1. Le 1er décembre 2016, le Roi Vajiralongkorn montait sur le trône en prenant le nom de Roi Rama X de la dynastie Chakri. Aujourd’hui, alors que cela fait huit mois que le Roi Vajiralongkorn a accédé au trône, il apparaît de plus en plus chaque jour que la Thaïlande évolue d’une monarchie constitutionnelle vers une « monarchie absolue ».
La Thaïlande voit en lui un monarque puissant. Tout d’abord ce dernier a exigé des modifications du projet de Constitution approuvé par référendum en août 2016. Ces modifications tendent à intensifier le contrôle de l’Etat sous son règne. Elles donnent au roi le contrôle total sur la nomination d’un régent en cas d’absence, suppriment la nécessité d’un contreseing parlementaire aux ordres du roi et rétablissent les pouvoirs du roi en cas de crise qui lui avaient été retiré dans le projet de constitution de 2016. Ceci intègre la possibilité pour le roi d’opposer son véto à l’exécutif et au législatif et de dissoudre l’assemblée législative.
De plus, il obtient un contrôle plus grand sur la fortune royale et sur les évictions au sein du palais. Il a mis en place une unité militaire autonome sous son contrôle, en dehors de la chaîne de commandement militaire thaïlandaise. Enfin, il peut émettre des ordres alors qu’il est à l’étranger, comme c’est souvent le cas quand il séjourne à Munich en Allemagne.
2. Bien que la Constitution thaïlandaise soit entrée en vigueur le 6 avril 2017, le gouvernement de la junte, conduit par le Général Prayuth Chan-Ocha, continue d’utiliser les pouvoirs autoritaires de l’article 44, ignorant ainsi la règle de droit et la procédure régulière. Cet article a été utilisé par le CNPO pour renforcer rapidement les pouvoirs législatif, administratif et judiciaire. Les opposants ont été soit arrêtés soit ont dû subir un « réajustement de leur comportement ». Les décisions sur la négociation et l’acquisition d’armements, tels que sous-marins, avions de combat et tanks sont prises sans débat public et sans aucune transparence.
En conséquence, la corruption est largement répandue. Le plan stratégique national de 20 ans a été imposé et les voix critiques prédisent qu’il va faire peser le contrôle de l’armée sur les futurs gouvernements afin de promouvoir son agenda pour les 20 années à venir. De manière plus importante, alors que promesse a été faite d’un retour à la démocratie en Thaïlande par des élections générales en 2018, il n’existe aucun plan concret ni aucune date pour cela.
3. Pendant ce temps, les autorités continuent d’arrêter les dirigeants du Front uni pour la Démocratie contre la Dictature. A ce jour, 14 d’entre eux ont été arrêtés. De plus, des leaders étudiants qui ont pris part aux manifestations de protestation contre le coup d’Etat, des avocats défenseurs des droits humains et d’autres ont été inculpés. Les exemples significatifs sont nombreux comme Jatupat Boonpattararaksa (Pai Dao Din), inculpé au titre de l’article 112 concernant les crimes de lèse majesté, Sirikan Charoensiri, une avocate des droits humains, qui été accusée de dissimuler des preuves et de ne pas obtempérer aux ordres de l’autorité dans le cadre d’une « investigation illégale ». Pravit Rojanaphruk, un journaliste qui a été accusé de sédition pour avoir critiqué le gouvernement de la junte sur Twitter et Facebook. N’oublions pas les anciens ministres Watana Muangsook et Pichai Narithapan. Et plus important encore, l’accusation motivée contre Yingluck Shinawatra concernant le programme de « subvention du riz » pour laquelle le verdict sera rendu le 25 août 2017.
Plus récemment, le militant thaïlandais exilé Wuthipong Kachathamakul, connu également sous le nom de Ko Tee, a été enlevé à Vientiane. Des témoins oculaires ont déclaré qu’un groupe armé d’assaillants thaïlandais inconnus l’avaient enlevé le 29 juillet 2017, suscitant de graves inquiétudes pour sa sécurité.
4. Le mouvement de lutte pour la démocratie est encore déprimé au royaume de la peur. Les groupes d’étudiants et de défenseurs des droits humains montrent des signes d’activité. Les médias sociaux continuent à jouer un rôle de critique du gouvernement de la junte, exigeant la liberté, la démocratie et la justice. En outre, les organisations de la communauté internationale telles que la Commission des droits de l’homme des Nations unies, Human Rights Watch, Amnesty International et la Fédération internationale des droits de l’homme sont toujours actives et très efficaces. Cela comprend la communauté diplomatique en Thaïlande.
Il est juste de dire que le conflit en Thaïlande entre le royalisme autoritaire et la démocratie au cours des 10 dernières années se poursuivra. Et ce sera l’un des motifs que l’armée utilisera comme excuse pour continuer à gouverner.
5. Je voudrais demander à la communauté internationale de continuer à surveiller la Thaïlande et d’exercer davantage de pression sur elle pour qu’elle se conforme à la Déclaration universelle des droits de l’homme de l’ONU dont elle est signataire. Je voudrais également lui demander de prêter une attention particulière au cas Yingluck, et à tous les autres cas mentionnés ci-dessus.
Jaran DITAPICHAI
Organisation Démocratique Thaïlandaise en exile