Après le succès de la journée de grève et de manifestation du 24 juin, le gouvernement est resté « droit dans ses bottes », méprisant le niveau de la mobilisation et disant simplement qu’il s’agissait d’une mauvaise compréhension du projet de loi. Ben voyons ! Les manifestants du 24 juin et tous ceux qui les soutenaient ont bel et bien compris ce que voulait faire le gouvernement. Pénaliser et exploiter encore plus les salariés les plus précaires, les moins bien payés mais aussi les femmes et les jeunes. Cette contre-réforme s’inscrit clairement dans une politique d’austérité, de rigueur et répond dans les grandes lignes aux préconisations du FMI de Dominique Strauss-Kahn : relèvement de deux ans de l’âge légal de départ, allongement de la durée de cotisation, baisse du niveau des pensions, baisse des salaires des fonctionnaires...
Toutes ces mesures n’auront qu’une seule conséquence : favoriser encore et toujours les capitalistes.
Ce projet de loi doit être purement et simplement retiré. Partir à la retraite à
60 ans à taux plein et même revenir aux 37, 5 annuités pour tous, c’est possible. C’est seulement un choix politique, une question de répartition des richesses et du travail. Être crédible, comme le propose le Parti socialiste, c’est défendre cela et non annoncer « qu’il va falloir travailler plus longtemps » et ne plus défendre la retraite à 60 ans comme Martine Aubry vient de le faire, lors d’un meeting à Roubaix, le 29 juin dernier.
Pour gagner face à ce gouvernement, l’ensemble de la gauche sociale et politique doit taper sur le même clou. C’est bien parce que nous avions réussi cette unité que le gouvernement avait été obligé de retirer la loi mettant en place le Contrat première embauche (CPE) en 2006.
Après le 24 juin, le gouvernement espérait sans doute un affaiblissement dans la détermination des travailleurs à en découdre. C’est raté. Dès le 29 juin, l’intersyndicale élargie à Force ouvrière a donc décidé de maintenir la pression tout au long de l’été. Et, en particulier, le 13 juillet, jour de présentation du projet de loi devant le conseil des ministres où des rassem blements devant les préfectures seront organisés pour en réclamer le retrait. Mais elle ne s’arrête pas là et appelle également l’ensemble des salariés du privé comme du secteur public à une nouvelle journée de grève et de manifestation dès le 7 septembre. Ce qui est sans aucun doute, le meilleur de ce que nous pouvions en attendre. Cependant, il ne faudrait pas que le 7 septembre, qui doit être très très fort, soit une simple répétition du 24 juin. Il faut en faire une véritable étape dans la construction de la grève générale et d’un affrontement contre ce gouvernement déterminé mais affaibli, pour obtenir le retrait du projet de loi.
Alors c’est vrai que rien n’est gagné d’avance, mais rien n’est perdu non plus.
Sandra Demarcq
* Paru dans Hebdo TEAN 63 (08/07/10).
NON À LA RÉFORME DES WOERTH-BETTENCOURT !
Imperturbable, le gouvernement poursuit sa politique de rigueur avec sa contre-réforme des retraites, malgré l’évidente collusion entre les politiques et les grandes fortunes, symbolisée par l’affaire Woerth-Bettencourt.
Ainsi donc c’est Éric Woerth, le ministre du Travail impliqué dans le scandale Bettencourt, qui a présenté, mardi 13 juillet, en conseil des ministres, le projet de loi sur les retraites. C’est en soi tout un symbole ! Cette réforme s’inscrit dans l’offensive annoncée par Sarkozy et ses ministres pour faire payer aux couches populaires les subventions à fonds perdus qu’ils ont accordées aux banques et aux multinationales, les cadeaux fiscaux faits aux plus riches depuis des années.
Porter l’âge légal de départ en retraite à 62 ans en 2018, à raison de quatre mois par an, augmenter de la même façon le nombre d’annuités nécessaires pour toucher une pension complète jusqu’à 41, 5 ans, voire plus comme le réclament déjà certains députés de l’UMP, c’est vouloir faire travailler plus pour gagner moins des millions de salariés, c’est vouloir les contraindre à souscrire des assurances privées, pour le plus grand profit des sociétés de finance et des fonds de pension. De la même façon que l’augmentation des cotisations des fonctionnaires de près de 3 % pour les aligner sur celle du privé n’a rien à voir avec une quelconque « équité », l’ensemble de cette réforme qui voudrait obliger les salariés âgés à s’épuiser au travail alors qu’il y a cinq millions de chômeurs dans le pays, n’a rien à voir avec le prétendu intérêt général dont Sarkozy et Woerth ont le culot de se revendiquer alors que tout, dans l’affaire Bettencourt, les désigne comme gouvernement des riches pour les riches.
L’Inspection générale des finances (IGF) aurait « blanchi » Woerth. Frédéric Lefebvre, le porte-parole de l’UMP, claironne que son rapport met « un terme à la suspicion volontairement entretenue à l’encontre d’Éric Woerth et à des semaines de malveillance ». Quelle farce ! Ces hauts fonctionnaires, diligentés sur ordre de Sarkozy lui-même, n’auraient trouvé aucune trace d’une intervention de l’ancien ministre du Budget en faveur de la troisième fortune de France. Comme si Woerth aurait pu être assez négligent pour apposer sa signature sur un document de nature à le compromettre. Qui pourrait croire à une telle fable ?
Une chose est sûre par contre, c’est que Florence Woerth, la femme du ministre, était embauchée pour un salaire annuel de 140 000 euros, auxquels il faut ajouter des primes de 40 000 euros, par Patrice de Maistre, le gestionnaire de la fortune de Bettencourt. Ce même de Maistre à qui Woerth remettait quelques mois plus tard la légion d’honneur. Sûr également le fait que 380 000 euros ont bien été retirés en espèces du compte à la BNP de la milliardaire durant les premiers mois de 2007, ce qui confirmerait que la campagne électorale de Sarkozy a été financée par les Bettencourt qui ont largement prodigué leurs largesses à l’UMP. Dans les enregistrements réalisés par le majordome des Bettencourt, il est question aussi de comptes secrets en Suisse transférés vers Singapour, un paradis fiscal.
Cette affaire révèle les mille et une manières qu’ont les riches de soustraire leur fortune au fisc, les complicités dont ils bénéficient au plus haut niveau de l’État, moyennant quelques commissions sonnantes et trébuchantes. Et puis il y a ces 30 millions d’euros rendus de façon tout à fait légale, eux, à Bettencourt, au titre du bouclier fiscal, une des mesures légales les plus visibles parmi toutes celles que le gouvernement a mises à la disposition de cette minorité richissime pour lui permettre d’accaparer une part toujours plus importante de la richesse sociale.
Et il faudrait que ceux qui produisent cette richesse sociale, les travailleurs, les couches populaires, acceptent la régression sociale qu’on veut leur imposer au nom de déficits dont ils ne sont pas responsables !
Il est évident que cela ne passe pas. Une majorité de la population, comme l’indiquent les derniers sondages, ne croit pas au « blanchiment » de Woerth, et 74 % s’attend à un mouvement social de grande ampleur à la rentrée.
Nul doute que la journée du 7 septembre, à laquelle ont appelé les directions syndicales sous la pression du succès des grèves et manifestations du 24 juin aura un grand retentissement. Il s’agit d’en faire le début d’une contre-offensive contre ce gouvernement des riches par les riches.
Pour le retrait de la réforme des Woerth-Bettencourt, pour l’abrogation de toutes les lois depuis celle de Balladur en 1993 qui a abouti à une baisse des pensions de 20 % ! Pour l’affirmation et la défense des droits du monde du travail, de la collectivité contre les intérêts parasitaires de ce club de milliardaires, contre ce gouvernement corrompu parce qu’entièrement à leur service.
Galia Trépère
* Paru dans Hebdo TEAN 64 (15/07/10).