TransCanada veut réaliser des forages en mai à Cacouna
Ces travaux se dérouleraient alors que les bélugas sont très présents dans le secteur.
TransCanada ne devrait pas se limiter aux levés sismiques en milieu marin prévus dans le secteur de Cacouna. La pétrolière souhaiterait également mener des travaux qui impliqueraient des forages, a appris Le Devoir. Et ceux-ci se déroulaient dans les prochaines semaines, alors que les bélugas sont très présents dans ce secteur essentiel de leur habitat.
Selon ce qu’a expliqué une source bien au fait du dossier, TransCanada pourrait mener des travaux géotechniques afin de préciser la composition du sol situé sous l’eau dans la zone du port de Cacouna. L’objectif est de déterminer où serait construit le port pétrolier prévu pour exporter du pétrole des sables bitumineux transporté dans le Bas-Saint-Laurent par le futur pipeline Énergie Est.
TransCanada souhaiterait mener ces prochains travaux dès le mois de mai. À ce moment, les bélugas seront très présents dans le secteur de Cacouna. Les femelles qui fréquentent cet habitat commencent par ailleurs à y mettre bas vers la mi-juin. Cette période est donc particulièrement critique pour ces mammifères marins menacés de disparition.
Contacté par Le Devoir, un porte-parole de TransCanada n’a pas confirmé si l’entreprise albertaine comptait effectivement mener de tels travaux de forages.
Stopper les travaux ?
Dans une lettre transmise au Devoir, des scientifiques demandent par ailleurs à TransCanada et à Pêches et Océans Canada de stopper dès maintenant les travaux menés dans le secteur. « Nous estimons que les risques associés à ces activités sont réels et majeurs, et qu’ils ne peuvent être ramenés à des niveaux acceptables dans la perspective où ces activités sont évaluées à la pièce, sans tenir compte des impacts cumulatifs sur la population des bélugas », écrivent les chercheurs Pierre Béland, Stéphane Lair et Robert Michaud. Tous trois étudient les bélugas du Saint-Laurent depuis plus de 30 ans.
« Il nous apparaît irresponsable et peut-être illégal de soumettre ainsi une population protégée par la Loi sur les espèces en péril à un tel niveau de risque, sans que le projet ait été préalablement évalué dans son ensemble », ajoutent-ils.
« Le béluga du Saint-Laurent est une espèce menacée, protégée par la Loi sur les espèces en péril, la population est en déclin et des démarches sont en cours pour élever son statut à une catégorie de plus haut risque de disparition, font également valoir les scientifiques. De plus, le site visé par le projet de port pétrolier à Cacouna est au cœur de son habitat essentiel. »
Travaux retardés
Selon les informations disponibles jeudi, il semble que les levés sismiques prévus par TransCanada n’ont toujours pas débuté, en raison des conditions météorologiques dans le secteur. L’entreprise s’est engagée à ne pas les mener au-delà du 30 avril, même s’ils ne sont pas terminés.
Un « avis scientifique » produit pour Pêches et Océans recommande justement de ne pas mener de travaux au-delà du 30 avril. Le document précise qu’une extension « pourrait nuire au rétablissement du béluga en le privant d’accès à une partie de son aire d’alimentation printanière durant une période qui semble cruciale pour la constitution des réserves énergétiques et la complétion du cycle annuel du béluga ».
Ces travaux préparatoires doivent permettre à la pétrolière de préciser sa demande d’approbation de projet à l’Office national de l’énergie (ONE). Cet organisme fédéral est chargé d’évaluer tout le projet de pipeline Énergie Est, qui permettra de transporter dès 2018 plus d’un million de barils de pétrole chaque jour vers le Nouveau-Brunswick, en passant par le Québec. C’est dans ce cadre que TransCanada entend construire un port à Cacouna afin de charger des navires de pétrole en vue de l’exporter. Ces pétroliers pourraient transporter jusqu’à un million de barils de pétrole. Avec ce projet inédit dans l’histoire du Québec, la province deviendra un joueur clé dans la mise en marché des sables bitumineux.
Les premières étapes en vue de la construction du port débutent un peu plus d’un mois après que TransCanada eut transmis la description de son projet à l’ONE. Le nouveau gouvernement du Québec n’a pas encore pris position dans ce dossier. Il n’a pas non plus annoncé s’il tiendra une évaluation environnementale du projet ni la forme que pourrait prendre celle-ci. Le premier ministre Philippe Couillard a toutefois dit qu’il était favorable au projet. Selon TransCanada, la décision finale revient au gouvernement canadien.
En plus du nouveau port, la pétrolière envisage de construire 12 réservoirs pour stocker le pétrole qui arriverait par pipeline à Cacouna. Ce projet nécessitera la construction de plusieurs centaines de kilomètres de pipeline en sol québécois. Ce tuyau d’un mètre de diamètre passera sur le lit du Saint-Laurent, un peu en amont de Québec.
Alexandre Shields|
* 25 avril 2014 : http://www.ledevoir.com/environnement/actualites-sur-l-environnement/406443/transcanada-souhaiterait-realiser-des-forages-en-mai-a-cacouna
Manifestation des opposants au projet de port pétrolier de Cacouna
Les opposants à la construction d’un port pétrolier à Cacouna par la compagnie TransCanada se sont fait entendre, dimanche en journée, pour dénoncer l’impact de certains travaux sur la population de bélugas du fleuve Saint-Laurent.
Dans le cadre du projet de pipeline Énergie Est, TransCanada mène des travaux préparatoires en milieu marin, à un endroit où se trouvent des bélugas. L’entreprise souhaite par ces opérations préciser sa demande d’approbation de projet à l’Office national de l’énergie.
Pour mener ses sondages géophysiques, l’entreprise projette dans le fleuve de multiples secousses, similaires à des coups de canon et atteignant les 230 décibels, dans un secteur déterminé.
Les groupes écologistes soutiennent que ces relevés sismiques peuvent causer la surdité chez les bélugas, une thèse balayée du revers de la main par TransCanada.
Le militant écologiste Roméo Bouchard a participé à la manifestation, afin de « réveiller » les élus qui ont fait leur le message de la pétrolière, selon lui.
« Notre élite régionale a acheté le discours des politiciens et eux ont repris le discours de TransCanada. C’est du copié-collé. Tout le monde se fait avoir par de la propagande éhontée », a-t-il dénoncé, en entrevue avec La Presse canadienne, quelques minutes après la manifestation.
La mise en place du port pétrolier aura un impact environnemental certain, selon lui, et ses conséquences sont sous-estimées dans le discours de l’entreprise. C’est ce qui explique que des centaines de citoyens ont participé à la manifestation, a soutenu M. Bouchard.
Le projet n’offrira par ailleurs, à son avis, que des retombées très minimes et peu d’emplois durables.
« Une fois que tout aura été construit, les emplois, ce n’est pas si considérable. L’entreprise ne parle jamais des déchets qu’il va y avoir. Pourtant, c’est une douzaine de grandes citernes qui seront construites et deux pétroliers par semaine visiteront les nouvelles installations. Ce n’est pas un parc d’amusement ! », a soutenu M. Bouchard.
Roméo Bouchard interpelle directement le nouveau gouvernement libéral de Philippe Couillard. « Il a le droit de dire non. Ils doivent écouter tous les organismes qui font entendre leur voix dans ce dossier. C’est plus que de protéger quelques bélugas, c’est pour protéger le fleuve et éviter l’arrivée d’un équipement dont on n’a pas besoin », affirme le citoyen de Saint-Germain-de-Kamouraska.
Un référendum sur la question ?
Le président de la Commission régionale du port de Gros-Cacouna et conseiller municipal de la municipalité, Gilles D’Amours, s’est fait critique à l’endroit des manifestants.
« Ce sont des gens de Québec et de Montréal qui sont venus. Je n’ai pas vu grand monde de notre coin. On aime bien le tourisme, mais on va prendre les décisions qui nous concernent par nous-mêmes », a-t-il indiqué, en fin de journée.
L’élu révèle que les autorités municipales sont maintenant prêtes à considérer une consultation populaire sur le projet.
« On est une municipalité de 2005 citoyens et il y aura un comité du oui, un comité du non, et si le conseil municipal le décide, il y aura une consultation populaire et les gens de la place auront leur mot à dire », mentionne Gilles D’Amours, qui souligne que cette option est au cœur des discussions au sein de l’équipe d’élus.
En 2005, les citoyens de Cacouna avaient été invités à se prononcer sur le défunt projet de port méthanier, évalué à un milliard de dollars, qu’ils avaient appuyé dans une proportion de 57 %. L’entreprise Énergie Cacouna avait cependant abandonné ses plans, en raison de la conjoncture économique et de l’état du marché du gaz naturel.
M. D’Amours a soutenu que les démarches de TransCanada sont conformes avec les lois en place et qu’il ne voit rien de mal aux travaux menés actuellement.
« On est d’accord avec leurs prises de données dans le fleuve. Les promoteurs vont devoir passer la batterie environnementale. Un projet de 700 millions, on ne peut pas revirer ça du revers de la main, il faut regarder ça. Des bélugas, ils sont dans le fleuve et je n’en ai pas vu virés sur le top », a-t-il soutenu.
TransCanada dit prendre ses responsabilités
Philippe Cannon, porte-parole du projet Oléoduc Énergie Est de TransCanada, a fait savoir la semaine dernière que l’entreprise est consciente des dangers des sondages géophysiques sur la population des bélugas.
TransCanada dit suivre un processus défini et approuvé par Pêches et Océans Canada et qu’elle a obtenu l’autorisation de Parcs Canada afin d’effectuer la surveillance aérienne des mammifères marins.
L’entreprise assurait, par ailleurs, que les travaux menés allaient être arrêtés temporairement aussitôt qu’un mammifère marin se présenterait dans un périmètre de 500 mètres autour du bateau.
Au terme des travaux préliminaires, qui devaient prendre fin le 30 avril, TransCanada a soutenu qu’une dernière analyse des déplacements des bélugas serait menée.
TransCanada veut construire un port à Cacouna afin de charger dans des navires le pétrole provenant des sables bitumineux de l’Alberta, en vue de l’exporter.
L’Office national de l’énergie est chargé d’évaluer tout le projet de pipeline Énergie Est, qui permettra de transporter dès 2018 plus d’un million de barils de pétrole par jour vers le Nouveau-Brunswick, en passant par le Québec.
Les écologistes, Nature Québec, Greenpeace et l’Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique entre autres, s’opposent au projet.
Étienne Fortin-Gauthier
Ghislaine Daris, mairesse de Cacouna : Sauvez les bélugas dans le St-Laurent
Pourquoi c’est important
Nous avons pris connaissance ce matin du projet de TransCanada concernant l’implantation d’un port à Cacouna qui permettrait de transporter du pétrole brut vers l’étranger. Ce dernier serait situé en zone très importante pour la reproduction des bélugas, une espèce considérée comme menacée.
Il est de votre devoir d’agir afin de préserver la stabilité actuelle du lieu de nidification et d’éviter toute perturbation et ainsi nuire encore plus à la reproduction de l’espèce qui a déjà un taux de mortalité très élevé auprès de sa jeune population.
Il est important de mettre tous les efforts nécessaires dans la préservation de nos écosystèmes, ce qui inclus la faune et la flore de nos fonds marins.
Dans une missive de voir le Québec devenir une province verte et un leader mondial en développement durable, il est nécessaire que votre municipalité suive les traces de celle de Lévis où le conseil municipal a rejeté la possibilité qu’un tel projet voit le jour sur son territoire.
C’est la solidarité de la population et de ses institutions politiques qui permettront au Québec de s’imposer sur la scène internationale du développement durable. Vous avez entre vos mains le pouvoir de changer les choses et il serait dommage de voir que Cacouna, ville reconnue pour l’hospitalité de ces habitants, décide d’emboîter le pas du pétrole. Les touristes de votre région s’intéressent aux bélugas, pas à un port permettant le transport du pétrole le plus polluant au monde.
C’est d’une seule voix que tous les signataires de cette pétition vous demande, ainsi qu’à votre conseil municipal, de rejeter clairement la possibilité qu’un tel projet puisse voir le jour sur le territoire de votre municipalité.
Pétition, avaaz.org