Six jours après le passage du typhon Haiyan, un des responsables de l’Unicef aux Philippines, Kent Page, estime que la situation reste très difficile. L’organisation onusienne vient de lancer un appel aux dons pour les 4 millions d’enfants victimes de la catastrophe et estime à 25 millions d’euros les sommes nécessaires.
Kent Page – Dans quelle condition s’effectuent les opérations d’aide menées par l’Unicef ?
Rémi Barroux – La mobilisation est importante. En plus des 90 personnes présentes en permanence pour l’Unicef aux Philippines, nous venons de recevoir l’appui de nouvelles équipes formées aux interventions d’urgence, spécialistes des communications, de la nutrition et du traitement des eaux notamment, en provenance de Nouvelle-Zélande, des Etats-Unis, d’Indonésie. Chacun fait ce qu’il peut, mais la situation reste très difficile. De nombreuses zones restent très difficiles d’accès. Des réunions avec tous les intervenants et le gouvernement ont lieu tous les jours pour coordonner les ONG et les différents organismes sur le terrain.
Pour l’Unicef, nous avons envoyé du matériel sur plusieurs lieux, notamment à Tacloban, à Roxas sur l’île de Panay... L’aéroport de Cébu est opérationnel et nous y acheminons l’aide par avion. Le matériel arrive aussi par bateau puis est transporté par camions. Un avion-cargo de 60 tonnes, arrivé mardi, destiné à aider 10 000 familles, transportait du savon, des purificateurs d’eau, des kits médicaux, des bâches et des suppléments en micronutriments.
La situation est-elle tendue sur le terrain ?
Nous n’avons pas été victime, à l’Unicef, d’agression ou de vol. Mais nous entendons beaucoup de frustration sur le terrain. Les gens sont dans une situation très difficile et attendent beaucoup de l’aide internationale. Nous estimons à 100 000 le nombre d’enfants de moins de 5 ans et 60 000 le nombre de femmes enceintes ou allaitantes déplacés par le typhon Haiyan. Ce qui fait courir des risques graves de malnutrition aux enfants les plus vulnérables. Pour l’instant, nous essayons de bien répartir l’aide et les interventions des ONG afin qu’elles ne se fassent pas toutes au même endroit.
Quelles sont vos priorités ? La protection des enfants, leur scolarité, traditionnellement au cœur de l’action de l’Unicef, en font-elles partie ?
Nous en sommes encore au stade de l’urgence : la priorité est à la distribution de kits médicaux, de trousses de santé, de kits d’hygiène pour les familles, de nutrition, des générateurs pour pouvoir traiter les eaux. L’urgent, c’est le sanitaire. Mais nous savons que nous allons très vite avoir besoin de matériel pédagogique et scolaire. Après le traitement d’urgence, il est très important de redémarrer vite les activités pour les enfants. Ils vont avoir besoin d’espaces sûrs, protégés, pour pouvoir jouer et reprendre la classe pendant que les adultes essayeront de reconstruire les maisons. Nous sommes en train de planifier cela avec les autres partenaires concernés.
L’aide financière est-elle suffisante ?
Comme l’ensemble des ONG, nous faisons appel aux dons. Nous en avons déjà reçu beaucoup [Unicef France a déjà mobilisé 650 000 euros]. La Fondation Ikea par exemple a versé à l’Unicef la somme de 2 millions d’euros pour les Philippines. Mais les besoins sont énormes. L’Unicef estime à 25 millions d’euros la somme nécessaire pour venir en aide aux 4 millions d’enfants affectés par le passage du typhon. La valeur de la marchandise transportée par notre premier avion cargo était d’1 million d’euros environ.
Propos recueillis par Rémi Barroux
Journaliste au Monde