Avec quel parti seriez-vous prêt à faire alliance au second tour ?
Gérard Onesta : Nous avons toujours envisagé un partenariat avec le PS comme étant probable – si ce n’est naturel – tant il est évident que les politiques socialistes ont besoin des écologistes pour évoluer. Mais impossible d’obtenir une quelconque assurance sur la clé de répartition des responsabilités, le PS semblant avoir une interprétation très personnelle du mot “proportionnelle”. Plus grave, il ne souhaite aucune confrontation – publique ou privée – sur le fond pendant la campagne, renvoyant un éventuel accord programmatique à un “bidouillage” bâclé en quelques heures au soir du premier tour. Si son bilan est si bon, pourquoi Martin Malvy, le président sortant, ne vient-il pas le confronter à notre projet ? En démocratie, pour mener un débat, il faut être deux. Où est donc le deuxième ? Pour corser l’affaire, le PS toulousain vient de déchirer l’engagement qui le liait aux Verts et à la population sur la question des transports. Comment dès lors convaincre notre électorat de l’intérêt de signer un nouvel accord, si le PS n’apporte aucune garantie de fiabilité ? Nous sommes donc amenés à envisager désormais sereinement un second tour “plus ouvert”…
Chacun peut en effet observer que le Front de gauche et Europe Écologie partagent les trois mêmes objectifs : battre résolument la droite et le libéralisme, modifier profondément le rapport de force à gauche, et porter des projets vraiment alternatifs à la logique du système en crise. Le NPA n’est pas loin de dire la même chose, la répulsion d’avoir à gouverner en prime. Le complexe attelage politique de cette gauche-là va-t-il vraiment faire vivre cette autonomie retrouvée et saluée par sa base, ou va-t-il se précipiter dans les bras du PS alors même que les urnes seront encore tièdes ? Difficile à dire. En ce qui nous concerne, nous sommes cohérents et pouvons déjà dire qu’un tel partenariat pourrait être fécond pour pousser les socialistes à tuer leur vieux démon hégémonique.
Que retenez-vous, dans votre région, de la mandature qui se termine ?
Gérard Onesta : Midi-Pyrénées est une des très rares régions où le PS a fait barrage – refus de fusion de liste – à l’entrée des écologistes au conseil régional. Le bilan s’en ressent. Certes des lycées ont été construits, des rails posés, et des projets de toute taille ont reçu leur enveloppe financière. Mais derrière cette gestion notariale, on a du mal à lire une ambition politique de nature à répondre aux crises en cours ou à venir.
Notre région n’a pas su corriger ses déséquilibres structurels. Toulouse est en expansion effrénée, les villes moyennes marginalisées, et la ruralité en déshérence. L’an dernier, le taux de chômage est passé de 7 % à 9 %. Notre région ne s’est en rien préparée à affronter la société du “post-pétrole”, alors qu’elle doit aussi relever un déficit générationnel car un quart de sa population active et des dirigeants de ses PME approchent ou dépassent les 60 ans. Au-delà de la monoculture d’Airbus – arbre fragile qui cache mal une forêt clairsemée – notre région rayonne peu sur le plan économique et, malgré de beaux atouts, quasiment pas sur le plan culturel. A part quelques amateurs de rugby, la plupart des étrangers ont du mal à situer Midi-Pyrénées sur la carte.
Si l’on doit retenir une seule chose de cette mandature, c’est surtout l’incapacité d’anticiper les problèmes.
Quelle est votre priorité pour la prochaine ?
Gérard Onesta : Changer de logiciel politique. Comprendre que derrière la crise il y a une opportunité pour une société nouvelle et apaisée, à condition de faire sortir le développement durable des simples discours. Il faut lancer la révolution verte de l’économie, qui est une vraie mine d’or en termes d’emplois, de santé et de bien-être social : relocalisation de l’emploi, circuits courts, agriculture bio, refonte du parc immobilier, rééquilibrage territorial, éco-conditionalité des aides, économies sociale et solidaire, énergies renouvelables, sauvegarde de la biodiversité et du climat, transports publics, il y a tant à faire…
Propos recueillis par Eric Nunès