Communiqué LDH
Paris, 16 novembre 2015
Projets du président de la République : l’état d’urgence en permanence ?
On ne peut qu’être inquiet des projets du président de la République. La logique de guerre qu’il a mise en avant conduit à modifier en profondeur plusieurs aspects de l’Etat de droit : qu’il s’agisse de la Constitution, de la procédure pénale ou des règles de la nationalité, ou d’autres encore.
Ces mesures, loin d’être limitées dans le temps, vont s’inscrire dans la durée comme l’actuel état d’urgence qui va être prorogé pour trois mois, soit au moins jusqu’au mois de février 2016, sans qu’on en comprenne la raison.
Le peu de précisions apportées par le président de la République quant au contenu exact des réformes envisagées et la rapidité avec laquelle le Parlement est sommé de les entériner atteste que le pouvoir exécutif entend imposer sa vision d’une démocratie où ce dernier l’emporte sur les autres pouvoirs et sur les libertés individuelles.
Cette démarche est d’autant plus inquiétante que le président de la République a observé un silence total sur les causes profondes de la situation actuelle, les échecs observés et ne présente qu’une seule alternative : un pouvoir fort ou le terrorisme, sans se préoccuper d’assurer la cohésion sociale et l’égalité des droits.
La LDH exprime son inquiétude face à des projets délibérés sur injonction, dans la précipitation et usant de l’émotion provoquée par les attentats commis.
D’ores et déjà, elle désapprouve la prorogation de l’état d’urgence et souhaite que les pouvoirs publics ne se contentent pas de faire référence au respect de l’Etat de droit mais qu’ils le respectent effectivement.
Ligue des Droits de l’Homme (LDH)
L’Etat d’urgence permanent ?
NPA
Lundi 16 novembre 2015, mise à jour Lundi 16 novembre 2015, 20:12
Hollande vient de terminer son discours devant le congrès réunit en urgence après les attentats de vendredi soir à Paris et Saint-Denis. Pendant 45 minutes, il a développé une politique du tout sécuritaire, de restrictions des droits démocratiques et de va-t-en-guerre. Il propose ainsi de prolonger et d’amplifier ce qui n’a pas marché. En proposant par exemple une coalition avec Obama et Poutine pour amplifier les bombardements en Syrie.
Dans le même temps au niveau national, il propose de prolonger et d’amplifier, l’état d’urgence durant trois mois puis de le normaliser et de le banaliser en proposant une révision de la Constitution. Reprenant à son compte, dans l’esprit de l’union nationale, les propositions de la droite et de l’extrême droite, il propose la déchéance de nationalité, des expulsions plus rapides et plus expéditives et enfin sous couvert de légitime défense, il banalise le libre usage des armes par la police. Il amplifie le tout sécuritaire avec le recrutement de 5000 policiers et gendarmes en deux ans, et propose la mise en place d’une garde nationale de réservistes.
Aucune de ces mesures ne seront efficaces pour lutter contre l’embrigadement de jeunes par Daech parce qu’elles font l’impasse sur la responsabilité de l’impérialisme notamment français, parce qu’elles tournent le dos à toute politique sociale notamment dans les quartiers populaires.
A l’inverse, la lutte contre le racisme et les discriminations, la solidarité, l’égalité sociale doivent se manifester massivement ; L’Etat d’urgence vise aussi à empêcher cela et il doit être levé.
NPA, Montreuil, le 16 novembre 2015
Déclaration de Hollande : La reconnaissance d’erreurs et la constitutionnalisation d’un Patriot Act
Prenant un ton martial, le président Hollande a assumé qu’il avait bel et bien engagé notre pays en guerre sans jamais avoir fait voter le Parlement.
Mais il a du aussi dresser la liste de ses échecs et de celles de son prédécesseur :
– Echec géostratégique : il reconnaît que les discussions doivent reprendre avec la Russie, sous l’égide de l’ONU, dans la recherche d’une alliance et que Bachar El Assad ne saurait constituer la cible n°1. La déstructuration par la force des Etats de la région n’a amené aucun progrès démocratique, ni la paix mais a entraîné le développement du terrorisme. Il faut en finir réellement avec cette politique.
– Echec de l’austérité : bien tard, il constate « le pacte de sécurité supérieur au pacte de stabilité ». Voilà que nos gouvernants se rendent compte que baisser les dépenses publiques c’est moins de policiers, gendarmes, de magistrats, de douaniers, de services de renseignements, de personnels de santé, d’enseignants si indispensables pour réaffirmer les valeurs de la république. C’est globalement moins de cet Etat qui s’est révélé si indispensable ce week-end. Il faut maintenant aller plus loin, passer aux actes et reconnaître également que le pacte social doit être supérieur à l’austérité.
Il assume malheureusement de glisser sur la pente autoritaire et sécuritaire en exploitant tous les rouages de la 5e République. Il reprend une proposition aussi inefficace qu’antirépublicaine : la déchéance de la nationalité, pour les bi-nationaux nés français. Il renvoie ainsi à l’idée nauséabonde qu’il y deux sortes de citoyens. Une telle mesure n’empêchera jamais les actes de terrorisme. Ne vaut-il pas mieux que des candidats au Djihad soient surveillés en France plutôt qu’ils soient renvoyés dans des territoires où ils pourront perpétrer des crimes en toute impunité ? Quand Hollande entend instaurer plusieurs catégories de français, remettant en cause le code de la nationalité, nous réaffirmons au contraire l’indivisibilité du peuple !
Plus globalement Hollande constitutionnalise un Patriot Act, alors même que dix années après, les américains ont reconnu son inefficacité et que seuls cinq décrets sur douze de la loi renseignement ont été publiés. Cette volonté d’inscrire l’état d’urgence dans la constitution instaure un état d’urgence permanent contraire aux libertés fondamentales.
Avec ces annonces de François Hollande devant le congrès, la dérive sécuritaire de la 5e République a franchi un nouveau cap. Pour toutes ces raisons, le PG appelle les parlementaires à refuser la prolongation et la constitutionnalisation de l’Etat d’urgence, qui marquerait un recul de l’Etat de droit dans permettre une lutte plus efficace contre la menace terroriste.
Danielle Simonnet et Eric Coquerel, coordinateurs du Parti de Gauche, lundi 16 Novembre 2015