Rappel des fondamentaux hackers
Avant d’aborder les différentes formes que peut prendre l’hacktivisme actuel, pour éviter toute méprise, avançons pas à pas. L’hacktivisme est un mot valise, combinaison du terme hack et activisme. L’hacktiviste au sens strict est intimement lié à la notion de hacker.
Pour se fonder une juste opinion loin des fantasmes et des lieux communs, rappelons tout d’abord ce que sont les fondamentaux hackers dans la mesure où ceux-ci sont à même de servir d’armature philosophique aux actions hacktivistes (slacktivisme inclus) dans la reconquête et l’exercice d’un pouvoir citoyen responsable.
De la différence entre le black hat hacker et le white hat
Au regard de l’usage imprécis et souvent à connotation péjorative du terme hacker soyons précis : il ne s’agirait pas de mettre dans le même panier ceux qui mettent leur savoir technologique à des fins hostiles et ne sont pas vraiment émus par la notion d’éthique : les black hat hackers, et ceux qui le mettent au service du bien : les white hat.
L’éthique hacker et ses six principes
Hackers : Heroes of the Computer Revolution de Steven Levy publié en 1984 est le premier ouvrage qui s’intéressera véritablement à la culture hackers et à ses principes éthiques. Il faudra attendre 2013, pour disposer d’une traduction française sous le titre de L’Éthique des hackers.
Pour faire simple, selon Levy l’éthique de la communauté hacker suit six principes avec lesquels les white hat ne transigent pas :
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L’accès aux ordinateurs – ainsi que tout ce qui peut permettre de comprendre comment le monde fonctionne – doit être universel et sans limitation. Il ne faut pas hésiter à se retrousser les manches pour surmonter les difficultés.
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Toute information doit être libre.
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Se méfier de l’autorité – encourager la décentralisation.
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Les hackers doivent être jugés selon leurs hacks, et non selon de faux critères comme les diplômes, l’âge, l’origine ethnique ou le rang social.
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On peut créer l’art et le beau à l’aide d’un ordinateur.
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Les ordinateurs peuvent améliorer notre vie.
Dans ce cadre éthique, les hackers se montrent soucieux de l’intérêt du collectif. Ils sont par ailleurs – la plupart du temps – contre les membres de l’autorité dès lors que celle-ci s’attaque d’une quelconque façon à la liberté numérique : censure, coupure, surveillance illégitime… leurs actions pourraient être qualifiées d’hacktivisme technologique.
Les principes énoncés sont toujours d’actualité, à titre d’illustration et conformément à cette éthique, le hacker Elliot Alderson a prévenu les Indiens des pratiques douteuses de leur premier ministre Narendra Modiqui à compromis les données personnelles de millions d’indiens qui avaient téléchargé son application mobile personnelle NA MO. Cette forme d’hacktivisme technologique est la pierre angulaire de l’hacktivisme pour plusieurs raisons :
- Elle veille à informer la société civile de dérives et risques technologiques auxquels elle est exposée, qu’il s’agisse de mises en danger intentionnelles ou non. Elle invite généralement, préalablement à toute divulgation au grand public, les responsables à effectuer les correctifs nécessaires.
- Elle permet aux autres formes d’hacktivismes de conserver leur pouvoir de s’exprimer, à l’instar de groupe Telecomix qui veille à ce que les états ne puissent pas priver leur population d’accéder à Internet.
- Elle définit des lignes de conduite éthiques qui rendent l’action menée crédible et légitime.
Mais l’éthique hacker, va au-delà de ces six principes qui la définisse. Elle est aussi porteuse d’une innovation sociale majeure… qui sera l’objet de la prochaine chronique.
À suivre
Yannick Chatelain
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