Un Italien retrouvé mort supplicié en Egypte
http://www.20min.ch/ro/news/faits_divers/story/Un-Italien-retrouve-mort-supplicie-en-Egypte-13702794
L’étudiant a été découvert dans un fossé avec des traces de contusions.
Le jeune homme avait disparu il y a plus d’une semaine.
Un étudiant italien qui avait disparu au Caire il y a dix jours a été retrouvé mort dans un fossé, à moitié dénudé, avec des traces de sévices sur le corps, Rome exigeant de l’Egypte « toute la vérité ».
Giulio Regeni, 28 ans, doctorant à l’université britannique de Cambridge, faisait des recherches pour une thèse sur les mouvements ouvriers en Egypte, quand il a mystérieusement disparu le 25 janvier au centre de la capitale égyptienne.
Ce jour-là, 5e anniversaire de la révolte populaire de 2011 qui mit fin au régime de Hosni Moubarak, le gouvernement égyptien, qui réprime toute forme d’opposition, avait interdit tout rassemblement et policiers et soldats quadrillaient la ville.
Toute la vérité
Dans un entretien téléphonique avec le président Abdel Fattah al-Sissi, le Premier ministre italien Matteo Renzi a demandé que le corps de Regeni soit rendu à sa famille. Il a par ailleurs souhaité que les investigations permettent de « découvrir les responsables de cet horrible crime et les livrer à la justice ».
Rome a par ailleurs réclamé au Caire « une enquête commune avec la participation d’experts italiens ».
Un étudiant italien retrouvé mort en Egypte
http://www.itele.fr/monde/video/un-etudiant-italien-retrouve-mort-en-egypte-152485
Un étudiant italien disparu il y a dix jours a été retrouvé mort ce jeudi au Caire. Il pourrait avoir été victime de la répression policière.
Giulio Regeni avait disparu au Caire il y a dix jours. Rome a confirmé officiellement la mort de l’étudiant italien ce jeudi, et a convoqué l’ambassadeur égyptien en Italie pour lui faire part de son « trouble », le jeune homme ayant été vraisemblablement torturé avant de mourir. Michele Valensise, secrétaire général du ministère des Affaires étrangères, « a convoqué de manière urgente ce matin l’ambassadeur d’Egypte (...) pour exprimer le trouble du gouvernement italien à la suite de la mort tragique du jeune Giulio Regeni au Caire », a indiqué le ministère dans un communiqué.
5e anniversaire de la révolte populaire
L’italien de 28 ans, doctorant à l’université britannique de Cambridge, faisait des recherches pour une thèse sur les mouvements ouvriers en Egypte, quand il a mystérieusement disparu le 25 janvier au centre de la capitale égyptienne. Selon le récit d’amis et étudiants au Caire sur les réseaux sociaux, Giulio Regeni aurait disparu vers 20h00 alors qu’il se rendait à un rendez-vous du domicile qu’il partageait avec un colocataire au centre du Caire à une station de métro.
Ce jour-là, 5e anniversaire de la révolte populaire de 2011 qui mit fin au régime de Hosni Moubarak, le gouvernement égyptien, qui réprime violemment toute forme d’opposition, avait interdit tout rassemblement, et policiers et soldats quadrillaient la ville.
« Il s’agit d’un meurtre »
Le corps du jeune homme a été retrouvé mercredi dans un fossé en bordure d’une route à moitié dénudé, avec des traces de sévices sur le corps, sur la commune du 6 Octobre, une banlieue du Caire, a annoncé jeudi Hossam Nassar, magistrat du parquet qui a constaté sa mort.
« Il s’agit d’un meurtre », a-t-il assuré, précisant qu’« Il y avait des contusions et des blessures sur le corps et il ne portait que des vêtements sur le haut du corps ». « Il avait des bleus et des blessures sur tout le corps, en particulier sur le visage et dans le dos, et le bas était dénudé », a confirmé Ahmed Nagui, chef du parquet chargé des affaires criminelles au Caire.
Consulté par un correspondant de l’AFP, le rapport du parquet évoque aussi « des brûlures de cigarettes autour des yeux et sur la plante des pieds ».
« Nous voulons la vérité sur ce qui s’est passé », a exigé le ministre italien des Affaires étrangères Paolo Gentiloni sur la télévision italienne RAI.
Régime répressif
Toutes les hypothèses restent ouvertes sur la mort de l’étudiant italien, dont celle du crime crapuleux. Mais les réseaux sociaux et les milieux diplomatiques au Caire évoquent avec insistance celle d’une possible bavure policière, dans un pays où la police et les services de renseignements sont accusés régulièrement par les organisations de défense des droits de l’Homme d’arrêter et de détenir sans procès, voire de violenter ou torturer.
Plusieurs cas de morts violentes d’Égyptiens dans les commissariats ont donné lieu récemment à des procès contre des policiers. La police a été priée récemment par le président Abdel Fattah al-Sissi en personne, de faire preuve de retenue.
Depuis qu’il a destitué et fait arrêter le 3 juillet 2013 le président islamiste élu Mohamed Morsi, M. Sissi, alors chef de l’armée, dirige un pouvoir qui réprime violemment toute opposition, islamiste, laïque et libérale. Il a été élu président à son tour en mai 2014, en l’absence d’opposition crédible mais grâce à une forte popularité.
Plus de 1.400 manifestants islamistes ont été tués en 2013 et des centaines de sympathisants de M. Morsi, dont l’ex-président lui-même, ont été condamnés à mort dans des procès expéditifs vivement dénoncés par l’ONU.
L’Italie attend des réponses
« Rome s’attend de la part des autorités égyptiennes à la plus grande collaboration à tous les niveaux, à la lumière de la gravité extrême de ce qui est arrivé à notre citoyen », a insisté secrétaire général du ministère italien des Affaires étrangères Michele Valensise. « L’Italie (...) renouvelle la requête aux autorités égyptiennes de lancer immédiatement une enquête commune avec la participation d’experts italiens », a ajouté Rome.
En fin d’après-midi jeudi, l’ambassadeur d’Italie s’est rendu à la morgue centrale du Caire où le corps du jeune supplicié était autopsié.
Le ministre italien des Affaires étrangères Paolo Gentiloni a demandé jeudi au gouvernement égyptien que « toute la vérité » soit établie, avec l’aide d’enquêteurs italiens, sur les circonstances de la mort au Caire de l’étudiant Giulio Regini.
« Nous voulons que soit révélé de manière complète et approfondie ce qui est arrivé » au jeune homme, a déclaré le chef de la diplomatie italienne, qui s’exprimait sur la chaîne RaiNews24 depuis Londres.
Jean-Pierre Filiu : Giulio Regeni, torturé à mort au Caire à 28 ans
http://filiu.blog.lemonde.fr/2016/02/09/giulio-regeni-torture-a-mort-au-caire-a-28-ans/
Giulio Regeni a fêté avec ses amis son vingt-huitième anniversaire le 15 janvier dernier dans cette ville du Caire qu’il aimait tant. Cet étudiant italien était en effet un passionné du monde et de la langue arabes. Il préparait une thèse d’économie à l’université de Cambridge sur le mouvement ouvrier en Egypte, et plus précisément sur les syndicats indépendants encouragés par la chute de Moubarak. La veille de ses 28 ans, Regeni avait publié, sous le pseudonyme d’Antonio Drius, un article sur le site italien Nena News consacré à l’agitation sociale de plus en plus préoccupante en Egypte.
Le 25 janvier 2016, le jeune chercheur a quitté son domicile en début de soirée, dans le quartier de Doqqi, sur la rive gauche du Nil. Il était censé prendre le métro et retrouver un ami au marché de Bab al-Louk, sur l’autre rive du fleuve. Il n’y a que quatre stations de métro entre le domicile de Regeni et le lieu de son rendez-vous. Après El-Behoos, viennent Doqqi, Gezira, Sadat et Mohammed Naguib. La station Sadat, correspondant à la place Tahrir, épicentre de la révolution égyptienne de 2011, était fermée ce soir-là. Les autorités voulaient en effet éviter la célébration du lancement, cinq ans plus tôt, du soulèvement anti-Moubarak. C’est pourquoi le centre ville était quadrillé et toute manifestation interdite, sur fond d’une vague d’arrestations préventives et de « disparitions » sans précédent. Nul ne sait si Regeni a pu atteindre El-Behoos, mais personne en tout cas ne l’a revu vivant après le départ de son domicile.
Le 3 février, la dépouille de l’étudiant italien a été retrouvée dans le fossé d’une banlieue du Caire, sur une route conduisant à Alexandrie. Son corps à moitié dénudé comportait des traces de sévices notamment, selon le rapport consulté par l’AFP, « des brûlures de cigarettes autour des yeux et sous la plante des pieds ». Vous avez bien lu : « autour des yeux et sous la plante des pieds ». Le corps, identifié par les parents, a été rapatrié en Italie. Le Premier ministre Matteo Renzi a appelé le président Abdelfattah Sissi pour exiger que « les responsables de cet horrible crime soient livrés à la justice ».
Un rassemblement silencieux de quelques dizaines d’intrépides s’est déroulé, le 6 février, devant l’ambassade d’Italie au Caire. Une pancarte disait : « Il ne vous suffisait pas de nous tuer, il fallait que vous vous en preniez à un étranger ». Les amis de Regeni, encore traumatisés, pointent en effet un doigt accusateur en direction de la Sécurité nationale, la police politique à la sinistre réputation. Le soulèvement de février 2011 s’était accompagné de l’assaut populaire de bureaux de la Sécurité d’Etat, le bras armé du ministère de l’Intérieur. Mis en cause pour les crimes de la dictature Moubarak, ce service n’a en fait que changé de dénomination et l’ex-Sécurité d’Etat, devenue « nationale », a poursuivi ses exactions en toute impunité, malgré les rapports accablants des défenseurs des droits de l’homme.
Sissi, qui a abandonné son titre de maréchal lors de son accession en juin 2014 à la présidence, reste à l’évidence plus à l’aise avec les militaires qu’avec les policiers. Mais c’est bel et bien lui qui a nommé en mars 2015 ministre de l’Intérieur Magdy Abdel Ghaffar, à la carrière de trente ans au sein de la Sécurité d’Etat. Abdel Ghaffar a à son tour promu Mahmoud Shaarawi, patron de l’anti-terrorisme, à la tête de la Sécurité nationale. A la veille de la disparition de Regeni, le ministre de l’Intérieur affirmait « n’avoir pas peur » de la commémoration du cinquième anniversaire du soulèvement anti-Moubarak. Rappelons que la commémoration précédente, en janvier 2015, avait été marquée par la mort d’au moins quinze personnes, dont la militante progressiste Shaima Sabbagh, abattue par la police d’un tir dans le dos, alors qu’elle voulait déposer une gerbe de fleurs en hommage aux « martyrs de la révolution » de 2011.
J’avais déjà dédié « Les Arabes, leur destin et le nôtre » à Shaima Sabbagh et à Mohammed Bouazizi, dont l’immolation en décembre 2010 a déclenché le soulèvement tunisien contre la dictature de Ben Ali. Et ma conférence du 7 février à l’Institut français du Caire, consacrée à « Une histoire laïque du monde arabe », s’est ouverte par une minute de silence à la mémoire de Giulio Regeni. J’ai pu mesurer à cette occasion l’intense émotion que ce crime révoltant suscite dans la capitale égyptienne, bien au-delà des milieux traditionnellement critiques ou opposants. La thèse d’un meurtre crapuleux n’est en effet étayée à ce stade par aucun élément convaincant. Certains milieux pro-gouvernementaux ont même essayé en vain de promouvoir une version « complotiste », selon laquelle des jihadistes auraient tué Regeni pour compromettre les investissements européens en Egypte.
Deux professeures de Cambridge ont lancé une pétition internationale d’universitaires pour exiger que toute la vérité soit faite sur la mort tragique de Giulio Regeni. Cette pétition prendra la forme d’une lettre ouverte au président Sissi, publiée dans le Guardian et le Manifesto. Une autre pétition plus large, adressée à l’UE, à l’ONU, aux autorités égyptiennes et au gouvernement italien, a été lancée en ligne sur Change. L’affaire fait déjà grand bruit en Italie, mais elle ne peut naturellement pas être considérée comme ne concernant que ce pays. Comme l’écrit un un ami britannique du défunt, il s’agit aussi d’une « attaque directe contre la liberté académique, pilier du système d’éducation supérieur ».
Justice pour Giulio.