Les exigences portées par les syndicalistes, et que nous soutenons – accès à la prime d’activité et au RSA, déclenchement automatique de l’instruction pour les autres aides (logement, santé, allocations familiales, aides d’urgences, tarifs sociaux…), accès à un service de remplacement gratuit... – illustrent les situations de détresse et de pauvreté que vivent les paysanEs victimes de la crise.
Il n’y a aucune raison pour qu’à qualification égale unE paysanE gagne moins qu’unE salariéE.
Un revenu minimum rémunérant dignement la production et les autres services, reconnaissant la qualification, doit être garanti.
Il faut aussi des mesures comme des moratoires sur les dettes qui acculent au désespoir les petits et moyens exploitantEs, des prix garantis et des quotas de production…
Des mécanismes d’encadrement des prix, de stockage et de contingentement des productions avec un plafonnement des quotas par personne, permettraient d’ajuster la production à la demande alimentaire et de rompre la spirale infernale qui conduit à devoir produire toujours plus pour tenter de survivre.
Il n’y a pas à choisir entre la qualité de vie et de travail des agriculteurEs et la protection de l’environnement.
L’accès facilité au crédit et les aides doivent être réorientées pour l’amélioration du respect de l’environnement, la préservation des ressources, l’amélioration des conditions de travail, la réduction du temps de travail. Les zones difficiles doivent être privilégiées pour favoriser une occupation harmonieuse de l’espace rural. Les circuits courts et les filières autogérées comme les AMAP et les vraies coopératives doivent aussi être soutenues.
Ne laissons plus les multinationales dicter leur loi. Nous exigeons l’interdiction des OGM et l’abrogation de la réglementation sur les semences, l’application immédiate, effective, du principe de précaution sur les risques sanitaires liés à l’utilisation des produits dits phytosanitaires, une réorientation des programmes de recherche et de l’enseignement agricole vers la vraie agroécologie, qui n’est pas le verdissement que promeut le gouvernement.
La transparence et la démocratie dans la gestion du foncier doivent s’imposer, à l’opposé des choix actuels qui privilégient systématiquement l’agrandissement des exploitations au détriment de l’installation et des pratiques alternatives.
De même, il faut combattre les grands projets inutiles et destructeurs – autoroutes, aéroports, LGV, parcs de loisirs, centres commerciaux, barrages… – qui détruisent chaque année des terres agricoles. Grâce à l’unité très large et à la détermination des paysanEs, des occupantEs, des riverainEs, des défenseurEs de l’environnement et de la biodiversité… il est possible de gagner comme le prouve la magnifique lutte de Notre-Dame-des-Landes.
Les salariéEs de l’agriculture, des industries de l’agroalimentaire et de la grande distribution subissent aussi le coût social et sanitaire de cette course au profit, leurs droits doivent être renforcés, contre les licenciements, la précarité, les atteintes à leur vie et à leur santé…
Ces réponses indispensables sont en totale rupture avec le libre-échange des CETA, TAFTA et autres traités. Elles ne seront imposées qu’en combattant la politique tant du gouvernement que des institutions européennes. Les banques ont le pouvoir d’immobiliser et de mobiliser toutes les ressources financières qui, pourtant, sont le produit de notre travail. Il faut leur retirer ce pouvoir exorbitant, les exproprier et instaurer un monopole bancaire, public et transparent, contrôlé en permanence démocratiquement.
De même, les grands groupes capitalistes de l’énergie, de l’agroalimentaire, de la distribution nous imposent leur productivisme destructeur. Le scandale Lactalis, après bien d’autres, montre qu’ils n’hésitent pas à poursuivre la production et la distribution de produits dangereux pour la santé. Ils doivent être expropriés et socialisés car c’est aux populations elles-mêmes de contrôler et de décider des grands choix de production, des réseaux de transport et d’énergie, de ce qui doit croître ou décroître en fonction de nos besoins réels et en préservant l’environnement et les conditions de vie des générations futures.
Changer le système : on ne sortira pas des crises agricoles sans sortir du capitalisme
L’agriculture doit retrouver sa fonction, qui n’est pas de faire du profit mais de nourrir les populations en qualité et en quantité. Ce qui est incompatible avec l’agro-industrie.
Les responsables des difficultés des paysanEs d’ici ne sont pas les paysanEs d’ailleurs !
Les paysanEs doivent pouvoir utiliser et partager leurs semences, élever des races d’animaux locales et adaptées, leur accès à la terre doit être garanti. C’est une agriculture locale dont les buts ne sont pas les exportations et la spéculation.
La localisation des productions est primordiale. Cela évitera que des ingrédients fassent 3 500 km avant d’être réunis dans un pot de yaourt aux fraises ! Ou que des crevettes danoises partent au Maroc pour y être décortiquées, puis retournent au Danemark pour être acheminées vers leurs lieux de commercialisation ! L’aberrante inventivité destructrice des capitalistes n’a pas de limites. Il faut développer l’agriculture vivrière permettant la souveraineté alimentaire. C’est-à-dire que l’agriculture doit permettre aux populations de se nourrir par elles-mêmes avec les productions locales, de saison. C’est la condition pour sauver le climat et nous sauver avec. C’est l’inverse du nationalisme qui ferme les frontières aux importations mais ne renonce pas à inonder les marchés et à faire crever l’agriculture des pays du sud. Contre ceux qui affirment que le mal vient de l’étranger et des étrangers, il faut développer la coordination, la solidarité, l’action commune des producteurEs pour refuser d’être mis en concurrence.
Une autre agriculture est possible
La préservation de l’environnement implique de cesser d’utiliser les intrants chimiques (engrais, pesticides, herbicides…) et de préserver la biodiversité qui est un bien meilleur rempart contre les maladies et les ravageurs. Mais il ne suffit pas de parler d’agriculture bio car bio ne veut pas dire écologique. Des hectares de serres chauffées de légumes bio ne peuvent en aucun cas être une solution souhaitable, pas plus que des productions ou des élevages qui reposent sur le travail d’ouvrierEs agricoles dont le statut est proche de l’esclavage, ou encore des élevages hors-sol dont les aliments proviennent de l’autre bout du monde.
Une politique agricole et agroalimentaire anticapitaliste et écosocialiste offrirait un autre avenir aux salariéEs de la filière souvent surexploités et précarisés, avec des emplois nombreux, utiles et correctement rémunérés.
Des circuits courts de production, de transformation et de distribution, avec des ateliers de fabrication et des marchés locaux sous le contrôle des producteurEs, permettraient la reconstitution d’un tissu économique de proximité détruit par les industries agroalimentaires et la grande distribution. La reconstitution de ceintures vivrières autour des villes combattrait le bétonnage, rendraient les territoires urbains plus résilients et permettraient aux urbains de se reconnecter avec les rythmes naturels des productions végétales.
Rendre sa vie au sol
Un autre mode de gestion du foncier, coopératif, traiterait la terre comme un bien commun associant droit d’usage et devoir de prendre soin.
Alors qu’il est urgent de changer le rapport entre les villes et les campagnes, le retour à la terre ne serait pas synonyme d’un retour au passé mais l’élaboration de formes de productions autogérées, égalitaires et créatives, une réappropriation des savoir-faire par celles et ceux qui produisent.
L’état des terres arables s’est considérablement dégradé, au point que certaines terres ne sont plus qu’un substrat minéral exigeant un apport massif d’intrants chimiques. Pour créer des systèmes agricoles réellement durables, il est indispensable de rendre sa vie au sol. C’est le but de l’agroécologie, qui recouvre des techniques comme la limitation du travail du sol, les couverts végétaux, la réintroduction des arbres au sein des cultures (agroforesterie).
Il n’y a pas une agroécologie qui viendrait d’en haut, mais des agroécologies qui varient en fonction des territoires, des cultures, des modes de vie. Cela n’exclut absolument pas la recherche, mais une recherche où paysanEs et chercheurEs travaillent ensemble.
Commission nationale écologie du NPA