L’heure des comptes a sonné. Deux ans après le tsunami qui a fait plus de 240 000 morts en Asie du Sud-Est et suscité une générosité sans précédent à travers le monde, la Cour des comptes a publié hier un très attendu rapport sur « l’aide française aux victimes du tsunami du 26 décembre 2004 ». Un travail colossal qui a mobilisé pendant plusieurs mois pas moins de 24 magistrats qui ont mené une vingtaine de missions en Indonésie, au Sri Lanka et en Thaïlande. Philippe Séguin, premier président de la Cour des comptes, a estimé lors de la présentation des documents à la presse que cette juridiction avait mené « un programme sans précédent de contrôles ».
350 millions d’euros récoltés
Les Français ont versé aux différentes ONG françaises près de 350 millions d’euros. L’étude des magistrats porte sur 90 % de ces dons, soit très précisément 323 millions d’euros, répartis entre 32 associations. Si l’on met de côté le cas de l’UNICEF France qui a reversé la totalité de l’argent reçu (57 millions d’euros) au siège de New York, il ressort de cette enquête qu’à la date du 31 décembre 2005, les deux tiers des dons n’avaient pas encore été dépensés : 66,5 %. En queue de peloton se trouvent notamment la Croix-Rouge française (85 % des fonds non utilisés) et le Secours catholique (80 %). Ces deux associations avaient totalisé à elles deux près de la moitié des dons. Pour leur défense, les ONG indiquent avoir dépensé une grande partie des sommes en 2006, une année pas prise en compte par la Cour. Elles indiquent aussi avoir étalé leurs financements sur plusieurs années pour monter des projets de développement de plus long terme.
Pourtant, la Cour des comptes estime que même en prenant en compte le premier semestre 2006, l’aide dépensée n’excéderait pas les 50 %. Un taux qualifié de « faible » par Philippe Séguin, premier président de l’institution. Selon ce dernier, « le problème est qu’un tel excédent de ressources et un tel étalement dans le temps des projets ne sont pas sans risque ». « Avec le temps, le lien entre les actions entreprises et la catastrophe s’estompe et il devient difficile de distinguer aide aux victimes et aide plus générale au développement dans des régions déjà fortement démunies », précise-t-il. Par ailleurs, Philippe Séguin a estimé que des ONG spécialisées dans l’urgence s’étaient aventurées dans des missions de développement, c’est-à-dire dans « des métiers qui n’étaient pas les leurs ».
Satisfecit pour quinze associations
Au final, toutefois, aucune association n’est réellement épinglée. « Les dépenses des ONG contrôlées sont apparues globalement conformes aux objectifs poursuivis par les appels à la générosité publique », indique le rapport. Sur les 32 associations, 15 ont reçu un satisfecit, 9 des recommandations. Les 8 dernières ont fait l’objet de véritables réserves comme Médecins du monde. Dans ses conclusions, la Cour des comptes indique que la réaffectation des dons à d’autres crises est à encourager. Mais à condition d’informer les donateurs. L’institution effectuera une deuxième série de vérifications en 2009.