
The Diplomat souligne également que la LND et Aung San Suu Kyi font face à une importante désaffection au sein des minorités ethniques, “sceptiques quant à la volonté de la LND de faire avancer leurs intérêts”.
Véritable mosaïque ethnique, la Birmanie abrite 136 minorités qui, depuis l’indépendance en 1948, demandent une plus large participation aux décisions politiques. À ce titre, des guérillas ethniques ont longtemps lutté contre l’armée.
Les combats ont repris dans certaines régions du pays depuis l’arrivée au pouvoir d’Aung San Suu Kyi. Sa promesse de relancer les négociations de paix et d’apaiser les tensions n’ayant été que partiellement remplie.
Très critiquée à l’étranger pour sa défense de l’action des militaires contre les Rohingyas dans l’ouest du pays, Aung San Suu Kyi reste, néanmoins, très populaire au sein de la population bamar, la majorité bouddhiste du pays.
Courrier International
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