Depuis septembre dernier, l’opinion stupéfaite a découvert un capitalisme complètement gangrené par les actifs toxiques. Au fil des mois, la crise n’a fait que s’étendre. Son point de départ – le système des subprimes – ne semblait pas de nature à faire basculer l’économie mondiale, de sorte que de nombreux observateurs se voulaient rassurants. Erreur ! Aujourd’hui, deux spécialistes de renom ne craignent pas d’affirmer que « le cours des choses est sans doute pire que pendant la Grande Dépression » [1]
La grippe nord-américaine pourrait réserver des surprises analogues. Les autorités nous disent que leur système de surveillance est parfaitement au point et que, si une improbable pandémie devait malgré tout se déclencher, nous serions fin prêts pour l’affronter. On peut douter de ces affirmations : selon le Washington Post, six jours après les premières mesures d’urgence au Mexique, le Centre US de contrôle des maladies (CDC) semblait encore ignorer l’apparition à ses portes d’une nouvelle souche du virus de la grippe [2]…
La qualité des services locaux de santé ? Le Monde rapporte que la région de Veracruz a connu récemment une épidémie de pneumonie, que les habitants ont attribuée aux nuées de mouches attirées par les charognes. Plusieurs personnes sont mortes sans que les autorités réagissent. On notera par ailleurs que le Mexique dispose de spécialistes compétents, mais pas de la technologie la plus sophistiquée, de sorte que des échantillons ont dû être envoyés au Canada pour analyse. Près d’une semaine a ainsi été perdue… au cours de laquelle le virus H1N1 n’a pas demandé l’autorisation de voyager.
Quant à la responsabilité de l’agrobusiness capitaliste, l’OMS la nie, mais il faudra bien se résoudre à admettre qu’elle est écrasante. Aux Etats-Unis, en 1965, 53 millions de porcs étaient élevés dans plus d’un million de fermes. Ils sont 65 millions aujourd’hui, concentrés dans 65.000 installations. Michael Pollan a décrit de façon poignante ces usines à viande qui ressemblent davantage à des camps de la mort qu’à des fermes [3]. Des animaux nourris contre-nature, entassés dans des halles surchauffées et putrides, ont forcément un système immunitaire affaibli et constituent un milieu de choix pour l’apparition et la propagation des maladies.
La crise économique nécessite des mesures anticapitalistes radicales, pas seulement des mesures de régulation. De même, la menace sanitaire ne peut être écartée qu’en mettant en cause radicalement cet agrobusiness capitaliste toxique et cruel, assoiffé de profit et indigne de notre humanité.