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Ainsi donc, en France, en 2020, un « journal » a cru bon de mettre en scène une députée noire sous les traits d’une esclave. Si les guillemets s’imposent, tant Valeurs actuelles n’est en réalité rien d’autre qu’un torchon d’extrême droite, force est toutefois de constater que le torchon en question a pignon sur rue et que nombre de ses « éditorialistes » et « journalistes » ont leur rond de serviette sur les plateaux des chaînes d’information en continu. Difficile en outre d’oublier le nombre de responsables politiques qui ont accordé des interviews à Valeurs actuelles au cours des dernières années, de Marlène Schiappa à Emmanuel Macron en passant par Christian Jacob, Henri Guaino, Gilles Le Gendre ou… Alexis Corbières.
Les condamnations quasi unanimes de l’agression raciste de Valeurs actuelles contre Danièle Obono ne doivent pas nous faire oublier cette vérité simple : l’hebdomadaire d’extrême droite, qui n’en est pas à son coup d’essai, a bénéficié d’une immense mansuétude politico-médiatique, dans un processus de normalisation/légitimation qui n’est pas sans rappeler celui qui accompagne le Rassemblement national. Et Valeurs actuelles n’est pas une exception : si CNews a achevé sa mue en média d’extrême droite avec l’embauche d’Éric Zemmour et l’omniprésence de chroniqueurs venus des bas-fonds de la droite radicale, les autres chaînes d’information, ainsi que les radios, accueillent quotidiennement, au nom du « pluralisme », des représentants de ces divers courants de « pensée », devenus des prescripteurs d’opinion légitimes.
Des réacs, des racistes, des fachos qui répètent à longueur d’interviews et d’interventions « [qu’]on ne peut plus rien dire », mais qui ont des heures d’antenne pour le dire, repoussant chaque jour un peu plus loin les limites de l’ignominie et se félicitant, parfois bruyamment, de voir leurs « thèmes » et leurs « thèses » reprises par des éditorialistes et des responsables politiques dits « républicains », dont les larmes de crocodile de ces derniers jours ne font guère illusion.
Ainsi en va-t-il de la thématique de « l’ensauvagement », désormais portée par le Premier ministre et le ministre de l’Intérieur, ou de celle de la « menace séparatiste » agitée par Macron. Et demain, le « grand remplacement » ? Aucun doute : en cette rentrée, la vigilance antiraciste est de mise, et nous ne nous tromperons pas d’alliés dans ce combat, indissociable de toutes les luttes pour défendre les intérêts de notre camp social.
Julien Salingue