Afin « d’intéresser la partie », les grands médias cherchent à créer un peu de suspens dans cette campagne électorale européenne.
Donc, depuis quelques jours, la question récurrente, qui tourne en boucle, est : qui sera en troisième position ? Le Modem, de François Bayrou, ou Europe Ecologie de Daniel Cohn-Bendit ? Les protagonistes se prêtent d’ailleurs complètement au jeu en alimentant la polémique : Cohn-Bendit accuse Bayrou de détourner le scrutin européen en faveur de sa candidature présidentielle en 2012. A quoi Marielle de Sarnez répond en accusant Cohn-Bendit de… faire le jeu de Sarkozy ! Mais, derrière ce spectacle, il y a bien une réalité : la compétition entre deux courants politiques, d’autant plus farouche qu’ils ont en commun de nombreuses conceptions politiques (libéralisme tempéré et culte de l’Union européenne comme remède à tous les maux, par exemple), un même « cœur de cible » électoral (les catégories socioprofessionnelles diplômées supérieures) et qu’ils se disputent le même terrain politique : être, demain, le concurrent et partenaire privilégié du parti socialiste.
En forçant les Verts qui étaient assez largement en perte de vitesse à s’insérer – voire à se diluer … – dans une coalition sensiblement plus large, allant des écologistes les plus « environnementalistes » à José Bové, en passant par Eva Joly, l’icône de la lutte contre la corruption, Daniel Cohn-Bendit semble avoir réussi son pari : liquider ce qui, chez les Verts, pouvait subsister d’aspirations subversives et de culture mouvementiste, au profit d’une stratégie strictement institutionnelle. Et, forcément, quand l’idée d’un autre système que le système capitaliste devient « hors champs » et que la seule préoccupation est de dégager des majorités parlementaires transcendant les « clivages politiques », alors, très vite, on en rabat sur ses revendications et ses ambitions, même dans les domaines que l’on prétend incarner.
Ainsi, les Verts français et européens se réjouissent du « paquet climat » et de l’objectif de réduction de 20% de l’émission des gaz à effet de serre, alors qu’il s’agit là d’un objectif très insuffisant, tant pour les scientifiques que pour les écologistes de terrain. Et que dire des nombreuses déclarations de Cohn-Bendit en faveur de la dérégulation de l’énergie et la fin du monopole public d’EDF, sous prétexte que cela créerait de meilleures conditions pour une sortie du nucléaire ? Alors que cela n’aura pour unique conséquence que de confier le nucléaire au secteur privé…
S’agissant d’élections européennes, on retiendra aussi que les listes Europe Ecologie (comme d’ailleurs les listes socialistes), regroupant anciens partisans et adversaires du traité constitutionnel européen, en acceptent totalement le cadre antidémocratique et néolibéral. Comment ensuite s’étonner que Cohn-Bendit s’en prenne aux Verts italiens, coupables à ses yeux de ne s’intéresser qu’à la gauche, campant ainsi dans une hostilité excessive vis-à-vis de Berlusconi ?