Tout le monde s’accorde à dire que ce sont les démocrates et particulièrement la gauche, qui ont combattu à l’intérieur comme à l’extérieur le régime de Tunis, dénoncé la censure et les tortures et ce sont les islamistes qui l’ont emporté aux élections. Pourquoi ?
La raison est simple, les démocrates ne se sont pas déclarés en tant que laïcs et ce n’est qu’en se déclarant en tant que tels, et en ayant comme premier objectif la séparation du politique et du religieux que le tunisien lambda ou tout autre Maghrébin pourra aller vers une conscience politique et s’émanciper de la conscience religieuse et faire de la politique. La politique c’est à dire la gestion faite au nom de l’Homme et non au nom de Dieu.
Pourquoi la laïcité, ou la sécularisation, ont été des facteurs déterminant pour tous les pays démocratiques et ne le serait pas au Maghreb et au Machrek ?
Dans les pays ou la majorité de la population est « musulmane » il est plus judicieux de parler de sécularisation et non de laïcité. Dans tous ces pays, en l’absence de sécularisation, le processus électoral ne peut être qu’un leurre de cette « extrême droite » ce fascisme qu’est l’islamisme.
En Tunisie,ce dernier vient d’emporter les élections faut-il le souligner dés le début, aussi, parce que supportée par les média lourds, qui élèvent, en les accompagnant, les féodalités nationales et consorts au rang de partenaires du grand capital, en sous-main. Le grand bouleversement de la société en Tunisie s’achève sur ce one-man-show de la démocratie pour se transformer en un avatar de cette décennie, car la question : l’islam politique peut-il s’émanciper et devenir démocrate se répète de plus en plus et la non réponse entretenue devient nuisible.
On sait que les réponses à cette question ont fini par émietter le fameux PAGS au lendemain de sa sortie de la clandestinité, il y a plus de deux décennies. Vingt ans après des centaines de milliers de morts, autant de déracinés, transforment la question et vient compléter l’arsenal de l’international socialiste et les des nationalistes décadents avec le « qui tue qui », cette accusation affirmative envers tous ceux qui ont résistés à l’ « Afganisation » de l’Algérie, dont l’A.N.P et non l’OTAN ne plaise à….T out retard dans la sécularisation devient un frein à l’évolution, ce retard est la meilleure armes que le système politique utilise pour contenir tout effort démocratique. Certains pensent contourner la sécularisation, qualifiée d’occidentale, quand d’autres lui donnent une spécificité comme celle, la plus récente, de débarrasser la religion de tout pouvoir autoritaire…
La religion reste un phénomène divin et son utilisation dans la sphère publique un phénomène magique, et le plus souvent tragique. La Constitution qui prône l’islam religion de l’Etat ,en plus des maux sociaux, les plus mortels, telles que l’injustice et le chômage,consolide la conscience religieuse . Sur un tel terrain, le militant qui défend un programme politique n’a aucune chance. L’islamisme n’est pas anti-démocratique, il est incompatible avec la démocratie.
L’affirmation que la gauche tunisienne a accepté de participer aux élections parce que Ghenouchi a renoncé à l’Etat théocratique relève du charlatanisme, de la blague qui consiste à croire en la parole d’un complice de criminels. C’est aller vers l’absolution de leurs crimes que de les croire sur parole. Ceux qui renoncent à l’Etat théocratique acceptent la sécularisation de l’Etat.
Le grand apport de la rue arabe est dans la réactualisation de cette exigence de la séparation du politique et du religieux qui, à cause de n’avoir pas été pris en charge convenablement par les Tunisiens, et d’autres, les Algériens d’hier et d’aujourd’hui, ne pouvait en fait déboucher que sur une victoire des islamistes.
Aujourd’hui, c’est un autre crime que de laisser passer la leçon qui nous est infligée, et de continuer à traiter la sécularisation, comme une revendication secondaire. Le piège est de reprendre les débats antécédents et croire à la parole donnée d’un ancien conseillé du FIS, ou tout autre fasciste.
Le grand capital monopolise les médiats lourds et, en politique, veut nous faire croire que le vote est la première page du livre de la démocratie. A ce point de vue je suis de ceux qui affirment que ce livre ne peut se feuilleter, sans un minimum de liberté et que ce minimum ne peut être entamé que par la condition sine qua non de la séparation du politique et du religieux. Dans leur livre de la démocratie, le grand capital et ses sous fifres ne veulent, pour les illettrés que nous sommes à leurs yeux, n’inscrire donc qu’une seule et unique page. Le livre d’une seule page pour le malheur de la Tunisie aujourd’hui, celui de l’Algérie depuis vingt ans, à la différence que le parti de Guennouchi, cet ancien conseillé du FIS, persona non grata en Algérie il y a deux décennies, eu la bénédiction de la classe politique de son pays après celle des dominants de ce monde, grâce aux médiats lourds, et revient chez nous aujourd’hui par la grande porte. La défaite n’est donc pas seulement tunisienne.
Pourtant « Echaâb yourid » « le peuple exige », en opposition à « Dieu veut », était le cri des cœurs séculiers des tunisiens, le cri semble s’essoufflé car pour exiger il faut un minimum d’organisation ou, à défaut, une volonté politique forte qui se serait manifestée face aux intégristes qui à la veille des élections avaient commencé à terroriser et la chaine Nessma TV, le cinéma … n’étaient qu’une exhibition des forces que les islamistes déployaient ; pour l’exemple, un avertissement, avant le vote. Des salafistes.
Que dire à celui ou celle qui a la naïveté de croire que l’islam politique n’est pas apparenté au salafisme. Le salafiste, faut-il le rappeler, est l’islamiste riche et terrible, et beaucoup, la corruption aidant, deviennent riches et terribles ; quant à ceux qui ne le deviennent pas, ils se planquent en terroristes potentiels, aux aguets, pour espérer le devenir un jour ici ou là-bas, à l’au-delà. Mr Hammadi Jebali, affirme que la Tunisie était à « un moment divin, dans un nouvel Etat, dans un 6e Califat, ». La première réponse à ce dirigeant autoproclamé et consorts est dans la volonté politique d’abroger les articles des Constitutions dans les pays qui affirment que l’Islam est religion de l’Etat.
Kouidri Saâdeddine
N.B ; : Faut-il rappeler que l’islamisme est l’enfant terrible du nationalisme en déclin.