Le Code de Travail en Iran
En Iran, comme dans le reste du monde, le néolibéralisme a pour cibles les conditions du travail et les acquis sociaux. Une des cibles principales de cette attaque est le Code de Travail. Malgré que les travailleurs aient joué un rôle déterminant pendant la révolution qui a renversé le régime du Shah, sous le régime Islamique, le monde du travail n’avait même pas un Code de Travail pendant 11 ans.
A la suite d’une décennie de lutte, un Code de Travail, garantissant les intérêts de capital, a été adopté. Cependant cette loi a été jugée encombrant pour la mis en place des politiques néolibérales. Le régime en le modifiant a en fait exclu une majorité considérable des salariés de champs d’application de cette « loi ».
En premier lieu, les entreprises de moins de 5 employés en sont exemptées. Un peu plus tard, une autre décision a limité les champs d’application du « code » aux entreprises ayant plus de 10 salariés. En outre, les salariés en CDD ont été déclarés non bénéficiaires du ’Code". Ainsi, près de 70% des travailleurs du pays s’est trouvé hors du champ de la couverture du Code de Travail. Désormais, ils ne peuvent profiter ni de la couverture sociale ni du droit de chômage et ni de la retraite. Parmi les changements dans le Code de Travail on trouve :
• Seul l’employeur peut prendre la décision du processus de licenciement ;
• Durcissement de l’enregistrement légal des organisations gouvernementales afin de se débarrasser même de leurs ingérences ;
• L’effectif « réel » des petites entreprises sera basé uniquement sur la déclaration des patrons. Cela leur permettrait de sortir du champ d’application de Code du Travail en déclarant un effectif de moins de 10 salariés
• Diminution des CDD de 3 mois en 1 mois permet aux patrons de licencier sans paiement de dommage au bout de 29 jours.
• Remplacement de l’Inspection du Travail issu du Ministère du Travail par des pseudos organisations fascisantes dans le but de mettre de « l’ordre » dans les milieux du travail.
Parmi les travailleurs des pays industrialisés, un discours erroné a fait son chemin selon laquelle les travailleurs des pays de l’est et de l’Asie de sud-est ont pris leurs emplois. Les propagandes néolibérales prétendent que la mondialisation améliorera la condition de vie des travailleurs du « tiers monde ». Alors que le but de la « délocalisation » est la recherche de main-d’œuvre bon marché.
Le Néolibéralisme rapproche le niveau de vie des travailleurs des pays « riches » à ceux des travailleurs des pays du « tiers monde ». Quand les travailleurs des pays industrialisés du « Nord » perdent leurs emplois, les travailleurs du « Sud » engloutissent dans la pauvreté et la misère, une situation digne d’esclavage moderne.
Les travailleurs des pays occidentaux doivent défendre un niveau de vie décent pour les travailleurs des pays limitrophe pour pouvoir sauvegarder les niveaux qui sont les leurs. Les travailleurs du « Nord » et du « Sud » ont des intérêts en commun, et leurs solidarités réciproques sont les garants de leurs avenirs.
Peine de Prison pour la Participation au 1er Mai
En 2004, plusieurs ouvriers qui envisageaient organiser un défilé non gouvernemental au 1er Mai, ont été arrêtés par les agents de République Islamique au Saghéz (Ville de Kurdistan).
En novembre 2005, les peines de prison ont été prononcées envers eux : Un ouvrier a été condamné à 5 ans de prison et 3 ans d’interdiction de séjour, le deuxième à 3 ans et 3 autres à 2 ans de prisons. Leur délit était d’avoir tenté d’organiser un « rassemblement illégal ».
Aux yeux du régime islamique d’Iran, l’organisation des défilés ou des rassemblements au premier mai est considérée « illégale », comme toute autre réunion publique. Les travailleurs peuvent participer seulement aux défilés ou aux meetings organisés par les organes policiers ou le ministère de l’Information et répéter les slogans officiels. Pourtant, malgré la répression et les menaces de prison et de licenciement, les travailleurs essaient, d’une manière ou autre, organiser les fêtes du travail et faire entendre leurs revendications.
A la suite d’une campagne internationale d’envergure de solidarité avec les syndicalistes de Saghez,et surtout les pressions exercées sur le régime par le mouvement ouvrier iranien, il a fini par annuler les condamnations des ouvriers en mai 2006.
Mais, quelques mois plus tard, les mêmes ouvriers ont été « jugés » et condamnés aux peines de prison.
Ainsi, M. Mahmoud SALEHI a été condamné à 4 ans de prison ferme, M.Djalal HOSSEINI à 2 ans de prison ferme et M. Borhan DIVARGAR à 2 ans de prison ferme (par contumace étant donné qu’il se trouve à l’étranger).
Ces dernières années, la lutte des travailleurs iraniens a franchi un palier, leurs luttes et efforts en vue de créer leurs syndicats indépendants ou les organisations professionnelles autonomes ont eu comme réponses une répression plus féroce, des agissements les plus inhumains et arbitraires.
Face aux brutalités du régime, les travailleurs iraniens résistent, et cela, malgré la législation en rigueur qui leur interdit de s’organiser. Dans ces luttes ils comptent sur les soutiens des travailleurs, des syndicats, des partis progressistes à travers le monde.
Non à l’écrasement du mouvement ouvrier iranien !
Libérez les ouvriers emprisonnés !
La situation des Travailleurs en Iran en 2006
Jamais dans l’histoire de L’Iran, le fossé qui sépare les plus riches des plus pauvres n’a été si grand. Quelques 15 millions iraniens vivraient sous le seuil de pauvreté. Selon le Parviz Davoudi, le conseiller de président de la république, plus de 4.5 millions d’Iraniens vivent avec un dollar par jour. Les salariés en général et les travailleurs en particulier sont les premières victimes de cette situation et elle ne cesse de s’aggraver.
Alors que l’inflation atteint chaque année presque 20% les salaires ne bougent quasiment pas. L’appauvrissement constant de la population s’accompagne des mesures anti-sociales du gouvernement. Les travailleurs en font partie. Non seulement ils ne sont pas bien payés, mais en outre ils sont souvent payés avec retard, voire pas du tout payés pendant des mois.
Dans une telle situation le régime, partisan d’un libéralisme sauvage, a, à plusieurs reprises, modifié le Code du travail pour le rendre plus favorable aux patronats. Dernier exemple : les entreprises de moins de 20 personnes ont été exemptés de l’application du Code du travail pour ce qui est la couverture sociale ou la nécessité de justifier une décision du renvoi. En approuvant ce loi, qui concerne plus de 80% de force de travaille, dont la majorité sont des femmes, le régime a renforcé l’atmosphère de discrimination dans le milieu de travail et a affirmé la double exploitation des femmes.
Dans ces conditions inhumaines il est tout à fait normal que les travailleurs iraniens ne se taisent pas. Depuis quelques années les ouvriers iraniens expriment leur ras le bol général à travers d’actes de contestation de toutes sortes : manifestations, grèves, sit-in et rassemblements. Mais la réponse du gouvernement est toujours la même : mensonge, fausses promesses, inattention et surtout répression. Il est allé même jusqu’à ouvrir le feu sur les ouvriers qui manifesté pacifiquement pour leurs droits les plus légitimes.
Face à une telle situation les travailleurs iraniens ont décidé de s’organiser pour donner un caractère collectif à leurs luttes. D’où l’émergence des premiers syndicats ouvriers après plus de décennies de répression étatique forte et de manipulation par des organismes contrôlés par le régime.
Le Syndicat de la Régie du transport de Téhéran (Vehed) est l’exemple flagrant de ce désire des travailleurs iraniens pour avoir leur propre organisations syndicales indépendantes. Mais face à cette tentative des travailleurs, la réaction du régime était la pire répression que l’on puisse imaginer : assaut contre le bureau de ce syndicat, arrestation de ses membres, emprisonnement de ses militants, attaque paramilitaire et policière aux ouvriers suivants les consignes des syndicats ainsi qu’à leurs familles et surtout l’arrestation, la condamnation et l’emprisonnement de son leader, Mansour Ossalou.
La liste des violations des droits des travailleurs iraniens serait très longue mais pour n’en évoquer que les cas les plus récents on peut citer :
• Les militants ouvriers MMs.Mahmoud Salehi, Jalal Hosseyni et Mohsen Hakimi, qui avait auparavant été jugés et acquitté par le régime pour avoir participé aux cérémonies du 1 Mai 2004, ont été a nouveau arrêtes et rejugés pour les mêmes accusations. Le régime a condamné M.Mahmoud Salehei à 4 ans de prison ferme et MM.Jalal Hosseiny et Mohsen Hakimi chaque à 2 ans de prison ferme.
• En ouvrant le feu sur les ouvriers contestataires de Bandar Deylam (au sud de l’Iran), l’un des ouvriers, au nom de M.Baron Haghighat a été tué sur le champ.
• En novembre 2006 les agents du service de sécurité iraniens ont kidnappé de nouveau Mansour Ossalou, le président du Syndicat des ouvriers de la Régie de Transport de Téhéran (Vahed), et l’ont conduit à la prison. Il a été libéré un mois après, après une intense compagne internationale pour sa libération. Une fois libéré il a révélé qu’au moment de son arrestation forcée 9 personnes l’avaient rué des coups essayant de l’étrangler par son écharpe.
• Le dimanche 3 décembre 2006 trois ouvriers de la Régie Vahed étaient en train de distribuer les tracts de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) à la gare Khavaran (au sud de Téhéran) lorsqu’ils ont été arrêtés.
• Vaste programme de renvoi forcé des ouvriers afghans vers leur pays.
• M.J.Moradi, responsable de « l’Association Professionnelle des Ouvriers de Câble et de Métaux » de Kermanshan, a été convoqué au tribunal pour avoir participé dans la marche du 1er Mai 2006, de même que 17 ouvriers de la Régie Vahed, convoqués pour le même motif.
• Des actions organisées afin d’installer la loi de jungle dans les relations de travail sous le nom de la réforme du Code de travail en vue de donner une liberté totale aux patronat pour licencier des travailleurs, priver les salariés de leurs droits les plus fondamentaux et la répression de toute contestation collective.
• Les ouvriers de la Régie Vahed, qui ont été suspendus de leur emploi en raison de leurs activités syndicales, sont toujours privés du droit de retour au travail.
• Le refus obstiné des revendications légitimes des travailleurs reconnus au niveau international tels que : la reconnaissance de constitution d’organisations ouvrières indépendantes ; salaire égal pour un travail égale pour homme et femme ; paiement des droits de chômage, garantir la sécurité du travail et etc.…
Cette lutte acharnée des travailleurs iraniens face à un des régimes le plus répressifs du monde, continue toujours à un prix fort cher qu’ils paient de leur vie. Mais cette lutte mérite le soutien de tous les travailleurs du Monde, surtout ceux de pays démocratiques, où les syndicats libres peuvent exprimer leurs revendications et trouver des moyens légaux de pression sur le gouvernement iranien de façon à ce qu’il respecte les droits ouvriers reconnus au niveau international.
Vive La solidarité internationale !
Les étudiants se tournent vers les travailleurs
Le 7 décembre 1953 trois étudiants iraniens sont assassinés par le police du shah lors d’une grande manifestation de protestation contre la visite de Nixon, le vice président des USA venu soutenir le Shah et fêter le succès du coup d’Etat organisé par la CIA contre le gouvernement national de Dr Mossadegh. Depuis cette année le mouvement estudiantin iranien commémore ce jour comme « Le Jour de l’Etudiant », bravant touts les interdits, les menaces et la répression des régimes en place ; monarchique ou théocratique. Chaque année, à cette occasion, les militants s’expriment et donnent le ton et les slogans qu’ils considèrent comme essentiel pour l’avenir immédiat et la stratégie à long terme. Force est de constater que tous les ans, ce sont les slogans de caractère démocratique et orientés essentiellement vers une défense générale des droits et libertés civiques et politiques, choses légitimes et fondamentales. Pendant des longues années les tendances radicales et de gauche étaient les forces motrices de ce mouvement qui, de facto, le dirigeait en payant un lourd tribut des prisonniers et des morts par balles ou sous la torture.
Avènement du mouvement dit « 2 Khordad », jour de la première élection de M. Khatami à la présidence, a provoqué des nouveaux clivages et dans l’euphorie de sa première élection, une domination des courants dits « réformistes », qui de près et ou de loin, soutenait M. Khatami.
Mais l’échec retentissant de M. Khatami a donné un coup d’arrêt à son mouvement, cela s’est traduit, avec un peu de retard, dans l’affaiblissement de ces courants parmi les étudiants. On sentait un frémissement, et depuis les idées clairement de gauche se font leur chemin. A l’occasion du 1er mai, les étudiants ont organisé, dans certaines grandes universités, des réunions et des séminaires où des militants du mouvement ouvrier et estudiantin ont pris la parole et ont souligné l’importance de la classe des travailleurs dans les mouvements de transformation sociale. Mais malgré cela il n’y avait pas une ligne affichée, avec des positions claires et tranchées qui pouvait montrer l’existence d’une tendance radicale de gauche avec des revendications bien définies.
Cette année, à l’occasion de « Jour de l’Etudiant », malgré une forte mobilisation et l’omniprésence des forces de sécurité et l’interdiction de toutes formes de rassemblements, les étudiants ont franchit à leurs habitudes tous ces interdits et ont commémoré, partout dans les universités. A Téhéran ils ont même forcé leur passage à travers des barrières montées par les forces de sécurité en se battant avec eux et les obligeant à reculer. Ils ont scandé des slogans contre le régime ; pour la défense des droits politiques et civiques ainsi que pour la libération des prisonniers politiques ; contre la menace d’une agression impérialiste et surtout pour une alliance entre les étudiants et d’autres secteurs de la population comme les femmes et les minorités nationales, avec une importance et place très particulière pour les travailleurs revendiquant l’union avec le mouvement ouvrier.
Parmi les tracts distribués il y avait un, qui a été très largement distribué, avec comme titre ; « L’université n’est pas une caserne ! ». Dans ce tract sont énumérés toutes les problématiques de la vie politique en Iran avec des propositions claires et une orientation pour une transformation radicale de la société iranienne. La défense des activités syndicales et surtout les syndicats ouvriers qui subissent une répression farouche de la part du régime islamique, est considérée comme centrale et le mouvement estudiantin est clairement considéré comme « allié stratégique du mouvement ouvrier ».En conclusion le tract met l’accent sur la défense des travailleurs arrêtés et harcelés ; sur la nécessité de mobiliser tous les syndicats des travailleurs et les organisations de défense des droits de l’homme dans le monde pour soutenir la lutte du peuple iranien ; et sur le devoir des étudiants de participer aux luttes des travailleurs, les femmes et les jeunes tout en pensant à leur rôle dans la solidarité internationale.
C’est la première fois qu’un tel programme de lutte est présenté par un groupe des étudiants. Un véritable tournant dans un milieu où, jusqu’ici, on mettait l’accent d’une manière exclusive sur la défense des libertés politiques sans faire allusion quelconque à la justice sociale, comme si il n’y a aucun lien entre ces deux axes de luttes dans un pays capitaliste comme la république islamique d’Iran. Nous ne pouvons que nous réjouir de l’apparition de cette tendance de la gauche radicale qui essaie de mener les étudiants à lutter sur deux axes interconnectés de la défense des libertés et la justice sociale.