Le Sri Lanka a rétabli, mardi 14 mai, le couvre-feu sur l’ensemble de son territoire à la suite d’émeutes antimusulmanes qui ont fait un mort. Ces tensions interviennent trois semaines après les attentats du dimanche de Pâques, le 21 avril, quand 258 personnes ont péri dans des attaques-suicides qui ont visé trois églises et trois hôtels, et ont été revendiquées par le groupe Etat islamique (EI).
La police a annoncé qu’un peu plus de 80 personnes avaient été arrêtées en lien avec ces violences, et étaient détenues dans cadre de l’état d’urgence. Par ailleurs, le blocage de l’accès aux réseaux sociaux imposé lundi à Facebook, WhatsApp, YouTube et Instagram a été étendu mardi à Twitter, ont annoncé des fournisseurs de services sur internet. Il vise à limiter la diffusion de messages incitant à la violence.
Les émeutes ont éclaté en plein ramadan dans la province du Nord-Ouest, trois semaines après les attentats djihadistes de Pâques. Les violences antimusulmanes ont commencé dimanche, notamment à Chilaw (80 km au nord de Colombo). Lundi, dans le district de Puttalam, un commerçant musulman âgé de 45 ans a été lynché au cours d’émeutes par une foule qui l’a attaqué avec des armes tranchantes dans son atelier de menuiserie, selon la police.
Mosquées, magasins, habitations attaqués
Ailleurs, des groupes ont attaqué des magasins, des habitations et des véhicules appartenant à des musulmans, ainsi que des mosquées. Dans le district de Gampaha, voisin de celui de Puttalam, un commerçant d’électronique de Minuwangoda, à 45 km au nord de Colombo, a expliqué à l’Agence France-Presse (AFP) que des hommes à moto, qui « n’étaient pas de la ville », avaient dirigé lundi les attaques. Selon lui, « ils ont commencé à vandaliser des magasins appartenant à des musulmans et à jeter des cocktails Molotov, puis les habitants se sont joints à eux ». Les forces de sécurité ont fini par tirer en l’air pour les disperser.
Une usine de pâtes alimentaires appartenant à un musulman a été incendiée. Joint au téléphone par l’AFP, son propriétaire, Ashraf Jifthy, a précisé que trois de ses employés avaient été blessés et que « les forces de sécurité étaient à l’extérieur mais n’ont pu empêcher l’attaque, survenue pendant le couvre-feu ». Toujours à Minuwangoda, une mosquée a été caillassée, tandis qu’à Kinyama, deux autres ont été vandalisées sous les yeux de policiers complètement dépassés. A Bingiryiya, « environ 2 000 personnes ont entouré notre mosquée et l’ont saccagée », a raconté un responsable religieux local.
Dans une allocution télévisée lundi soir, le premier ministre, Ranil Wickremesinghe, a estimé que les émeutes pouvaient entraver l’enquête sur les attentats de Pâques, à la suite desquels l’état d’urgence a été décrété, renforçant les pouvoirs des forces de sécurité.
La police a décrété un couvre-feu au niveau national une première fois lundi soir. Levé mardi matin, il a été de nouveau instauré mardi à partir de 21 heures (15 h 30 GMT) dans tout le Sri Lanka, a déclaré le porte-parole de la police, Ruwan Gunasekera.
Le Sri Lanka, pays dont les habitants sont en majorité de confession bouddhiste, compte environ 10 % de musulmans et 7,6 % de chrétiens.
Le Monde avec AFP et Reuters