Faut-il voir dans la décision du Tribunal supérieur de justice (STJ) une première étape vers la sortie de prison de Lula ? Rien n’est moins sûr.
Mardi 23 avril, les quatre juges de la cour qui se prononçaient sur un recours déposé par la défense de l’ancien président brésilien, ont voté à l’unanimité l’allégement de sa peine, passée de douze ans et un mois d’incarcération à huit ans et dix mois.
Une décision qui doit permettre au leader historique de la gauche brésilienne de bénéficier d’un régime de détention semi-ouvert ou d’une prison domiciliaire dès le mois de septembre, quand il aura purgé un sixième de sa peine.
Accusé de s’être fait offrir un triplex sur le littoral de São Paulo par un géant brésilien du BTP, OAS, en échange de contrats avec la compagnie pétrolière publique Petrobras, Lula avait été incarcéré en avril 2018 pour corruption et blanchiment d’argent.
Une décision insuffisante selon le camp de Lula
Mais dans le camp de l’ancien chef de l’État (2003-2010), où l’on continue de clamer son innocence, l’heure n’est pas encore à la fête : la décision des juges de réduire la peine de Lula ne remet pas en cause sa condamnation.
“Ce que je peux dire et réaffirmer, c’est que nous allons faire appel, nous allons présenter tous les recours que la loi nous permet d’utiliser pour que soit reconnue l’innocence de l’ancien président, car c’est le seul statut adéquat pour quelqu’un qui n’a pas commis de crime”, a ainsi affirmé son avocat au journal O Globo.
Le défenseur n’a toutefois pas manqué de relever certains points positifs dans la décision du tribunal : “Pour la première fois, un tribunal a reconnu que la peine appliquée à l’ex-président Lula […] est abusive. C’est peu, mais c’est un début.”
La Folha de São Paulo tempère ce relatif optimisme : “Les chances de Lula de revenir en arrière sur le cas du triplex s’amenuisent”, estime le quotidien.
“Politiquement, le résultat tend à affaiblir le récit adopté par le leader du [Parti des travailleurs] depuis qu’il est visé par l’enquête Lava Jato, celui d’être la cible d’une persécution politique, [sans] procès juste”
L’ancien président visé par sept autres affaires
Le vote des quatre juges constitue à la fois “une défaite et une victoire”, observe de son côté Estado de São Paulo.
“Si le climat a changé et que les vents paraissent favorables à Lula, il convient de ne pas oublier que l’affaire du triplex est seulement l’un des nombreux [dossiers] qui assombrissent le destin de l’ex-président”, rappelle le quotidien.
La perspective d’un passage au régime semi-ouvert pourrait en effet être réduite à néant par une possible condamnation en deuxième instance de Lula dans le cadre d’un autre procès, concernant la ferme d’Atibaia.
Accusé d’avoir fait financer des travaux de rénovation dans cette propriété rurale par deux groupes de BTP, à hauteur de 1 million de reais (plus de 200 000 euros), l’icône de gauche a été inculpée en février dernier, cette fois encore pour corruption et blanchiment d’argent.
Lula a toujours rejeté ces accusations, affirmant que la ferme, enregistrée au nom d’un de ses proches, ne lui appartenait pas.
“Dans le procès concernant la propriété d’Atibaia, Lula a seulement été condamné en première instance”, rappelle le site El País Brasil.
“Si le Tribunal régional fédéral confirme [en appel] cette condamnation, une possible sortie de prison du ‘pétiste’ en septembre pourrait être contrariée.”
L’ancien chef de l’État est par ailleurs visé par six autres actions pénales, par lesquelles il est accusé de corruption passive, blanchiment d’argent, trafic d’influence et appartenance à une organisation criminelle. “Des délits dont les peines maximales cumulées peuvent atteindre 134 ans”, précise l’hebdomadaireVeja.
Morgann Jezequel
Courrier International
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