Avec la centrale syndicale tunisienne UGTT, les organisations syndicales françaises CGT, CFDT, FO, FSU, UNSA et Solidaires, dénoncent la politique répressive du gouvernement tunisien. Elles condamnent les tirs pour tuer de Thala, Kasserine et Ar-Reqab et dénoncent le raid qui a détruit les locaux de l’UGTT de Kasserine.
La vague de colère déclenchée il y a trois semaines à Sidi Bouzid par le suicide par le feu du jeune Mohamed Bouazizi exprime en Tunisie un vaste mouvement de revendications pour l’emploi et à une vie décente.
Le régime tunisien répond par la force et tue. Selon un bilan provisoire, quelque 50 personnes dans les villes de Kasserine et de Thala, sont mortes. A ce bilan, il faut ajouter les tués et blessés des autres régions, le comptage exact des victimes reste encore à établir.
L’armée vient hier de se déployer dans la capitale et les grandes villes et un couvre-feu est instauré. Devant une telle politique on peut craindre le pire.
Avec l’UGTT, les syndicats français appellent au retrait immédiat de l’armée des villes, la fin de l’Etat d’urgence qui touche certaines régions et la libération de tous les prisonniers.
Les six organisations françaises demandent, avec les syndicalistes tunisiens, que soient poursuivis et jugés tous ceux qui ont ouvert le feu sur les manifestants. Elles soutiennent la demande du Haut commissariat aux droits de l’Homme de l’ONU pour une enquête transparente et crédible.
Les annonces actuelles du régime ne sont pas crédibles. Le gouvernement tunisien déclare libérer tous les détenus depuis le début du mouvement et procède dans le même temps à d’autres arrestations. Sans mesures significatives et engagements concrets, les promesses de créations d’emplois, les vagues reconnaissances de la corruption ou encore les changements de ministres ne sont que les manifestations d’un régime impuissant que cette crise remet en question.
Les organisations syndicales françaises se déclarent solidaires de la centrale syndicale tunisienne qui revendique un modèle de développement du pays répondant aux besoins essentiels de la population, fondé sur l’équilibre entre les régions et pour laquelle l’Etat et le secteur public doivent pleinement assurer leur fonction d’investisseurs.
Les travailleurs tunisiens revendiquent un droit à un emploi décent assurant un revenu stable permettant à chacun de subvenir à ses besoins et de disposer de garanties en cas de perte d’emploi. C’est pourquoi nous soutenons la demande de la centrale tunisienne de création d’une caisse d’assurance chômage.
Les organisations syndicales françaises se déclarent également solidaires des revendications des syndicalistes et du peuple tunisien qui aspirent à un régime démocratique, au respect des libertés publiques, de la presse et des médias, à l’indépendance de la justice et au respect des droits syndicaux, de manifester et de grève. Autant de droits bafoués par un régime à bout de souffle qui d’année en année a renforcé sa répression et son autoritarisme.
Les six organisations françaises tiennent aussi à exprimer leur indignation devant les déclarations de certains membres du gouvernement français soutenant le président Ben Ali, déniant la nature autoritaire du régime tunisien ou encore optant pour une coopération avec les autorités tunisiennes pour le maintien de l’ordre.
Aussi, demandent-elles au gouvernement de cesser son soutien au régime policier de Ben Ali qui ne peut plus désormais recevoir la caution explicite ou implicite de gouvernements démocratiques.
Elles appellent aussi l’Union Européenne à exiger du gouvernement tunisien qu’il respecte la clause relative au respect de la démocratie et des droits humains et des libertés fondamentales de l’accord d’association avec la Tunisie. Il doit en être de même dans le cadre des négociations pour un partenariat avancé de l’Union européenne avec ce pays.
Elles appellent enfin les autorités françaises et européennes à exiger la libération et l’amnistie des prisonniers et des condamnés suite aux mouvements sociaux, dont ceux de 2008 dans le bassin minier de Gafsa.
13 janvier 2011
Mouvement social de Sidi Bouzid (Tunisie) :
Les syndicats français expriment leur solidarité
30 décembre 2010
Trois ans après les événements de Gafsa, la région de Sidi Bouzid, dans le centre de la Tunisie, est depuis le 17 décembre en proie à une flambée de colère dont les causes, comme à Gafsa, sont principalement le chômage et l’absence de développement.
La tentative de suicide d’un jeune diplômé vendeur ambulant qui s’est immolé par le feu a été l’élément déclencheur d’une vague de manifestations dans la région qui ont donné lieu à des arrestations en masse.
Les affrontements les plus violents se sont produits à Manzil Bouziane où un jeune manifestant a été tué par balle et ont provoqué une dizaine de blessés.
Le 27 décembre, des centaines de syndicalistes de l’UGTT, principalement de l’enseignement, des services se santé, de la poste et des télécommunications se sont rassemblés devant le siège de la centrale à Tunis. Les manifestants étaient cernés par un important dispositif de sécurité dont des unités anti émeutes.
Le déséquilibre du développement entre les régions côtières et le centre du pays est à l’origine de la détresse sociale de régions laissées pour compte, comme celle de Sidi Bouzid. L’investissement pour la création d’emplois, dans ces régions est une nécessité, particulièrement en direction des jeunes diplômés dont le taux de chômage atteindrait le double du taux global estimé à 14%.
Le collectif syndical français formé après les événements de Gafsa (CFDT, CGT, FSU, Unsa et Solidaires), soutient les efforts du mouvement syndical tunisien pour empêcher l’usage de la manière forte face à ces mouvements de protestation spontanés.
Il soutient la revendication de l’UGTT pour l’ouverture d’une négociation pour un développement durable créateur d’emplois de qualité et géographiquement équilibré.
Avec les syndicalistes de l’UGTT, la CGT, la CFDT, la FSU, l’UNSA et Solidaires exigent :
– la non intervention des forces de police contre les mouvements sociaux,
– la libération de toutes les personnes arrêtées,
– sans oublier la libération des militants emprisonnés suite aux mobilisations passées de la région de Gafsa, comme Fahem Boukadous et Hassan Ben Abdallah,
– l’amnistie et la réintégration dans leur emploi des ex-prisonniers du bassin minier de Gafsa et de tous les condamnés.
Face à cette politique caractéristique d’un Etat policier, les organisations françaises exigent enfin du gouvernement français qu’il cesse son soutien systématique à ce régime.
Paris, le 30 décembre 2010
Contacts des membres du collectif syndical
CFDT : Philippe Réau preau cfdt.fr
SGEN-CFDT : Michel Debon mdebon free.fr
CGT : Jean-François Courbe jf.courbe cgt.fr
FSU : Corinne Vialle corinne.vialle snuipp.fr
Solidaires : Alain Baron contact solidaires.org
UNSA : Saïd Darwane darwane unsa.org
Lettre ouverte à Frédéric Mitterrand sur les évènements de Tunisie
Monsieur le ministre, ce dimanche,
sur Canal+, aveugle à la
répression brutale qui frappe le
mouvement social tunisien, vous
avez osé défendre la dictature de
Ben Ali, ce président d’un “paradis
touristique” dans lequel vous
aimez vous rendre régulièrement
en vacances*.
Lors de celles-ci, vous détournez
probablement les yeux pour ne
pas voir la répression et la torture
qui, depuis des années, s’abattent
sur les syndicalistes, les associations, les opposants politiques, les journalistes, les avocats, les artistes, les
blogueurs,...
Quand allez-vous cesser de soutenir, comme vos collègues du gouvernement, un président totalement
coupé des réalités qui, avec sa famille, pille allègrement le pays ?
Quand allez-vous fustiger les forces de répression qui vont jusqu’à tirer sur des cortèges funéraires,
obligeant les marcheurs à abandonner les corps sur place ?
Quand allez-vous enfin faire preuve de la dignité élémentaire en dénonçant la répression aveugle
qui a fait des dizaines de morts parmi les travailleurs, les précaires et les jeunes tunisiens qui n’en peuvent
plus de subir les inégalités sociales, le manque de perspective politique et la remise en cause des rares
libertés démocratiques ?
Quand allez-vous appeler à la libération immédiate des manifestants emprisonnés, parmi lesquels
de nombreux blogueurs et acteurs culturels qui tentent de contourner la censure officielle des médias
afin que la liberté d’expression puisse s’exprimer ?
Pour ce qui nous concerne, comme de nombreux citoyens et citoyennes, nous sommes
résolument solidaires du peuple tunisien. Nous appelons à participer au meeting unitaire
prévu le 13 janvier, à 18h, à la Bourse du Travail de Paris**.
Sud Culture Solidaires, le 12 janvier 2011.
* cf http://www.youtube.com/watch?v=joeR0VH7jXk
** http://www.solidaires.org/article34644.html
Sud Culture Solidaires, 12, rue de Louvois - 75002 PARIS - tel : 01.40.15.82.68 - sud culture.fr - http://www.sud-culture.org/expressions/