Le 1er juin dernier, General Motors, numéro un mondial de l’industrie automobile jusqu’à une époque très récente, s’est mis sous la protection du chapitre 11 de la loi des Etats-unis sur les faillites. Un événement spectaculaire, mais qui est très loin d’être un effondrement pour les principaux actionnaires du trust. Bien au contraire, comme l’a d’ailleurs souligné l’administration Obama : « Aujourd’hui restera un jour historique pour l’entreprise : la fin de l’ancien General Motors et le début d’un nouveau. »
Ce « nouveau » General Motors, c’est l’Etat américain qui compte le faire émerger, avec l’argent des contribuables et de terribles sacrifices pour les salariés. Prévoyant de contrôler, pour une durée limitée – 60 à 90 jours – 60% de son capital, l’Etat américain va apporter à la nouvelle société créée spécialement pour reprendre les actifs les plus rentables du groupe 30,1 milliards de dollars – auxquels il faut ajouter 9,5 milliards de dollars des autorités canadiennes. Cet argent s’ajoute aux 20 milliards de dollars qu’il avait versés à la multinationale depuis le début de la crise.
Obama n’a pas fait mystère de ses intentions. Pour ceux qui pouvaient en douter, l’intervention de l’Etat n’a rien à voir avec une nationalisation. « En résumé, notre objectif, c’est de remettre GM sur pied, de nous tenir à l’écart et de nous désengager rapidement », a-t-il précisé. Cette aide colossale servira essentiellement, en effet, à restructurer. GM veut fermer onze sites et en mettre trois au chômage technique, supprimer 21000 emplois et réduire de 2600 le nombre de ses concessionnaires.
Cette restructuration n’est que la dernière d’une longue série, qui a fait passer les effectifs de 352000 salariés dans le monde en 2001 à 266000 fin 2007. Non content de licencier, GM s’était également attaqué aux droits sociaux de ses salariés en matière d’assurance maladie, de retraite et de salaire. En septembre 2007, le syndicat automobile UAW avait signé un accord au terme duquel l’UAW acceptait de prendre lui-même en charge un fonds, alimenté par l’entreprise et placé en Bourse, destiné à régler les dépenses de santé des salariés. L’accord stipulait également que GM remplacerait, d’ici 2011, le quart de ses salariés syndiqués par des salariés payés en dehors de la grille salariale, une main-d’œuvre qui coûterait deux fois moins cher en salaires et assurances sociales.
L’objectif était de concurrencer les constructeurs japonais implantés aux États-Unis, comme Toyota et Honda, qui avaient des coûts horaires inférieurs de près de 30 dollars à ceux des trusts automobiles américains. Devenant de fait patron d’une compagnie d’assurance maladie, le syndicat avait justifié cet accord auprès des ouvriers en faisant valoir la garantie que GM lui avait, disait-il, donnée qu’il ne fermerait pas d’usines aux Etats-Unis. Promesse ou pas, aujourd’hui, GM ferme des usines, licencie et veut passer de 62000 ouvriers syndiqués en 2008 aux USA à 38000 en 2011.