Une très longue procédure devant les tribunaux de l’État de Chhattisgarh, en Inde, a permis à des travailleurs contractuels exploités par la firme suisse Holcim Cement d’obtenir, au mois de mars, la régularisation de leurs emplois par décision de la Haute cour d’appel. Mais Holcim Cement refuse d’appliquer la décision de la cour.
En conséquence, des centaines de travailleurs contractuels d’une des filiales indiennes de Holcim, l’Associated Cement Co. Ltd (ACC), et leurs sympathisants organisent une « dharana », une grève continue, dans la zone industrielle de Bhilai, devant la statue de Shankar Guha Nioygi, le leader ouvrier légendaire et fondateur du parti politique Chhattisgarh Mukti Morcha (CMM), assassiné en 1991.
Le syndicat Pragatisheel Cement Shramik Sangh, associé au CMM, mène la lutte pour les travailleurs contractuels, un peu comme Nioygi l’avait fait pour les travailleurs irréguliers de la mine, la métallurgie et le textile il y a une trentaine d’années.
Ce combat légitime pour que les travailleurs d’ACC Jamul Cement obtiennent un salaire normal, la couverture du fonds de prévoyance et, même, un équipement de sécurité correct, se poursuit depuis près de vingt ans. Holcim a pris une participation majoritaire dans ACC et Ambuja Cement en 2006-2007 et, depuis, elle n’a cessé de priver les travailleurs contractuels de leurs droits légitimes dans ses cimenteries indiennes.
En 2006, une juridiction du travail avait statué que 573 travailleurs contractuels de l’ACC Jamul – dont plusieurs ont été licenciés par la suite – devaient voir leur statut régularisé et leurs salaires et conditions de travail mis en conformité avec deux conventions, le Cement Wage Board et le Neviata Award. Holcim, Lafarge, la société Ultratech du groupe Aditya Birla Group et d’autres grands cimentiers ont souscrit au Wage Board après des luttes acharnées dans le passé.
L’accord Wage Board contient des clauses restreignant fortement le recours à la main-d’œuvre contractuelle et le limitant au chargement et au déchargement des matières premières, mais avec un salaire identique à celui du personnel statutaire.
Holcim brave l’arrêt de la Cour du travail en ne payant que deux à cinq journées de travail par mois – à 2 $ par jour – parce qu’il s’agit du nombre de journées travaillées par des contractuels au moment où la procédure a été introduite et alors que Holcim essayait de les contraindre à démissionner.
Pragatisheel Cement Shramik Sangh l’a assignée devant la Haute cour et la procédure est toujours partiellement en suspens. Toutefois, le 21 mars, la Haute cour a jugé que les documents signés par les travailleurs irréguliers et Holcim sont des faux et a ordonné à la direction de régulariser plus d’une centaine de contractuels. Cependant, elle n’a pas reconnu les droits de plus de 400 travailleurs qui ont été forcés d’accepter des démissions volontaires.
L’Inde est le deuxième producteur mondial de ciment après la Chine. Le secteur y connaît une progression annuelle de 11%, ce qui a poussé les principaux producteurs de ciment à réaliser des investissements et des acquisitions considérables.
Mais les multinationales comme Holcim et Lafarge ne font rien pour stabiliser l’emploi et offrir un travail décent aux habitants des zones rurales qu’elles recrutent pour les exploiter. Dans le seul État de Chhattisgarh, dans le centre de l’Inde, on estime que l’industrie cimentière emploie 3.200 travailleurs permanents, tandis que 11.000 peinent en tant que travailleurs contractuels, embauchés à court terme et qui peuvent être renvoyés à tout moment.
ICEM InBrief