Déchéance : « une décision détestable »
CFDT
La déchéance de nationalité est une « décision détestable qui ne résout rien », a réagi dans un communiqué le secrétaire national de la CFDT, Jean-Louis Malys, au lendemain du choix de François Hollande d’inscrire cette mesure dans la Constitution. « La mesure de déchéance de nationalité aux binationaux de naissance est totalement inefficace et sa valeur symbolique est détestable. Elle constitue une remise en cause inacceptable du droit du sol constitutif de la citoyenneté française », écrit Jean-Louis Malys.
« En distinguant les personnes qui ont uniquement la nationalité française à leur naissance de celles qui en ont une ou plusieurs autres, le gouvernement validerait le fait que certains sont moins français que d’autres au détriment d’une nécessaire cohésion nationale dont le pays a pourtant besoin », poursuit le leader de la CFDT.
Pour le syndicat, « les mesures sécuritaires nécessaires ne peuvent constituer la seule réponse à la lutte contre le terrorisme et le fondamentalisme ». Jean-Louis Malys estime qu« au-delà de l’agitation détestable qu’elle génère, cette polémique ne répond pas à l’enjeu premier qui est la prévention de l’endoctrinement des jeunes qui se radicalisent et l’action pour la cohésion sociale, la lutte contre les discriminations et pour le vivre ensemble partout sur les territoires de la République ».
Loi sur l’état d’urgence : Valls et Hollande à droite toute !
NAP
Le gouvernement Valls Hollande vient d’adopter en conseil des ministres un projet de loi dit de « protection de la nation française » qui vise à constitutionnaliser l’état d’urgence mis en pratique depuis les attentats du 13 novembre.
Ce gouvernement trouve son inspiration à droite et à l’extrême droite !
Il nous annonce la légalisation de l’état d’exception avec des pratiques telles l’assignation à résidence sur simple « prédiction d’un comportement de nature à troubler l’ordre public » comme il l’a fait contre des militants anti COP21, la multiplication des gardes à vue ou des perquisitions administratives sans rapport avec le terrorisme.
Plus encore, en intégrant dans la loi la possibilité de déchéance de la nationalité française, il donne des gages aux plus réactionnaires qui veulent depuis longtemps remettre en cause le droit du sol, garantie de l’égalité de tous les Français devant la loi.
Ce projet de loi est l’institutionnalisation du racisme d’état, l’institutionnalisation de la criminalisation du mouvement social.
Nous n’avons qu’une réponse : le combattre.
NAP, Montreuil, le 23 décembre 2015
F. Hollande et M. Valls persistent et signent
Ensemble !
L’espoir donné par les déclarations de Christiane Taubira n’aura pas duré.
La déchéance de nationalité sera bien présentée dans le projet de réforme constitutionnelle qui sera proposée au vote du parlement début 2016. Ajoutée à la possible introduction d’une peine de sûreté après une condamnation judiciaire et à la constitutionnalisation de l’état d’urgence, François Hollande et son Premier ministre Manuel Valls puisent directement dans l’arsenal répressif de Le Pen et Sarkozy.
Bien loin d’avoir une quelconque utilité dans la lutte antiterroriste, ces mesures sont des armes aux mains des gouvernants pour faire taire toute contestation sociale.
Les 3000 perquisitions effectuées depuis la mi-novembre n’ont débouché que sur deux instructions en rapport avec le terrorisme. Par contre, les assignations à résidence et l’interdiction des manifestations ont visé directement ceux et celles qui voulaient se mobiliser pour l’urgence climatique au moment de la Cop 21, le soutien aux réfugiéEs. Et on se rappelle des 317 arrestations arbitraires avec mise en garde à vue le 29 novembre place de la République.
Cette politique est indigne d’un candidat qui se prétend de gauche et a porté un temps les espoirs d’un changement pour les couches populaires. Elle ne peut que renforcer les discriminations et suspicions, déjà existantes, à l’égard de l’autre, des jeunes des quartiers populaires. Elle donne en outre un blanc seing aux forces de l’ordre pour s’en prendre au mouvement social.
Pour « Ensemble ! », il faut organiser la riposte la plus large possible contre l’arbitraire et pour la défense des libertés démocratique, le droit de manifester contre l’instauration d’un état d’urgence ou d’exception permanent.
Le 23 décembre 2015.
La nausée
Jean-Luc Mélenchon
Ils nous auront tout fait ! En maintenant la proposition de déchoir de la nationalité française les binationaux né Français, l’équipe Hollande-Valls a consommé sa propre déchéance morale. Car en reprenant cette idée proposée d’abord par Jean-Marie Le Pen puis Nicolas Sarkozy, il s’agit surtout de faire un nouveau coup de communication sur le dos des principes républicains les plus constants. Il ne peut pas y avoir deux sortes de Français au prétexte de quelques criminels. Il n’y a en aura jamais qu’une. Il s’agit de flatter l’opinion la plus bornée.
Il est pourtant facile de comprendre qu’un binational criminel terroriste ne doit pas être expulsé ou réclamable par un pays tiers quand il est pris et condamné pour terrorisme en France. Il doit être au contraire gardé et surveillé dans nos prisons. Penser que cette mesure puisse dissuader quelqu’un prêt à se faire sauter lui-même est ridicule.
Je pense avec émotion à la tristesse et à l’angoisse de tous ceux que cette mesure montre du doigt comme des suspects potentiels. Je pense à la consternation des socialistes à la base qui savent que cela est proposé en leur nom. Je pense avec amertume à ce que ces gens font de notre pays et au débordement et surenchères que cette initiative va permettre dans l’avenir. Je compte sur les parlementaires de tous bords, de droite comme de gauche, pour refuser leur voix à cet attentat contre l’identité républicaine de notre patrie.
23 décembre 2015
Extension de la déchéance de nationalité et révision constitutionnelle : où donc est le danger ?
PCF
L’extension de la déchéance de nationalité pour les binationaux nés en France, annoncée par François Hollande devant le Parlement réuni en Congrès le 16 novembre, trois jours après les attentats de Paris et de Saint-Denis, a provoqué au cours des dernières semaines de très nombreuses réactions. La raison et les valeurs républicaines semblaient l’avoir emporté. Il n’en est rien. Jamais une telle mesure n’avait été assumée par les plus hautes autorités de l’Etat. Présentée par Manuel Valls comme une décision à « caractère hautement symbolique », elle serait en effet une honte et un reniement pour notre République. Aujourd’hui, pour ce pouvoir, l’extension de la déchéance de nationalité est proposée « au nom de l’égalité » alors qu’elle aurait pour conséquence de créer deux catégories de Français.
D’aucune efficacité contre le terrorisme, la déchéance de nationalité est apparue au cours des dernières semaines comme une nouvelle légitimation de l’extrême-droite puisque cette mesure est directement tirée du programme du FN.
Où est donc le danger ? Dans un climat de peur, de haine et de stigmatisation, avec l’utilisation qui peut en être fait, plaçant le FN au cœur du paysage politique et idéologique. En quoi la déchéance de nationalité désarmera des terroristes dont l’objectif est de semer la mort en y perdant la vie ? En quoi, pour reprendre l’expression du Premier ministre, aura-t-elle la moindre « efficacité pour protéger nos concitoyens » ?
Concernant l’état d’urgence, la réforme constitutionnelle présentée fait courir le risque d’un régime d’exception permanent et d’une aggravation des atteintes aux libertés constatées depuis quelques semaines ciblant des personnes sans aucun lien à des risque d’attentats. Elle est une mauvaise réponse aux terroristes alors qu’il est parfaitement possible, en y consacrant les moyens humains nécessaires pour la police et la justice, d’assurer la sécurité dans le respect de notre Etat de droit.
Où donc est le danger ? Quand notre République doute de ses valeurs, de la Liberté, de l’Egalité et de la Fraternité, elle fait le jeu des terroristes car il s’agit là de leur objectif premier.
Nous ne voulons pas de cette société. Les prochaines semaines, le débat dans le pays et au Parlement devra défendre l’essentiel, ce qui était attaqué par Daesh : la République, notre démocratie et nos libertés.
Olivier Dartigolles, porte parole du PCF,
Paris, le 24 décembre 2015.
Déchéance de nationalité : le pas de plus, le pas de trop ?
Clémentine Autain
En promouvant finalement l’inscription de la déchéance de nationalité dans la Constitution, l’Élysée et Matignon poursuivent une grave dérive vers leur droite, et cautionnent les idées du Front national. Un point de rupture est atteint, voire dépassé.
Le coup est sévère. Au conseil des ministres du mercredi 23 décembre, François Hollande et Manuel Valls ont décidé d’introduire dans la Constitution une mesure hautement symbolique : la déchéance de nationalité pour les binationaux nés Français, reconnus notamment coupables d’actes terroristes.
La dernière fois que la France a recouru à la déchéance de nationalité, c’était sous Vichy. Plusieurs rumeurs dans la presse laissaient penser que le gouvernement renoncerait à mettre en place cette disposition : les vives critiques émises à gauche allaient avoir raison de l’annonce de François Hollande. Que nenni. Pour le président et le premier ministre, il s’agissait de tenir bon pour affirmer haut et fort le tournant sécuritaire et l’union nationale post-attentat.
Le message envoyé à gauche est sans équivoque : la main n’est pas tendue, elle est fermement à droite toute. La ministre Christiane Taubira, qui avait dit son désaccord avec cette mesure, avale pathétiquement son chapeau : « La parole dernière est celle du président de la République », a-t-elle laconiquement déclaré avant de partir en vacances.
Un signal supplémentaire de droitisation
Le gouvernement aura non seulement abandonné le droit de vote des étrangers et le récépissé sur le contrôle au faciès, qui figuraient dans le programme du candidat Hollande, mais aura également repris le fil idéologique des propositions de la droite extrême. Florian Philippot et Marine Le Pen se sont empressés de saluer leur victoire :
Du point de vue politique opposé, le député socialiste Pascal Cherki confirme à sa manière le sens de cette mesure gouvernementale : « Je ne vois pas comment combattre l’extrême droite en reprenant son programme ».
Comme la déchéance de nationalité n’est d’aucune efficacité pour lutter contre le terrorisme, elle a pour unique objectif d’envoyer un signal supplémentaire de droitisation. François Hollande est prêt pour cela à fouler au pied des fondamentaux de la République française, en touchant au droit du sol. Il est prêt à valider l’idée chère au Front national qu’il y aurait deux catégories de Français. Il est prêt à reprendre la logique de la double peine que le PS contestait farouchement quand Nicolas Sarkozy était au pouvoir.
La déchéance de la nationalité est un pas de plus. De trop ? Pour les députés et militants de gauche qui appartiennent à la majorité gouvernementale, la question agite assurément les consciences. De là à façonner des actes de recomposition, de refondation, il y a un pas. Si Valls et Hollande gouvernent à droite, une alternative de gauche reste à construire. Vite.
23 décembre 2015