Alors que les Etats-Unis lancent un fonds pour l’agriculture au Sud,
le CADTM rappelle le rôle désastreux de leurs subventions agricoles
à l’exportation
Timothy Geithner, secrétaire au Trésor des Etats-Unis, vient de lancer un
nouveau fonds nommé « Programme global pour l’agriculture et la sécurité
alimentaire » doté de 475 millions de dollars. Après de belles phrases sur
le sauvetage des banques et de l’économie, il fait le parallèle avec la
lutte contre la faim et souhaite que ce fonds vienne sauver l’agriculture
dans les pays pauvres. Ce combat lui semble être un devoir moral et une
nécessité pour assurer la stabilité du monde, dans lequel un milliard de
personnes sont sous-alimentées, ce qui ne serait plus acceptable pour le
gouvernement Obama.
Pour le CADTM, Geithner oublie un peu vite que pendant ce temps, les
subventions agricoles des Etats-Unis à leurs producteurs sapent les
fondements mêmes de l’agriculture du tiers-monde. Et les montants de ces
subventions sont autrement plus conséquents : environ 90 milliards de
dollars par an. Par ailleurs, les Etats-Unis, comme l’Union européenne,
maintiennent des barrières douanières qui empêchent souvent les
productions agricoles des pays en développement de pénétrer librement sur
leur marché.
Dans le cadre de la mondialisation néolibérale, subventionner lourdement
une agriculture exportatrice revient à coup sûr à organiser une
concurrence déloyale qui ne pourra qu’appauvrir les plus faibles. C’est
ainsi que Haïti est devenu totalement dépendant du riz américain
subventionné le jour où il a été contraint par la Banque mondiale de
baisser ses barrières douanières, alors qu’il était quasiment
autosuffisant auparavant. Cela s’est révélé catastrophique en 2008 quand
les prix du riz ont flambé.
Parmi les mesures soutenues pas le gouvernement des Etats-Unis, le
développement des OGM figure en bonne place. La Banque mondiale, dont les
exigences ont entraîné le sacrifice de l’agriculture vivrière au Sud, est
appelée en renfort par Washington. Pourtant, l’expérience de ces 30
dernières années indique clairement que l’agriculture paysanne et vivrière
est de loin la meilleure solution pour répondre aux problèmes de la faim
et de la pauvreté qui sévit dans les campagnes des pays du Sud. Si elle
est certes capable de nourrir les populations, elle a le défaut aux yeux
de l’agrobusiness de ne pas dépendre d’achats d’intrants à l’étranger.
Le CADTM dénonce l’idée de Geithner et de la Banque mondiale qui est de
connecter les agriculteurs de tous les pays au marché alimentaire mondial
avec un modèle productiviste et biotech dont les Etats-Unis sont les
champions. Bill Gates, grand promoteur des OGM à travers sa fondation, a
d’ailleurs été remercié par Geithner pour son implication financière dans
ce fonds. La logique sous-jacente est donc toujours bien de livrer
l’agriculture du Sud aux appétits des grandes sociétés transnationales.
Pour le CADTM, le système agricole productiviste est un très fort émetteur
de gaz à effet de serre, qui détruit la fertilité des sols et qui n’a
jamais enrichi les petits producteurs, ni au Nord ni au Sud, pas plus
qu’il n’a alimenté les populations pauvres. Parce que tel n’est pas son
but. En revanche, il enrichit les sociétés de l’agrobusiness et plaît aux
grands créanciers. Le CADTM y voit autant de raisons de le refuser.
Contacts :
Damien Millet, porte-parole du CADTM France,
france cadtm.org
Eric Toussaint, président du CADTM Belgique,
international cadtm.org
Juan Tortosa, porte-parole du CADTM Suisse,
suisse cadtm.org