Une semaine, jour pour jour, après le passage dévastateur du typhon Haiyan sur le centre des Philippines, les secours commençaient tout juste à se déployer, vendredi 15 novembre, sur les zones dévastées de l’archipel asiatique.
L’arrivée du porte-avions américain George-Washington et de sept autres navires de l’US Navy, devrait accélérer la mise en place de la logistique. « Quand je suis arrivé ici avec mon équipe de six hommes, dimanche, nous avions pour mission de rétablir les communications, explique le sergent-chef Clark, normalement posté à Mindanao où l’armée américaine soutient l’armée philippine contre les rebelles séparatistes. La première chose que j’ai faite, c’est de prévenir mon commandement que la situation était bien pire que ce à quoi nous nous attendions. » Le sous-officier estime néanmoins que les choses ont déjà beaucoup progressé en quelques jours, et que l’arrivée des spécialistes « HA » (Aide humanitaire) va faire une vraie différence.
Lors d’une conférence de presse jeudi, un responsable philippin a affirmé – pour illustrer les « progrès » de l’avancée des secours – que 7 200 bouteilles d’un litre d’eau avaient été distribuées sur l’île de Leyte. Au vu de la population – la ville de Tacloban compte à elle seule 220 000 personnes –, et de la chaleur ambiante, son annonce a plus inquiété que rassuré. En revanche, l’armée américaine a commencé à lancer par hélicoptère des quantités importantes d’eau et de nourriture.
« Nous comparer à eux, c’est comme la souris et l’éléphant. Nous n’avons que deux avions Hercules C-130, eux, je ne sais même pas ! », indique l’une des responsables de l’équipe médicale de l’armée philippine. Elle profite, comme bon nombre de soldats philippins, des vols organisés par l’armée américaine entre Tacloban et Manille ou Cebu. L’aide commence à arriver du monde entier sur cette île largement épargnée par le typhon et qui sert désormais de base arrière aux secours. Les supermarchés y ont vendu en une semaine, l’équivalent de deux mois de marchandises – boîtes de sardines, riz, nouilles, etc.
Cebu a dû aussi s’organiser pour accueillir plus d’un millier de rescapés des îles de Leyte et de Samar, des personnes âgées, des malades et des enfants. Près de 2 500 personnes supplémentaires sont attendues aujourd’hui, par bateaux et avions militaires. Plusieurs centres sportifs ont été réquisitionnés pour les recevoir.
Dans les zones dévastées, nombre de problèmes logistiques perdurent. À l’aéroport de Tacloban, il n’y a par exemple qu’un seul chariot élévateur pour décharger les camions. Les vivres et le matériel de secours débarqués des avions militaires s’entassent et ne quittent l’aéroport qu’au rythme de ce seul engin disponible.
Concernant les cadavres en décomposition qui jonchent les rues de Tacloban, le maire de la ville a expliqué qu’il ne pouvait pas utiliser le camion qui servait le matin à distribuer des vivres ou transporter des gens, pour ramasser des cadavres l’après midi. Les sacs mortuaires manquent aussi, or les corps putréfiés deviennent de moins en moins transportables à mains nues.
Sur l’île de Samar, première ligne de terre que le typhon a touchée, plus de 700 morts ont été découverts pour le moment, mais seulement 160 ont été identifiés. Un responsable s’est excusé d’avoir dû enterrer les cadavres tous ensemble, ne disposant pas de sacs.
Le ministre de l’intérieur, Manuel Roxas a reconnu, jeudi, devant la presse que la gestion des secours avait été chaotique. « Les caisses partent non étiquetées, donc à l’arrivée personne ne sait ce qu’elles contiennent… », a-t-il convenu.
Ces dysfonctionnements ont un effet boule-de-neige désastreux. Les secours se concentrent aujourd’hui sur les zones dévastées jugées prioritaires. Reléguant au second plan les villages considérés comme de « seconde gravité » car détruits à 50 % seulement. Mais le retard pris fait que leurs habitants se retrouvent désormais, une semaine après le typhon, dans une situation également désespérée. « Ce que vous voyez ici, il faut le multiplier par mille pour tous les villages à l’intérieur », a indiqué Manuel Roxas.
Selon lui, plus de la moitié de la quarantaine de petites villes sur l’île de Leyte n’ont toujours pas été en contact avec les secours. C’est aussi le cas de Daanbantayan, au nord de Cebu, où le maire, Augusto Corro, vient de déclarer qu’il craignait des épidémies vu le nombre de malades dans sa population.
Florence de Changy (Cebu, Philippines, envoyée spéciale)