“Il a suffi d’un reportage, et toute la Belgique était ébranlée”, observe le jouobserve le journal néerlandais Algemeen Dagblad.rnal néerlandais Algemeen Dagblad. Mercredi 5 septembre, les téléspectateurs flamands ont pu découvrir sur la chaîne publique VRT le documentaire Qui est vraiment Schild & Vrienden ? La semaine suivante, le reportage était diffusé en français sur la RTBF.Et ce document n’a pas fini de provoquer des remous dans la sphère politique et dans l’opinion, poursuit Algemeen Dagblad.
Pendant plusieurs mois, le journaliste Tim Verheyden a infiltré Schild & Vrienden (S & V, “bouclier et amis”), un mouvement de l’ultradroite flamande, dont il révèle la face la plus sombre.
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Car Schild & Vrienden n’est pas un groupement de skinheads en blousons noirs, mais plutôt de jeunes gens “au look BCBG”,comme le note La Libre Belgique. Jusque-là, écrit De Standaard,“il apparaissait comme un mouvement de jeunesse nationaliste flamand qui défend l’identité flamande, les valeurs de la famille traditionnelle et les idées conservatrices”. Créé au début de l’année 2017, il s’est fait connaître en organisant notamment une opération coup de poing visant à saboter une manifestation de soutien aux migrants (dont la vidéo de propagande a beaucoup circulé), ou en s’improvisant service d’ordre lors d’une conférence contestée du très controversé secrétaire d’État à l’Asile et à la Migration, Theo Francken.
Le leader de Schild & Vrienden, Dries Van Langenhove, est un jeune homme éloquent et propret, invité à plusieurs reprises dans les médias. Il était également élu au conseil d’administration de son université, celle de Gand, dont il a été exclu après la diffusion du reportage.
“Le moment de la violence viendra”
Or c’est justement l’une des révélations du reportage : la stratégie d’entrisme de S & V dans des partis politiques et des organismes de la société civile. “Si quatre membres du Conseil flamand de la jeunesse sont liés à Schild & Vrienden, ce n’est pas un hasard, mais le résultat d’une action bien réfléchie, explique De Standaard. Avec ses élus, le mouvement de jeunes nationalistes flamands cherche à perturber le fonctionnement du Conseil de la jeunesse, et notamment à influencer des enquêtes d’opinion.”
Cette stratégie s’organise sur des groupes de discussion privés, qui constituent l’autre révélation du reportage. Sur Facebook et Discord, les membres de S & V préparent leurs opérations et échangent sur un ton nettement moins policé qu’en façade : blagues et mèmes racistes, réflexions homophobes, misogynes ou antisémites, références au nazisme et à une “guerre des races”, ou encore encouragement à s’entraîner au maniement des armes à feu. Ainsi sur Discord, Dries Van Langenhove écrit :
Le moment de la violence viendra. Je sais déjà quel camp
sera préparé et quel camp ne le sera pas.”
Comme il n’existe pas de système d’adhésion, il est difficile d’estimer l’importance du mouvement. “Lors de certaines actions, les représentants de S & V ne sont que quelques-uns”, note De Standaard. Mais sur leur page Facebook, ils comptent plus de 27 000 mentions “j’aime”. “Quant au groupe fermé, il comptait [début septembre] 847 personnes.”
“La Belgique ne se serait jamais crue capable d’une chose pareille”
Après la diffusion du reportage, une enquête a été ouverte par le parquet de Gand. Les quatre membres du Conseil flamand de la jeunesse appartenant à Schild & Vrienden ont dû démissionner et plusieurs candidats aux élections communales du mois prochain, inscrits sur les listes N-VA (Nouvelle Alliance flamande) et proches du mouvement d’extrême droite, se sont retirés, énumère la RTBF.
Forcément, relève Le Soir, les regards se tournent vers la N-VA, poids lourd du gouvernement. Ce parti nationaliste flamand, première force politique du pays, a réussi sa percée avec une ligne de droite et un nationalisme fort, mais en se tenant à distance de l’extrême droite, incarnée par le Vlaams Belang. Or “l’enquête [de la VRT] a clairement démontré ce que certains affirmaient de longue date : des liens existent entre les membres de ce mouvement [Schild & Vrienden] et la N-VA”. Le parti a immédiatement réagi et promis de mener un “nettoyage”.
Le secrétaire d’État Theo Francken a déclaré après la diffusion que la vision défendue par le mouvement identitaire n’était “pas [sa] Flandre et pas [ses] valeurs”. Mais “est-ce un hasard si c’est à l’une de ses conférences que S & V avait décidé d’‘assurer la sécurité’ ?”s’interroge Knack.“Rien de surprenant à ce que des jeunes nationalistes flamands radicalisés se sentent proches de politiciens qui disent vouloir mettre fin à ‘l’immigration illégale’”, même si “cela ne signifie pas pour autant que ces derniers partagent leurs idées”.
De son côté, Schild & Vrienden a vigoureusement nié le contenu du reportage et accusé la VRT de “manipulation” et de vouloir “dépeindre tous les Flamands comme des racistes”.
Carole Lyon
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