Le résultat est sans appel : la droite au pouvoir a essuyé un échec cuisant et il faut s’en réjouir. Une victoire, même relative, au premier tour des régionales aurait conforté Sarkozy dans la poursuite de sa politique de casse sociale. Le score des européennes (même médiocre au regard de la participation aux votes) avait incité l’équipe au pouvoir à accélérer les mauvais coups. Avec 26 % environ des suffrages exprimés, elle est derrière le Parti socialiste dans quasiment toutes les régions, sans aucune réserve de voix pour le second tour. Même les huit ministres en lice ont été défaits, parfois plus que les autres candidats de l’UMP. Une preuve de plus que, malgré les enjeux régionaux, c’est bien la politique du pouvoir qui a été désavouée.
L’impopularité grandissante de ce gouvernement et de son président qui se croyait tout-puissant, explique ce mauvais score électoral de l’UMP. Dimanche dernier, une partie de l’électorat a souhaité sanctionner la politique dévastatrice de Sarkozy et Fillon. Aussi l’idée du « tout sauf Sarkozy » a grandi : si on ne peut pas, pour l’instant, arrêter les attaques de la droite dans la rue, on peut la sanctionner dans les urnes. Le vote utile, doublé d’un vote sanction, a fonctionné à plein, plus qu’une adhésion de fond en faveur du Parti socialiste.
Ainsi, le PS rafle la mise et, dans une moindre mesure, Europe Écologie qui réussit moins bien qu’en juin 2009, obtient autour de 12 % des voix. Les aspirations écologistes légitimes de la population expliquent ce résultat, même si Europe Écologie n’incarne en rien un parti « anti-système », différent de la gauche institutionnelle aux manettes dans les régions.
Et si beaucoup pensent, dans ce pays, que les élections ne changent rien, ils n’ont pas fait payer au PS et à ses alliés la gestion, en réalité libérale, des régions et ce, d’autant que le PS s’est bien attaché à ne pas mener de campagne électorale. Sa posture étant uniquement celle d’un parti gestionnaire qui sait bien tenir les cordons de la bourse !
Pour marquer son ras-le-bol, il a paru plus « utile » alors de saisir un bulletin PS, voire EÉ. Le type même de scrutin (absence de proportionnelle, donc peu de chances de faire élire des représentants de partis politiques plus petits et non présents dans les institutions) amplifie le phénomène.
Mais ce qui marque à nouveau cette élection, c’est évidemment l’abstention massive (autour de 54 %, un chiffre jamais atteint aux régionales). Que révèle-t-elle ? Elle confirme un désamour profond et durable entre une grande partie de la population, la classe politique et ses institutions.
À quoi sert de voter si on ne voit jamais d’amélioration dans son quotidien ? Certes, tous les partis sont concernés et ont été touchés par l’abstention. C’est pourtant encore et toujours parmi les classes populaires, au sein de la jeunesse que l’on s’abstient le plus. C’est-à-dire ceux et celles pour qui la note de la crise est particulièrement salée. Ce mouvement abstentionniste semble profond et risque d’être durable. La crise actuelle avec ses conséquences sociales désastreuses ne peut qu’approfondir la tendance.
Dans ce contexte, comment s’étonner du score du Front national. Si ce « retour » du FN a de quoi inquiéter, ce n’est malheureusement pas une surprise. Si les frontistes ont repris du poil de la bête (immonde), ils le doivent en partie à l’UMP avec son débat glauque et nauséabond autour de l’identité nationale et sa désignation haineuse de boucs émissaires que l’on va toujours chercher, en période de crise, du côté des immigrés, des sans-papiers et des jeunes des quartiers, et non pas des capitalistes fauteurs de crise. Au-delà des élections, il est urgent et nécessaire de reconstruire un front antifasciste et antiraciste large.
Pour la suite, même si on ne se fait aucune illusion sur l’alliance électorale de type gauche plurielle qui se dessine aujourd’hui entre le PS, Europe Écologie et le Front de gauche, et même si la défaite de la droite dimanche 21 mars est quasi annoncée, il faut qu’elle soit la plus cinglante possible : le NPA appelle donc à battre la droite et l’extrême droite dans toutes les régions. À nous de convaincre maintenant que cela ne sera pas suffisant et que les prochains rendez-vous devront être sociaux et dans la rue.
Myriam Martin