« On ne va pas casser ici, c’est un quartier populaire », affirme à sa copine un jeune vêtu d’un sweat-shirt noir, capuche rabaissée sur la tête, fuyant, dans une rue du Petit Bayonne (Pyrénées-Atlantiques), le nuage de gaz lacrymogènes qui envahit le quartier. Samedi 24 août, au premier jour du sommet du G7 qui se tient à quelques kilomètres de là, à Biarritz, rendez-vous avait été donné par les plus radicaux des « gilets jaunes » et des militants anti-G7 pour se retrouver dans cette ville qui, avec Biarritz et Anglet, fait partie du périmètre interdit aux manifestations.
En fin de journée, un cortège de quelques centaines de personnes a donc arpenté les rues de ce quartier populaire, coincé entre les rives de l’Adour et de la Nive. Tous les ponts étant fermés par les nombreuses forces de la gendarmerie mobile et de la police, les manifestants n’avaient d’autres choix que de déambuler, criant « Tout le monde déteste la police » ou « Siamo tutti antifascisti », et s’agglutinant devant les barrières dressées sur les différents ponts.
Ville quasi morte
Là, canons à eau et tirs de grenades lacrymogènes ont repoussé les manifestants, sans que ceux-ci n’aient beaucoup d’issues pour quitter les lieux. Une vingtaine de motos des voltigeurs – des équipages de deux avec le pilote et un passager armé notamment d’un bouclier et destiné à faire des interpellations – a fait quelques incursions dans les rues étroites de ce quartier. Les quelques derniers cafés fermaient alors, transformant le Petit Bayonne en quartier quasi mort. Sans attendre ces incidents, en effet, la plupart des commerçants et restaurateurs avaient fermé dès vendredi soir, certains barricadant leur échoppe par de robustes plaques de contreplaqué.
Selon le bilan de la préfecture des Pyrénées-Atlantiques, les forces de l’ordre ont procédé à 68 interpellations, dont 38 ont abouti en placements en garde à vue, notamment pour « participation à un groupement en vue de commettre des violences, des dégradations, possessions d’objets susceptibles d’être utilisées comme armes par destination, dissimulation de visage et jets de projectiles. »
Cette fin de journée excitée rompait avec la matinée durant laquelle, du port d’Hendaye à Irun, ville frontalière du Pays basque espagnol, quelque 15 000 manifestants ont marché (9 000 selon la police), clôturant les travaux du sommet du contre-G7 qui s’est tenu du 21 au 23 août, dans ces deux villes.
Longeant les eaux de la Bidassoa, rivière frontière, sous un soleil de plomb, les marcheurs – anticapitalistes, écologistes, féministes, altermondialistes, abertzale, « gilets jaunes »… – dont une grande partie venait du Pays basque Sud, ont crié durant deux heures leur opposition au sommet du G7, dénonçant les renoncements des pays les plus puissants de la planète à lutter contre le dérèglement climatique et l’injustice sociale.
Appel du contre G7
Dans une ambiance bon enfant et familiale – quelques affrontements avec la police, vendredi soir devant le campement militant du contre-G7, avaient fait redouter des tensions lors de cette manifestation –, sous les drapeaux rouges, verts et blancs du Pays basque, se succédaient les omniprésents syndicats basques (ELA, LAB…) et français (Solidaires, CGT, CNT…), les associations altermondialistes et de lutte contre les injustices sociales et climatiques (ATTAC, Bizi, Oxfam, Alternatiba, Les Amis de la Terre…), etc.
Bixente, 52 ans, militant syndicat basque, est venu dénoncer « l’hypocrisie des chefs d’Etat qui envoie des messages attristés quand la forêt amazonienne brûle ». La jeune Elaïa, lycéenne à Bilbao, exigeait elle aussi une action, « urgente », et pas des discours. José défilait, brandissant un drapeau du FSLN et défendant la cause sandiniste, devant des militants appelant à la solidarité avec les enfants de Palestine, ou encore un cortège portant des canots pneumatiques, vêtu de couvertures de survie, pour rappeler le drame des migrants qui traversent la Méditerranée.
En fin de manifestation, une déclaration finale, adoptée par les deux coordinations organisatrices du contre-sommet (basque G7 EZ [non au G7] et française, Alternatives G7), regroupant une centaine d’organisations, était lue, reprenant la tonalité anticapitaliste qui a marqué trois jours de débats intenses. Ce G7 porte, selon ces organisations, « des politiques qui ont creusé les inégalités sociales, renforcé les divisions et les dominations dues au racisme et au patriarcat, organisé l’industrialisation de l’agriculture, nourri l’industrie de l’armement, accéléré les crises environnementales, les dérèglements climatiques et la chute de la biodiversité ».
Lors de l’assemblée citoyenne qui a permis de finaliser le texte, de nombreuses interventions ont demandé à ce que le texte soit musclé sur les questions sociales, climatiques et féministes notamment. Cet appel du contre-G7 promeut aussi des alternatives qui « construisent des territoires plus solidaires, plus résilients face aux crises majeures et à l’effondrement à venir et mieux armés contre la marchandisation de nos sociétés et de nos vies, la délocalisation et la mise en compétition des peuples et des individus, la destruction de la nature et des cultures populaires ».
« Marche des portraits »
Se félicitant du succès de ce contre-sommet, qui a attiré quelque 5 000 participants malgré le climat oppressant généré par la présence de plus de 13 000 membres des forces de l’ordre dans la région, les organisateurs ont aussi fixé un calendrier fourni de mobilisations pour les mois à venir. Dont les premiers rendez-vous, début septembre, concernent les procès des décrocheurs du portrait officiel d’Emmanuel Macron dans les mairies à Lyon, Paris et Orléans, puis les grèves internationales sur le climat, prévues du 20 au 27 septembre, la journée internationale du droit à l’avortement (28 septembre), ou encore la semaine internationale de la rébellion (début octobre).
Dimanche matin, le Petit Bayonne devait encore être agité par la « marche des portraits ». 128 photos officielles du président de la République ont été décrochées, ces derniers mois, dans des mairies dans la France entière – la dernière action s’étant déroulée vendredi dans la mairie d’Irissary, dans le Pays basque intérieur. Les organisateurs de cette marche, ANV-COP21 (Action non violente-COP21), Alternatiba et Bizi, espéraient juste, samedi soir, que la soirée agitée dans le quartier ne compromette pas leur initiative.
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Rémi Barroux (Bayonne, envoyé spécial)
• Le Monde. Publié le 24 août 2019 à 12h35, mis à le 25 août hier à 10h07 :
https://www.lemonde.fr/international/article/2019/08/24/les-militants-anti-g7-entament-leur-marche-a-hendaye_5502466_3210.html
Au Pays basque, un rassemblement anti-G7 annulé pour « faire baisser la tension »
Si les « anti » ne se sont pas mobilisés en masse à l’occasion du sommet de Biarritz en raison notamment du dispositif sécuritaire, les organisateurs estiment que la manifestation de samedi à Hendaye a été un succès.
Ce devait être la dernière initiative des anti-G7 rassemblés non loin de Biarritz, où se tient le sommet officiel, mais celle-ci a finalement été annulée dimanche 25 août en milieu de journée. Une jolie carte avait même été distribuée, les jours précédents, aux milliers de participants au contre-sommet organisé par deux coordinations (la basque G7 EZ ! ou « non au G7 ! », et la française Alternatives G7) pointant sept « cibles » autour de Biarritz. Ainsi, les mairies de Bayonne et d’Anglet et différents ronds-points dessinaient une « zone arc-en-ciel, symbole des différentes luttes et revendications », expliquaient les organisateurs.
Las, tout a été annulé. Faute de combattants, beaucoup étant repartis dès la veille, après la manifestation qui a réuni 15 000 personnes, selon les organisateurs, et a clos officiellement le contre-sommet qui s’est tenu à Hendaye et Irun, du 21 au 23 août. Sur la longue plage qui porte le joli nom de Chambre d’amour, à l’annonce, dimanche midi, de l’annulation de la manifestation, trois militants ne cachaient pas leur déception. « Nous sommes venus exprès de Saint-Etienne, on a dormi au ball-trap d’Urrugne et il n’y a personne ! »
L’un est un ancien militant de la CGT, tous ont participé aux manifestations des « gilets jaunes » et s’affirment anticapitalistes. En arrivant vendredi sur la côte basque, pour la fin du contre-sommet, ils espéraient retrouver la chaleur des défilés. Rien. Cette longue plage d’où l’on voit le phare de Biarritz, où a eu lieu samedi soir le premier dîner de sept dirigeants des pays industrialisés, est vide de manifestants.
« Faire preuve de responsabilité »
Sur les planches, devant l’océan où glissent inlassablement les surfeurs, la porte-parole d’Attac et d’Alternative G7, Aurélie Trouvé, répond presque seule aux journalistes. La nuit même, annonce-t-elle, Joseba Alvarez, une figure de l’indépendantisme basque, membre de la coordination G7 EZ ! et de la gauche abertzale, a été arrêté. Il faisait l’objet d’une interdiction de territoire jusqu’au 29 août. « Avec son arrestation et la vingtaine de blessés légers que nous avons eue, nous avons décidé de faire preuve de responsabilité et d’assurer avant toute chose l’intégrité des manifestants », explique-t-elle. La veille, quelques affrontements ont eu lieu dans le quartier du Petit-Bayonne. Les nombreux gendarmes mobiles et policiers, présents sur les ponts sur l’Adour et la Nive, deux rivières qui enserrent ce quartier, ont fait usage de grenades lacrymogènes et d’un canon à eau pour disperser quelque 200 à 300 manifestants.
Les anti-G7, que l’on annonçait nombreux et souvent radicaux, n’ont pas rejoint en masse le Pays basque. « Nous aurions pu réunir 200 ou 300 manifestants, assure pourtant la porte-parole d’Attac. Mais nous avons préféré suspendre la manifestation pour faire baisser la tension. » En réalité, le ministère de l’intérieur et la préfecture ont œuvré pendant des mois pour saper la mobilisation des « anti ». D’abord en faisant traîner durant des semaines le choix d’un lieu pour le contre-G7. Orthez, Dax… les lieux les plus éloignés de Biarritz ont été proposés, avant de finalement concéder Hendaye, à 32 kilomètres de la cité balnéaire.
Le déploiement massif des forces de police et la perspective d’être débordés par des black blocs ont aussi dissuadé bon nombre de militants, comme la date choisie pour le G7, en fin de vacances scolaires. Enfin, la proximité des élections municipales a joué un rôle non négligeable. Dans ce bout de territoire, les militants les plus organisés appartiennent souvent aux mouvements indépendantistes basques. Or, de commune en commune, les élus locaux ont pesé – souvent à la demande du préfet – pour dissuader les indépendantistes, dont beaucoup concourent aux majorités municipales des villes de la côte, de mener un mouvement d’ampleur qui aurait pu nuire à l’image de la région.
De fait, après huit mois de contestation des « gilets jaunes », une cote de popularité autour de 30 % pour Emmanuel Macron et l’intérêt dans une partie de l’Europe pour les thèmes alternatifs et environnementaux, les anti-G7 n’ont pas rassemblé les foules contestatrices qui s’étaient exprimées durant l’année. La mobilisation à Hendaye aura été bien faible aussi en comparaison du rassemblement historique de Gênes, en 2001, où 300 000 personnes s’étaient réunies et où un manifestant, Carlo Giuliani, avait été tué par la police. Deux ans plus tard, en juin 2003, contre le G8 à Evian, 100 000 manifestants s’affrontèrent durement avec la police dans la ville voisine de Genève.
Pour les responsables d’associations telles Attac, il s’agissait d’une autre période de l’altermondialisme, les rassemblements anti-G7 ou G8 drainant dorénavant des foules souvent moins importantes. Lors du dernier G8 tenu en France, en mai 2011 à Deauville (Calvados), les « anti » n’avaient été que 7 000 à défiler au Havre voisin. Cette même année, ils étaient moins de 10 000 à défiler à Nice contre le G20 de Cannes (Alpes-Maritimes).
Alors, pour les organisateurs, réunir 15 000 personnes sur le port d’Hendaye reste un vif succès, d’autant que la concurrence fut rude avec les fêtes incontournables du Pays basque comme celle de Bilbao, qui se tenait en même temps. « Dans un contexte d’occupation policière qui faisait craindre aux gens de ne pouvoir passer la frontière, dans ces conditions spéciales de psychose totale, rassembler autant de monde est un succès. Toutes les salles du Ficoba [salle d’Irun où se tenait le contre-sommet] étaient trop petites pour accueillir les participants. Et réussir “la marche des portraits” [les photos officielles d’Emmanuel Macron dérobées dans les mairies] à Bayonne, où toute initiative était interdite, montre nos capacités à mobiliser », conclut Txetx Etcheverry, porte-parole de Bizi ! et cofondateur d’Alternatiba.
Pied de nez aux forces de l’ordre
Dimanche matin, 14 des 128 portraits officiels du président Macron, « réquisitionnés » lors des derniers mois dans les mairies de la France entière, ont été brandis lors d’une déambulation de plusieurs centaines de personnes dans les rues du Petit-Bayonne. Tous portaient des cadres emballés, de façon à perturber d’éventuelles saisies par la police des portraits officiels.
Mais les gendarmes mobiles se sont contentés de laisser passer les manifestants, et les organisateurs ont pu tenir une conférence de presse devant des dizaines de journalistes de la presse internationale, en présence de Susan George, figure de l’altermondialisme et présidente d’honneur d’Attac, de Jean-François Julliard (Greenpeace France), d’Esther Bernard (Youth For Climate), de Pauline Boyer (Alternatiba) et de Cécile Marchand (ANV-COP21). Ces deux dernières sont poursuivies pour avoir décroché des portraits.
A cette occasion, le directeur de Greenpeace a rappelé son intention d’aller jusqu’au bout de la démarche judiciaire de « L’Affaire du siècle », avec la plainte déposée par quatre ONG, et « d’obtenir une condamnation de l’Etat français pour carence fautive contre le dérèglement climatique ».
Ultime pied de nez aux quelque 13 000 gendarmes et policiers déployés pour le G7, ces organisations ont réussi à déployer une banderole dénonçant l’inaction du président Macron lors de la visite dimanche des « premières dames » dans un village typique du Pays basque intérieur, Espelette.
Rémi Barroux (Bayonne, envoyé spécial) et Raphaëlle Bacqué (Anglet (Pyrénées-Atlantiques), envoyée spéciale)
Par Rémi Barroux et Raphaëlle Bacqué Publié hier à
• Le Monde. Publié le 25 août 2019 à 19h31, mis à jour à 12h42 :
https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/08/25/un-contre-sommet-du-g7-reussi-pour-les-organisateurs-meme-si-les-anti-n-ont-pas-rejoint-en-masse-le-pays-basque_5502748_3224.html
Les militants anti-G7 multiplient les actions de désobéissance civile
En marge du contre-sommet du G7, organisé à Irun (Espagne) et Hendaye, des actions de désobéissance civile ont été menées face, dénoncent les militants, à l’inaction du gouvernement, notamment sur l’urgence climatique.
Comme un pied de nez aux quelque 13 000 membres des forces de l’ordre présents dans la région pour assurer la sécurité du G7 à Biarritz, des militants d’ANV-COP21 (Action non violente-COP21) et de Bizi ! (« Vivre ! » – association basque qui lutte pour la justice environnementale et sociale) ont subtilisé un portrait du président de la République, vendredi 23 août, veille de l’ouverture du sommet, dans la mairie d’Irissarry (Pyrénées-Atlantique).
A 10 heures, une poignée de militants se sont introduits dans la mairie de ce petit village (886 habitants) du Pays basque intérieur, non loin de Saint-Jean-Pied-de-Port. En quelques minutes, la photo officielle d’Emmanuel Macron était décrochée, pour rejoindre les 127 portraits déjà décrochés des murs de mairies. « Climat, justice sociale ! Où est Macron ? », interrogent Elodie et Eneko, les deux jeunes militants qui ont agi à visage découvert, sans violence, selon le modus operandi décidé par l’association.
Présent dans les locaux, l’adjoint au maire Pierre Duranga a commenté l’action avec le sourire. « C’est un acte non violent, plutôt sympathique, un moyen de pression original qui change des manifestations traditionnelles, et on peut comprendre ce message », a-t-il confié au Monde. Deux heures plus tard, les gendarmes arrivaient sur les lieux, sans toutefois entrer dans la mairie.
« Le vrai crime est de se féliciter de petits pas »
En marge du contre-sommet du G7 – et de ses innombrables colloques et ateliers –, organisé à Irun (Espagne) et Hendaye par deux coordinations (l’une basque et l’autre française) regroupant une centaine d’organisations, il importait à certaines associations de mettre en avant la nécessité d’actions de désobéissance civile, face, dénoncent-elles, à l’inaction du gouvernement, notamment sur l’urgence climatique.
« Ce n’est pas par plaisir ou par jeu que nous menons ce type d’action, c’est un cri d’alerte que nous lançons : alors que notre planète brûle sous nos yeux, à l’image de la forêt d’Amazonie, que les inégalités sociales sont de plus en plus criantes, le vrai crime est de se féliciter de petits pas et se contenter de déclarations d’intentions », explique Elodie Nace, d’ANV-COP21.
Quelques heures plus tard, c’était au tour de 80 militants d’Attac (Association pour la taxation des transactions financières et pour l’action citoyenne), de la Confédération paysanne, de Bizi !, du LAB (pour Langile Abertzaleen Batzordeak, en basque – « Commissions ouvrières patriotes ») et des Amis de la Terre de bloquer les entrées de l’usine Monsanto-Bayer de Peyrehorade (Landes). Durant une heure, en début d’après-midi, ils ont dénoncé les « désastres sanitaires et environnementaux » engendrés par les activités du groupe pharmaceutique et agrochimique allemand. « Tant que les Etats ne seront pas à la hauteur des enjeux, les citoyen·ne·s multiplieront les actions pour mettre des multinationales comme Bayer-Monsanto hors d’état de nuire », déclarent ces organisations dans un communiqué.
Des affrontements à Urrugne dans la soirée
La fièvre montait donc à la veille de l’ouverture du G7. Dans la soirée de vendredi, des affrontements se sont déroulés à l’entrée du camp où sont hébergés des milliers de participants au contre-sommet. Selon la préfecture, une unité de gendarmes mobiles est intervenue à l’issue d’une petite manifestation non autorisée à Urrugne (Pyrénées-Atlantiques), au cours de laquelle dix-sept personnes ont été interpellées, puis placées en garde à vue pour « dissimulation du visage à l’occasion d’une manifestation ».
A l’issue de ce rassemblement, des projectiles ont été lancés sur les forces de l’ordre. « L’utilisation d’un mortier a blessé légèrement quatre gendarmes », a annoncé la préfecture, confirmant au Monde que les forces de l’ordre avaient alors répliqué avec des grenades lacrymogènes et des lanceurs de balle de défense. Les policiers ont également tenté de retirer une barrière montée par certains manifestants à l’entrée du camp.
En milieu de soirée, la situation était stabilisée, selon la préfecture, des forces de l’ordre stationnant autour du campement. Une centaine de personnes seraient jugées dangereuses par la préfecture, qui assure toutefois qu’il n’est pas question d’évacuer le site. L’épisode risque cependant de compliquer la tenue des manifestations du week-end.
Samedi, une manifestation devrait en effet regrouper plusieurs milliers de personnes entre le port d’Hendaye et Irun (de l’autre côté de la Bidassoa, en Pays basque espagnol). A l’issue de la marche, une déclaration des nombreux organisateurs de ce contre-sommet devait être lue, déclinant les moteurs de la mobilisation « face à un G7 divisé dont il ne sortira rien ».
« Avec ce contre-G7, nous voulons démontrer qu’il est possible de résister au système capitaliste qui scie la branche sur laquelle l’humanité est assise », déclarent-elles. L’appel se conclut sur un agenda fourni, mêlant tant les grèves internationales sur le climat, prévues du 20 au 27 septembre, que la Journée internationale du droit à l’avortement (28 septembre), la Semaine internationale de la rébellion (au début d’octobre) ou encore les mobilisations prévues pour les procès, au début de septembre, à Lyon, Paris et Orléans, contre les décrocheurs des portraits de Macron.
Ceux-ci devraient justement faire leur apparition, dimanche matin, dans les rues du centre de Bayonne, pour signifier l’inaction du chef de l’Etat sur les fronts climatique et social. Une perspective que la préfecture fait tout pour éviter. Même si, à l’Elysée, on assure que le sujet des portraits décrochés d’Emmanuel Macron n’est pas une obsession et qu’aucune instruction n’a été donnée à propos de cette « marche des portraits ».
Bayonne, quadrillée par les forces de l’ordre
« Il n’y a pas d’attention particulière sur cet événement par rapport aux autres » prévus à l’occasion du contre-sommet, explique une proche du chef de l’Etat. Au contraire, l’exécutif dit vouloir porter une attention forte à la société civile à l’occasion du G7. Vendredi, plusieurs ONG (parmi lesquelles le WWF, Care, Amnesty International, Human Rights Watch, RSF…) ont ainsi été reçues à l’Elysée par le chef de l’Etat pour échanger sur les enjeux du sommet et faire part de leurs propositions en matière de lutte contre les inégalités et pour la protection de la planète.
Pour autant, rappelle-t-on à la tête de l’Etat, il n’est pas question d’accepter le moindre acte de violence à l’occasion de ces événements. « Rien ne saurait justifier le recours à la violence (…), il n’y a pas de liberté s’il n’y a pas d’ordre public », a rappelé Emmanuel Macron lors d’une rencontre avec des journalistes, mercredi 21 août. « La violence est un défi pour les dirigeants que nous sommes », avait-il ajouté, assurant qu’il était de sa « responsabilité de pacifier cela, non pas en cédant à ceux qui font le pire, mais en essayant de retrouver des modalités de discussion ».
Dans Bayonne, quadrillée par les forces de l’ordre, vendredi en fin de journée, l’inquiétude gagnait commerçants et habitants, des appels ayant fleuri à rejoindre la ville, qui fait partie du périmètre interdit aux manifestations (avec Biarritz et Anglet), samedi en fin de journée. Une crainte de débordements que voudraient aussi éviter les organisateurs du contre-sommet du G7 et de la « marche des portraits », annoncée le lendemain dans le vieux Bayonne.
Rémi Barroux (Pays basque, envoyé spécial) et Cédric Pietralunga (Pays basque, envoyé spécial)
• Le Monde. Publié le 23 août 2019 à 21h28 - Mis à jour le 24 août 2019 à 12h04 :
https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/08/23/les-militants-anti-g7-multiplient-les-actions-de-desobeissance-civile_5502257_823448.html
A Bayonne, les anti-G7 organisent une « marche des portraits » de Macron
Les militants alternatifs et écologistes ont défilé avec des portraits du président décrochés depuis des mois dans des mairies.
Une nouvelle manifestation, la troisième en deux jours, a rassemblé dimanche 25 août dans la matinée à Bayonne quelques centaines de manifestants anti-G7, cette fois « pour le climat et la justice sociale », brandissant certains des 128 portraits du président Macron décrochés depuis des mois dans des mairies.
Notre correspondant, Rémi Barroux, suit la mobilisation des manifestants anti-G7 :
Sous le slogan « Climat et justice sociale : Macron décroche, décrochons-le ! », cette « marche des portraits », était organisée par les mouvements alternatifs et écologistes ANV COP 21, Alternatiba et Bizi, ces deux derniers d’origine basque. Elle se voulait « 100 % non violente et à visage découvert », selon les organisateurs.
Dans les rues étroites du centre de Bayonne, des militants ont déambulé en brandissant des portraits du chef de l’Etat, tête en bas, scandant « on est plus chauds que le climat » ou « et un, et deux, et trois degrés, c’est un crime contre l’humanité ». « On le porte à l’envers pour signifier le manque de sens de sa politique », a expliqué Mathieu, militant de Bizi. Beaucoup portaient aussi des paquets semblant emballer un portrait présidentiel, sur lequel était écrit en français, anglais, espagnol ou basque « Climat, justice sociale, où est Macron ? ».
Les manifestants se sont ensuite dispersés dans le calme après deux heures d’action « dans la zone la plus sécurisée de l’Etat français », selon eux. Les forces de l’ordre sont toutefois restées très discrètes tout au long de la manifestation.
Le 128e portrait décroché vendredi à Irissary
La journée de samedi, ouverture du G7, avait été marquée par deux manifestations d’opposants au sommet : la plus grande, qui a réuni 15 000 personnes selon les organisateurs (9 000 selon la police), a défilé de Hendaye à Irun, sur la frontière espagnole, dans le calme et sans incident. En fin de journée à Bayonne, une manifestation, non autorisée celle-là, a donné lieu à de brefs heurts entre police et manifestants, avec tirs de canon à eau et gaz lacrymogène, mais sans débordements majeurs, sans blessés ni dégâts aux commerces.
Vendredi matin encore, à la veille du G7, un portrait du chef de l’Etat a été décroché dans la mairie d’un petit village du Pays basque, Irissary, une petite mairie des Pyrénées-Atlantiques. Un « pied de nez » à l’impressionnant dispositif de sécurité déployé sur la région pour le G7, avec 13 200 policiers, selon Alternatiba, Bizi et ANV COP21.
Ce portrait, selon ces associations, était le 128e décroché par des militants dans diverses mairies de France depuis février, dans la lignée des « actions de désobéissance civile non violente » revendiquées par ces associations. Ces actions ont donné lieu à 93 gardes à vue de militants et 57 convocations de militant, selon la même source.
• Le Monde. Publié le 25 août 2019 à 13h07, mis à jour à 14h47 :
https://www.lemonde.fr/climat/article/2019/08/25/a-bayonne-les-anti-g7-organisent-une-marche-des-portraits-de-macron_5502677_1652612.html