Plus de vingt municipalités du Kurdistan turc avait été littéralement confisquées, leurs maires démis de leurs fonctions et de nouveaux administrateurs pro-AKP désignés à leur place. Certains de ces maires, ainsi que des députés et dirigeants du HDP ont été arrêtés. Parmi ces derniers figure aussi son co-président Selahattin Demirtaş, principal responsable des résultats du HDP (13,1 %) lors des élections du 7 juin 2015, ce qui empêcha l’AKP de former seul un gouvernement.
Le redémarrage de la guerre, après deux ans et demi de cessez-le-feu, et la criminalisation du HDP comme branche légale du PKK ont permis à l’AKP de remporter haut la main les élections du 1er novembre 2015.
Un véritable bain de sang
Après 16 mois de blocus, couvre-feu, massacres, déplacement forcé de population et destruction de villes, la résistance civile dans le Kurdistan de Turquie semble considérablement affaiblie. Le nombre extrêmement limité de mobilisations, qui furent d’ailleurs toutes rudement réprimées, par rapport à ce à quoi on aurait pu s’attendre après l’emprisonnement des leaders du HDP, en atteste.
La politique « des tranchées » visant à monter des barricades et creuser des tranchées dans des quartiers de villes kurdes pour y déclarer l’autonomie, à l’instar de l’expérience du Kurdistan syrien, mais qui s’était, elle, réalisée après le retrait de l’armée syrienne, s’est soldée par un véritable bain de sang. Ces tentatives d’auto-administration menées par des jeunes milices kurdes et approuvées par le PKK, mais au sujet desquelles la population locale était beaucoup plus réservée en l’état d’un rapport de forces extrêmement inégal, sans possibilité pour les milices de se replier vers les montagnes, ont certes démontré la bravoure d’une jeunesse kurde plébéienne, mais ont aussi constitué une défaite dramatique pour tout le mouvement kurde. « Nous ne nous attendions pas à une si violente réaction de l’État », ont déclaré les dirigeants du PKK, aux commandes depuis plus de 35 ans…
D’Istanbul, Uraz Aydin