Hôpitaux : « La recherche de la rentabilité se fait aujourd’hui au détriment de la prise en charge des patientEs et des conditions de travail »
Entretien. Le 7 mars dernier, jour de mobilisation dans le secteur de la santé, une employée du service informatique médical de l’hôpital Cochin âgée d’une quarantaine d’années a mis fin à ses jours dans l’enceinte de l’établissement. L’hôpital sous pression... jusqu’au drame ! Nous y revenons avec Apollinaire Bonnereau, syndicaliste SUD à l’hôpital européen Georges-Pompidou (HEGP).
S. Bernard – À l’HEGP, ton hôpital, un an après le suicide d’un médecin, un jeune infirmier s’est à son tour défenestré il y a un mois. Comment expliquer que tant d’agentEs en arrivent à se donner la mort ? Peut-on parler de maltraitance institutionnelle envers les soignantEs ?
Apollinaire Bonnereau – Il est souvent difficile d’expliquer les raisons qui poussent les gens à se donner la mort, mais à l’hôpital j’identifie aujourd’hui deux causes principales. La première concerne les soignantEs : ils sont soumis à des risques qui se rattachent directement à leurs professions. Soigner et accompagner les patientEs les exposent à de fortes pressions émotionnelles qui laissent place parfois à des expériences traumatisantes. La deuxième cause est plus récente, et concerne l’ensemble des personnels, qu’ils soient ouvriers, administratifs ou paramédicaux. Elle est directement liée aux réformes de ces dernières années qui ont transformé l’hôpital en entreprise. La recherche de la rentabilité se fait aujourd’hui au détriment de la prise en charge des patientEs et des conditions de travail.
À Saint-Calais (dans la Sarthe), la CGT de l’hôpital a fait part de son incompréhension et de sa consternation après le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) qui n’ a pas relevé les dysfonctionnements et le harcèlement du personnel. À l’HEGP, Hirsch a défendu la directrice de l’hôpital contre les attaques qu’il juge infondées envers elle.
Comment réagit l’institution hospitalière ? Continue-t-elle à se dégager de ses responsabilités ?
Martin Hirsch défend la directrice de l’établissement mais ne fait rien pour les autres salariéEs. Ils fait même pire en continuant d’appliquer les politiques austéritaires du gouvernement, et nous appuie un peu plus sur la tête chaque jour. La défense de la directrice de l’HEGP par le directeur général de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) ressemble plus à une défense d’intérêts de caste qu’à autre chose.
Concernant notre collègue Emmanuel, la direction ne souhaite pas pour le moment reconnaître le suicide, bien que celui-ci ait eu lieu sur le lieu de travail. Elle attendra pour statuer l’avis de la commission de réforme. De notre côté, nous avons mis en place une expertise CHSCT qui doit faire ressortir les risques professionnels pour étayer la reconnaissance de l’accident de travail.
Critiquée pour son absence de réaction, Marisol Touraine a finalement expliqué en septembre 2016 que « la culture du bien-être doit exister à l’hôpital » et demandé « que l’on travaille à de nouvelles mesures pour les risque psycho-sociaux ». Quelles mesures ont été prises et comment sont-elles ressenties par le personnel ?
Le petit doigt sur la couture du pantalon, nos directeurs ont ressorti les groupes de travail sur les risques psycho-sociaux. Mais depuis des années, ces groupes n’ont fait que noircir du papier. Depuis qu’ils existent, la situation n’a fait que se dégrader...
Si la ministre souhaite vraiment améliorer la situation, qu’elle revienne sur les dernières réformes qui nous font tant de mal : que se soit les pôles qui ont fait exploser les collectifs de travail ; la tarification à l’activité (T2A) qui, dans sa logique productiviste, a cassé l’hôpital public en lui faisant perdre le sens de ses missions ; ou bien encore les groupes hospitaliers de territoire qui n’ont d’autre but que de mettre en concurrence les établissements entre eux et de générer des mutualisations qui vont avoir pour conséquences de réduire l’offre de soin.
Quelles mesures prioritaires faudrait-il prendre pour stopper cette dramatique vague de suicides ?
Réinjecter d’urgence des moyens humains et supprimer les primes d’objectif des directeurs en les intégrants dans leur salaire, car elles les empêchent aujourd’hui d’assumer leurs responsabilités dans la protection des salariéEs.
Propos recueillis par S. Bernard
* Hebdo L’Anticapitaliste - 375 (16/03/2017) :
https://npa2009.org/actualite/sante/hopitaux-la-recherche-de-la-rentabilite-se-fait-aujourdhui-au-detriment-de-la-prise
7 mars : Par dizaines de milliers contre la casse de l’hôpital et des services publics
Plusieurs milliers de manifestantEs à Paris, Toulouse ou Lyon, plusieurs centaines à Brest, Quimper, Valence, Saint-Étienne et bien d’autres villes en région. À Paris, grosse mobilisation de Force ouvrière, un cortège dynamique de Solidaires, et du côté de la CGT, plus traditionnel, un peu âgé et d’un dynamisme modéré. Des cortèges très animés pour les infirmierEs, les étudiantEs en orthophonie.
Cette journée de mobilisation a été lancée mi-décembre par l’intersyndicale CGT-FO-SUD santé et action sociale, dans la foulée de la journée de mobilisation plutôt réussie du 8 novembre dernier. En cause, la poursuite d’une politique d’austérité imposée au secteur public dont, côté santé, le plan de réduction des dépenses de 3,5 milliards d’euros qui aboutira à la suppression de 22 000 emplois et 16 000 lits d’hospitalisation.
C’est contre ces politiques que se sont développées de nombreuses luttes sur lesquelles s’était construit le succès de la mobilisation du 8 novembre dernier, où, dans de nombreuses villes, les personnels avaient fait grève, rejoints souvent par les étudiants infirmiers, et où les manifestations avaient – comme à Toulouse, Tours, Angers, Bordeaux, Marseille... – réuni des centaines de participantEs combatifs.
Des programmes qui inquiètent
Depuis, la campagne présidentielle n’a fait qu’augmenter les interrogations et les inquiétudes des personnels. La virulence des attaques portées notamment par Fillon a placé la question de la protection sociale au cœur de la campagne électorale. Les propositions de Macron visant à l’« étatisation » de la gestion de l’Unedic, et la proposition, même corrigée, de revenu universel d’Hamon vont continuer à susciter débats et inquiétudes. Elles ont comme point commun de refuser de s’attaquer de front au chômage et de prolonger les politiques d’attaques contre les services publics.
C’est dans ce contexte que les autres fédérations et syndicats de la fonction publique CGT, FO, FSU et Solidaires avaient également lancé des appels à la mobilisation et à se joindre aux cortèges, de même qu’un collectif d’une dizaine d’organisations d’infirmiers et des internes. Les fonctionnaires territoriaux, y compris la fédération autonome (FA), dénoncent « les attaques contre le service public local » et la baisse des dotations de l’État. Plusieurs fédérations CGT (équipement, poste et télécoms) ont également appelé, de même que diverses organisations de retraitéEs, d’usagerEs et d’étudiantEs. Et finalement, certains secteurs de la CFDT santé-social ont même appelé à manifester ce mardi.
Sortir du climat nauséabond
Pourtant, si les motifs de colère ne manque pas, le refus des directions syndicales du secteur de la santé à s’appuyer sur les mobilisations du secteur et le sentiment d’une manifestation fourre-tout ont suscité bien des hésitations. Et la volonté des secteurs de la CGT de la fonction publique de marquer un temps fort dans la campagne présidentielle n’a pas non plus complètement convaincu les salariéEs.
Mais au total, avec le rayon de soleil parisien, on sentait chez les manifestantEs l’envie de sortir du climat nauséabond de la campagne présidentielle. De nombreux manifestantEs sont venus saluer Philippe Poutou, nous encourageant à « tenir bon » et souhaitant que nous arrivions au bout de notre recherche des 500 parrainages. Car le message de Philippe est clair : c’est par les mobilisations, les luttes, les grèves, que l’on parviendra vraiment à stopper les politiques de destruction des services publics.
Robert Pelletier
* Hebdo L’Anticapitaliste - 374 (09/03/2017) :
https://npa2009.org/actualite/sante/7-mars-par-dizaines-de-milliers-contre-la-casse-de-lhopital-et-des-services-publics
Service public. À Pompidou, on rejoue les Temps modernes
Les personnels dénoncent la dégradation des conditions de travail dans le grand établissement parisien Georges-Pompidou devenu un « hôpital-usine ». Une marche forcée à la rentabilité du secteur à l’origine de la mobilisation nationale de ce 7 mars 2017.
Malgré des débuts difficiles, l’hôpital européen Georges-Pompidou (HEGP), situé à Paris dans 15e arrondissement, a toujours fait figure d’exception. Il reste le plus grand, le plus moderne, le plus innovant. « Intégrer ce grand hôpital était pour moi une belle promesse. J’ai adhéré sans problème au discours des managers. On me demandait de développer l’activité. De faire attention à l’argent public, un bien précieux. J’étais d’accord. Qui ne le serait pas ? » raconte Bernard [1], infirmier et, depuis trois ans, cadre de santé dans un service « hyper-intensif », « rapide ». Mais le grand bâtiment blanc, qui ne compte plus les prouesses médicales, est rattrapé par le malaise des soignants. Deux suicides en quinze mois. Celui d’un cardiologue, d’abord. Puis celui d’un infirmier, il y a tout juste un mois. « On nous dit que le travail n’est pas en cause, mais lorsqu’on endosse une blouse blanche, que l’on revient sur son lieu de travail un jour de repos pour se jeter du 8e étage, il y a de quoi se poser la question. Le ‘‘bien-pensant’’ est tellement omniprésent que nous n’osons même pas dire cela. Nous avons peur d’en parler », poursuit Bernard.
Pour la hiérarchie, « ?il faut que ça tourne, c’est (votre) job »
Le « bien-pensant » ? De quoi s’agit-il ? Pour ce cadre aujourd’hui profondément désenchanté, il s’agit d’une certaine idée de l’hôpital, érigé en « producteur de soins », en « usine à soins ». Une logique qui le soumet à une double pression : celle du remplissage des lits, dont aucun ne doit rester vide, et celle du sous-effectif chronique. « Trouver du personnel est un défi permanent, épuisant, qui, à un moment, vous submerge. Là où les infirmières devraient être cinq, elles sont trois, mais acceptent tout de même de faire le travail, en pleurant, fatiguées d’autant que chaque poste doit être rentable à 100%. Le service tient grâce aux heures supplémentaires et à leur bonne volonté, se désole Bernard. Nous ne respectons pas les droits des soignants, leurs congés, leurs RTT et nous ne pouvons leur donner aucun espoir, puisqu’on nous refuse tout recrutement. La hiérarchie nous dit : ‘‘Débrouillez-vous, il faut que cela tourne. C’est votre job !’’ La machine financière est tellement forte que l’on ne nous entend plus. »
Pour tenir son objectif d’un taux d’occupation des lits de 99%, l’HEGP a recruté un ingénieur de production, formé à l’Ecole des mines, chargé de l’optimisation de chaque lit, précieuse matière première de la tarification à l’activité (ou T2A), le système de financement de l’hôpital. Une cellule centralisée labellisée d’un anglicisme évocateur, le bed management (gestionnaire des lits), piste les sortants pour leur substituer un patient entrant. Les contacts téléphoniques entre les cadres de santé et ces gestionnaires sont permanents. « Si j’ai dix entrants et seulement cinq sortants, je contacte le bed management. L’un de mes patients peut se retrouver en gynéco parce qu’il n’y a plus de lit disponible dans mon service. C’est l’hôtel, en somme. Et si aucun lit n’est disponible, l’intervention peut être déprogrammée. Cela arrive. » Le cadre de santé témoigne que, dans une même journée, trois patients peuvent occuper un même lit. « Après, on s’étonne d’en perdre certains, que l’on retrouve décédés dans un parking », déplore-t-il, en précisant qu’il revient aux infirmières, en sous-effectif, de prendre en charge l’incessante rotation des malades.
Et alors que la durée moyenne d’hospitalisation n’excède pas trois jours et demi, conséquence de l’explosion de l’ambulatoire, la gestion des lits à flux tendus mobilise tous les métiers, des chirurgiens aux assistantes sociales. Les premiers, à travers la programmation des interventions et la durée d’hospitalisation de leurs patients. Les secondes, pour trouver un service de soins de suite ou un autre établissement qui prendra en charge un opéré de la veille, sortant, mais isolé ou disposant de peu ou pas de ressources.
Six millions d’euros d’excédent budgétaire
Depuis 2004, le budget des hôpitaux repose essentiellement sur leur activité, le nombre de séjours, la nature des actes de soins prodigués et leur niveau de remboursement par la Sécurité sociale en particulier. Contrairement à bien d’autres établissements, l’HEGP affiche une bonne santé financière. Elle a été rendue possible grâce à des séjours hospitaliers de plus en plus courts, à la chirurgie ambulatoire et à l’hyperspécialisation de l’établissement sur des actes de soins rémunérateurs, « mais, surtout, en augmentant les cadences de travail, précise Joran Jamelot, responsable de la CGT de l’hôpital. Les 6 millions d’euros d’excédent budgétaire affichés par l’HEGP correspondent à 200 postes d’aides-soignantes. On rationalise tout. Tel type d’intervention dure tant de temps. Le bloc est ouvert pendant 10 heures, on calcule un ratio et on détermine un nombre d’opérations à réaliser dans la journée. Peu importe si c’est irréaliste. »
Le syndicaliste vient d’accompagner une délégation d’infirmiers perfusionnistes auprès de la direction. Ces professionnels très spécialisés s’occupent des machines qui assurent la circulation sanguine des patients au cours des transplantations cardiaques. Un métier à hauts risques, à hautes responsabilités et peu reconnu. En ce début d’après-midi, ils étaient mobilisés pour obtenir le paiement de toutes leurs heures de travail. Qu’ont-ils à dire de l’hôpital ? S’agit-il d’une entreprise comme une autre ? « Ici, le rendement s’impose. Nous avons 40% de personnel en moins et 30% d’activité en plus. Nos conditions de travail se sont dégradées avec la mise en place de la grande journée. Avant, nous finissions à 21h30 et l’équipe d’astreinte prenait le relais », pour que le bloc continue de fonctionner. Désormais, celui-ci doit fermer à 19h30. « Or, les interventions sont souvent longues et compliquées. Nous débordons pratiquement tous les soirs. Les gens sont systématiquement en heures supplémentaires », explique Pascale. A ses côtés, ses collègues acquiescent.
Des infirmières usées avant 30 ans
« Dès le début, l’HEGP a été pensé comme la maquette de l’hôpital du XXIe siècle, avec des critères de rentabilité des soins. Les groupes homogènes de patients et le codage des activités ont commencé ici, explique Joran Jamelot. L’hyperspécialisation de l’activité est également une marque de fabrique. Il n’y a plus d’hôpital général. Pas de gynécologie, de neurologie. Le service d’orthopédie fait du rachis à la chaîne (colonne vertébrale). Les soignantes répètent les mêmes gestes à longueur de temps. A terme, nous allons fonctionner comme des minicliniques. Les chirurgiens seront tentés de maintenir un malade plus longtemps pour éviter qu’un lit ne soit pris par une urgence. Cette logique et cette concurrence sont délétères pour le service public. » Le syndicaliste évoque les plaintes entendues parfois de la bouche de soignants. Des réactions « inconcevables » face à une dame qui n’en finit pas de guérir et « embolise un lit depuis deux semaines »…
Le 13 février, l’établissement a fêté l’ouverture de sa nouvelle plateforme de chimiothérapie. En fait, la fusion de trois structures d’hospitalisation de jour. La fusion s’est faite avec 28 fauteuils et 10 lits : 38 places. Deux rotations sont prévues chaque jour, soit l’accueil de 76 malades. Mais, après calcul d’un ratio basé sur la durée moyenne des séances, l’hôpital s’est fixé un objectif de 120 patients par jour. « C’est désormais une usine à chimio, se désole Joran Jamelot. Il ne s’agit pas seulement de dispenser une chimio, mais de parler à des gens qui sont malades du cancer. Dans ce contexte, le personnel craque. Il est essoré. » Chez les infirmières, la pyramide des âges ressemble à une flamme de briquet : 40% d’entre elles ont moins de 28 ans ; à 29 ans, elles sont deux fois moins nombreuses.
« On ne s’occupe pas de soigner le patient de A à Z, mais on réalise un maximum d’hospitalisations. On court après l’activité. Or, pour nous, ‘‘prendre en charge, prendre soin’’ reste fondamental. A ce jeu, nous allons finir par nous brûler. La France était classée dans le top 10 des pays où l’on soignait le mieux. C’est fini », se désole, Bernard, le cadre de santé.
Sylvie Ducatteau
L’appel à l’action s’est élargi à d’autres secteurs
Lancé mi-décembre par l’intersyndicale CGT-FO-SUD santé et action sociale, l’appel national à la grève et à manifester ce mardi 7 mars a pris une dimension interprofessionnelle, en s’élargissant aux syndicats FSU de la santé, de l’action sociale et aux organismes sociaux puis aux trois fonctions publiques. À quelques semaines du premier tour de l’élection présidentielle, l’austérité imposée au secteur public est dans le collimateur des manifestants, dont, côté santé, le plan de réduction des dépenses de 3,5 milliards d’euros qui aboutira à la suppression de 22 000 emplois et 16 000 lits d’hospitalisation. Un collectif d’une dizaine d’organisations d’infirmiers et des internes participe à la journée. Les fonctionnaires territoriaux, mobilisés par leurs principales centrales syndicales, y compris la fédération autonome (FA), entendent dénoncer « les attaques contre le service public local » et la baisse des dotations de l’État. Plusieurs fédérations CGT (équipement, poste et télécoms) seront également de la partie. De même que diverses organisations de retraités, d’usagers et d’étudiants. À Paris, le cortège partira de la place Denfert-Rochereau à 13 heures, direction les Invalides. Les manifestants ont aussi rendez-vous à Brest, Chalon-sur-Saône, Nice, Roanne, Rodez, Saint-Étienne, Toulouse et dans la plupart des grandes villes de France.
* L’Humanité du 7 mars 2017 :
http://www.humanite.fr/service-public-pompidou-rejoue-les-temps-modernes-633026
Austérité. « 100000 emplois manquent à l’hôpital public »
Le 7 mars, les fédérations CGT, FO et Solidaires appellent les agents des trois fonctions publiques (Etat, hôpitaux, territoriaux) à participer à une journée d’action pour l’emploi et les salaires. La secrétaire générale de la CGT-Santé, Mireille Stivala, revient sur la crise que traverse l’hôpital public et les revendications des personnels.
Pierre-Henri Lab – Un tract de l’intersyndicale CGT, FO et Solidaires a été édité à destination des patient·e·s dans le cadre de la mobilisation du 7 mars. Quel message leur adressez-vous ?
Mireille Stivala : La population doit être informée sur la situation de l’hôpital et du secteur de l’action sociale et sur les conséquences de la loi de modernisation de notre système de santé et de la mise en œuvre des groupements hospitaliers de territoire (GHT).
Depuis des années, les hôpitaux sont confrontés aux politiques d’austérité. Les personnels prennent beaucoup sur eux pour maintenir la qualité du service. Mais, aujourd’hui, nous constatons un épuisement professionnel important. L’urgence est de permettre aux salarié·e·s de récupérer physiquement et moralement. Les conditions de travail sont à ce point dégradées qu’il devient impossible aux professionnels d’exercer leurs missions en respectant le cadre déontologique de leur métier.
Ils sont devenus des producteurs de soins à qui le temps n’est plus donné d’accompagner humainement les patients : les faire attendre sur un brancard des heures durant, la difficulté à leur trouver un lit… tout cela est contraire à l’étique des personnels hospitaliers. A tout moment peut se produire un incident que, jusqu’à présent, le dévouement des personnels a permis d’éviter. Nous sommes au bout d’un système. L’hôpital ne peut pas fonctionner de cette façon éternellement. Des moyens supplémentaires doivent lui être attribués. Il faut en finir avec la tarification à l’acte. La prise en charge des patients ne se résume pas à un soin technique. La dimension humaine et relationnelle doit être prise en compte. Toutes les études le démontrent, mieux un patient est encadré, plus il est entouré, plus le taux de mortalité est réduit et le risque de maladie nosocomiale [infection contractée dans un établissement de santé] est faible.
Quelles sont vos revendications ?
Priorité doit être donnée à l’emploi. Il faut lutter contre le recours à l’emploi précaire, qui est de plus en plus important. Selon les établissements, 20 à 60 % des salarié·e·s peuvent être concerné·e·s. Cela impacte le bon fonctionnement des services ou des établissements car les salariés précaires, surtout quand les contrats sont au jour le jour comme dans l’intérim, ne sont pas forcément au fait de celui-ci et de leurs besoins. Enfin, il est nécessaire d’embaucher massivement pour améliorer les conditions de travail des agents et rendre les 35 heures effectives. Aujourd’hui, elles n’existent que sur le papier. Les RTT [Réductions du temps de travail] et les heures supplémentaires non prises viennent gonfler sans cesse les comptes épargne-temps.
Combien d’emplois faut-il créer, selon vous ?
Il faut déjà cesser d’en détruire. Il faut remettre en cause la limitation de la progression de l’Objectif national des dépenses d’assurance-maladie (Ondam), qui fut historiquement bas en 2016, à 1,75 %, et en 2017 en légère hausse, mais nettement insuffisant (2,1%). Sa mise en œuvre entraînerait la suppression d’au moins 22’000 postes. Rien que pour maintenir le niveau actuel de prise en charge, il faudrait que l’Ondam progresse au minimum de 4 %. Si on additionne les pertes d’emplois liées aux politiques d’austérité et les postes qu’il aurait fallu créer pour permettre une mise en œuvre correcte des 35 heures, on peut estimer que ce sont 100’000 emplois qui manquent à l’hôpital public.
Après le 7 mars, envisagez-vous de nouvelles mobilisations ?
Après les journées d’action du 25 juin et du 8 novembre 2016, le 7 mars 2017 s’inscrit dans la poursuite de la mobilisation nationale. Des conflits, dont certains sont très longs, ont lieu dans de nombreux établissements. Face à cela, le gouvernement ne nous propose que de participer à des groupes de travail pour établir un constat. L’heure n’est plus au constat. Celui-ci est connu. L’heure est à prendre des mesures. Si elles ne sont pas prises, alors nous poursuivrons la mobilisation.
Entretien avec Mireille Stivala conduit par Pierre-Henri Lab
* L’Huma-Dimanche :
http://www.humanite.fr/austerite-100000-emplois-manquent-lhopital-public-632934
Appel de la Fédération nationale Sud Santé, Sociaux
Le 7 mars 2017 hôpitaux en lutte : hôpitaux en manif !
LE 7 MARS 2017, ON NE SE POSE PAS LA QUESTION
LE 7 MARS 2017 ON MONTE TOUS DANS LE BUS, LE TRAIN, LE TRAM, LE TROM…
LE 7 MARS TOUS LES HÔSTOS SONT EN MANIF À PARIS !
Allons leur dire ! Allons lui dire !
Parce qu’à l’intérieur de nos services personne ne nous entend, va bien falloir que l’on se bouge pour aller « causer du pays » aux technocrates enfermé·e·s dans leur bunker parisien, tout là-haut, tout là-haut, dans les étages du ministère.
Hollande et Mayrisol Touraine ont beau nous dire que tout va bien, qu’il y a eu de l’embauche dans les hôpitaux, sur le terrain nous on trime, nous on sue, nous on souffre, nous on meurt…
Marisol si tu savais… tout le mal que tu nous fais !
• Qui n’a jamais été rappelé·e à domicile, sur son portable, par SMS… pour revenir au turbin, remplacer le ou la collègue qu’a pas pu venir car épuisé-e, KC, HS… ?
• Qui n’a pas eu honte de ce qu’il ou elle est devenu·e, de ce qu’il ou elle fait subir aux patient·e·s, honte d’avoir à faire des choix sur qui aura ou pas son soin ce soir vu que le service est plein de malades, vu que le service est vide de soignant-es.
Patient·e·s + Soignant·e·s = variable d’ajustement…
3,5 milliards d’économies sur 3 ans, 16’000 lits et 22’000 postes en moins, voilà notre vérité, voilà ce qu’il se passe et pourquoi ça se passe mal dans les hôpitaux.
Patient·e·s + Soignant·e·s = les mort·e·s, ça suffit !
• En France, pas un établissement n’aura été épargné par l’Hôstérité imposée par le gouvernement, dont la dernière touche d’arasage est aujourd’hui orchestrée par le rouleau compresseur GHT (Groupements hospitaliers de territoire).
41’000 mort·e·s de plus en 2015, des dizaines et des dizaines de plus en 2016, 2017… Va falloir arrêter le carnage !
• Préparons chars, drakkars, tracts, banderoles…
Décorons nos hostos, invitons-nous dans les réunions des dirlos…
Reprenons nos n° de téléphone aux DRH (Directeur des ressources humaines), reprenons nos droits à repos…
Prenons le pouvoir !
• 7 MARS 2017 FIN DES MARISOLDES ! RDV 13H PARIS/PLACE DENFERT ROCHEREAU – MEGA MANIFESTATION DES HÔSTOS