A Bagdad, la guerre civile fait rage. Les femmes en sont les premières victimes. L’Organisation pour la liberté des femmes en Irak, qui enquête dans les conditions les plus difficiles, nous a envoyé ces informations sur l’horreur quotidienne qu’elles vivent actuellement.
Femmes dans la guerre civile
La situation irakienne empire de jour en jour, mais le premier ministre islamiste al-Maliki et son patron, Georges W. Bush, se refusent à y voir une guerre civile. Les femmes sont les premières victimes de cette situation, produit de la dictature baathiste soutenue par les USA, de l’embargo économique imposé par les USA, puis de l’occupation militaire dirigée par les USA et des exactions commises aussi bien par les milices islamistes alliées aux USA que par leurs adversaires. Les informations qui suivent nous ont été adressées par al-Moussawat (« L’égalité »), journal de l’Organisation pour la liberté des femmes en Irak (OLFI).
150 femmes exécutées en 10 jours à la morgue de Bagdad
12/11/06, Bagdad – Prétendant être à la recherche d’une parente disparue, des militantes de l’Organisation pour la liberté des femmes ont pu rentrer dans la morgue de Bagdad. L’employé qui leur a montré les corps de 150 femmes, non réclamés par leurs familles. Bon nombre étaient décapitées, défigurées ou portaient des marques de torture. Ces corps étaient arrivés durant les deux derniers jours. Faute de place, il devenait impossible de les conserver dans la morgue, si bien qu’ils étaient installés dans des pièces à température ambiante ou sur les terrasses extérieures.
Avec le retour du tribalisme, les familles refusent de reconnaître que leurs filles ont été enlevées, car c’est mauvais pour « l’honneur » de la famille. Si elle est violée et tuée, personne ne vient chercher le corps. Au rythme de 15 femmes par jour, c’est 5500 femmes qui seront ainsi tuées durant l’année à venir.
Des familles sunnites déportées par l’armée irakienne
07/12/06, Kadhimya – Um Muhammad, une jeune irakienne, allait à Kadhimiya par les transports en commun, lorsque bus a été arrêté à un check point tenu par l’armée irakienne. Les soldats ont commencé à vérifier les identités et à emmener les sunnites, hommes, femmes et enfants. Aussitôt plein, un premier camion est parti pour une destination inconnue.
Um Muhammad, sunnite elle-même, a prétendu être shiite et a été laissée libre, mais elle a eu le temps de voir que ceux qui étaient emmenés avaient été menottés. Il n’est pas rare de trouver dans les rues les corps torturés des victimes d’exécutions massives, qui sont pratiquées par les milices islamistes rivales, aussi bien shiites que sunnites.
Le poète Ayman al-Samawie a été assassiné
23/12/06, Bagdad – Dans le quartier sunnite de al-Maeden, une milice sunnite a attaqué la maison dans laquelle se réunissait un groupe de poètes. Ayman Al-Salmawie, un poète renommé qui avait récemment participé à la deuxième rencontre des « Espaces de liberté » initiée par l’Organisation pour la liberté des femmes en Irak (OLFI), a été tué durant l’attaque, de même que son frère. Plusieurs autres personnes ont été blessées.
Pendaison publique pour une femme « adultère »
09/11/06, Bagdad - Bien que les crimes « d’honneur » aient considérablement augmentés depuis la guerre, les exécutions publiques de femmes sont un phénomène nouveau. Selon nos estimations, au moins trente femmes sont tuées tous les mois pour des raisons « d’honneur », par ces milices à Bagdad et dans les faubourgs.
L’Armée du Mahdi (milice chiite, membre de la coalition gouvernementale, dirigée par Muqtada al-Sadr) vient de lancer une nouvelle vague d’exécutions publiques de femmes. Les flagellations, les pendaisons et les fusillades, selon une procédure routinière, augmentent régulièrement. Dans le secteur shiite de Bagdad, qui incluse Nuwab Al-Thubat et Al-Amin, trois jeunes filles ont été tuées durant le second week-end de novembre.
Le 9 novembre, une militante de l’Organisation pour la liberté des femmes en Irak, a été témoin de l’une de ces exécutions. Elle était venue enquêter sur les deux précédentes. En arrivant à Nuwab Al-Thubat, elle a entendu les cris d’une jeune femme. Celle-ci était poussée par des miliciens de l’Armée du Mahdi, qui la frappaient violement. Ils l’ont amenée dans un terrain de football, lui ont passé un câble autour du coup et l’ont pendus aux buts. Ensuite, ils ont transpercé son corps de plusieurs rafales de balles. Son frère a tenté de venir l’aider ; il a été tué également.
L’Armée du Mahdi, dont de nombreux membres travaillent dans la police, sont volontaires pour punir les femmes « adultères » par la torture et l’exécution publique. Bien que les clercs shiites aient légalisé le mariage « Mutaa » (mariage « pour le plaisir », à durée limitée, généralement assimilé à la prostitution), la plupart des femmes qui le pratiquent sont ensuite victimes de crimes « d’honneur » perpétrés par les hommes de leur propre familles ou par les miliciens de l’Armée du Mahdi.