Le 2 mars 1974, il y a juste 40 ans, le jeune militant catalan Salvador Puig i Antich, âgé de 25 ans, subit le supplice du garrot (collier étrangleur), qui est la peine de mort réservée par la dictature franquiste à ses opposants les plus résolus, qu’elle traite alors comme de dangereux criminels de droit commun.
Qui est Puig i Antich ? Un jeune travailleur inscrit aux cours du soir à Barcelone ? ; en contact avec les Commissions ouvrières, syndicat alors clandestin, il adhère au Mouvement ibérique de libération (MIL) en 1971, un petit groupe inspiré par l’anarchisme, le conseillisme et le situationnisme, issu notamment de l’expérience des luttes ouvrières très dures de ces années.
Afin de publier des textes révolutionnaires interdits en Espagne, comme ceux de l’anarchiste italien Camillo Berneri, assassiné par les agents de Staline à Barcelone en mai 1937, des communistes de gauche, comme Anton Pannekoek, ou d’auteurs situationnistes, mais aussi pour soutenir les grèves ouvrières, le MIL se lance alors dans l’expropriation de banques. Après une courte période, en août 1972, il décide son auto-dissolution par crainte d’une dérive militariste, et parce qu’il estime que les luttes ouvrières n’ont pas besoin de lui dans la durée.
Pour autant, la police poursuit patiemment ses recherches et finit par arrêter plusieurs ex-membres du MIL, avant de tendre un guet-apens à Puig i Antich, à l’issue duquel il est grièvement blessé. Les 7-8 janvier 1974, le procès des ex-militant·e·s du MIL, qui portent encore les traces de la torture subie au cours de leur incarcération, est une farce, qui aboutit à la condamnation de Puig i Antich au « garrot vil », et de ses camarades à de lourdes peines de prison.
Les réactions internationales sont massives : grèves, attentats et affrontements à Barcelone, nombreuses manifs dans toute l’Europe, enlèvement par les GARI (Groupes d’action révolutionnaire internationale) d’un banquier à Paris… A Genève, la façade du consulat d’Espagne, alors situé à Plainpalais, est la cible d’une mémorable manifestation et maculée de rouge par le jet de dizaines de bouteilles de peinture.
En 2007, la justice militaire espagnole a refusé de réviser le procès scandaleux de Puig i Antich et de ses camarades.
Jean Batou