Agée de neuf ans, la petite Brésilienne a avorté après avoir été abusée par son beau-père. Elle était enceinte de jumeaux. L’archevêque de Recife a également excommunié toute l’équipe médicale qui a pratiqué l’intervention.
Le cardinal Giovanni Battista Re, préfet de la congrégation pour les évêques, a justifié l’excommunication de la mère d’une Brésilienne de 9 ans ayant avorté après avoir été violée. Les jumeaux qu’elle portait « avaient le droit de vivre », estime-t-il dans un entretien à La Stampa.
Jeudi, l’archevêque de Recife a excommunié la mère de l’enfant, qui a avorté de jumeaux alors qu’elle était enceinte de quinze semaines, à la suite d’un viol par son beau-père. L’excommunication a été étendue à toute l’équipe médicale qui a pratiqué l’opération.
« Il faut toujours protéger la vie »
« C’est un triste cas, mais le vrai problème est que les jumeaux conçus étaient deux personnes innocentes, qui avaient le droit de vivre et qui ne pouvaient pas être supprimées », a déclaré Mgr Re, qui est également président de la Commission pontificale pour l’Amérique latine. « Il faut toujours protéger la vie, l’attaque contre l’Eglise brésilienne est injustifiée. »
« L’excommunication pour ceux qui ont provoqué l’avortement est juste », car cette opération constitue « toujours la suppression d’une vie innocente », a commenté le préfet de la congrégation pour les évêques, notamment compétent pour élire des évêques.
Lula déplore l’excommunication
Vendredi, le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva avait vivement critiqué l’excommunication, « déplorant profondément en tant que chrétien et catholique qu’un évêque de l’Eglise catholique ait un comportement aussi conservateur ».
La grossesse de la fillette comportait de hauts risques et mettait la vie de l’enfant en danger. L’interruption volontaire de grossesse est toujours interdite au Brésil, sauf en cas de viol ou de danger pour la vie de la mère.
(Source AFP)
Chronique : Journée de la femme
par Robert Solé
A Kandahar (Afghanistan), des femmes portant la burqa sont sorties en public, le 8 mars, avec un foulard posé sur la tête. Cela a été interprété comme un appel à plus de justice. Mais ne voulaient-elles pas, au contraire, attirer l’attention sur les insuffisances du voile intégral ? Les musulmans intégristes feraient bien de réfléchir au moyen de rendre les femmes un peu moins provocantes. Ne faudrait-il pas les enfermer dans des sarcophages ?
Les catholiques, eux, gagneraient à lire plus souvent L’Osservatore Romano. Le journal du Vatican a rendu un vibrant hommage au lave-linge, qui a été déterminant pour l’émancipation de la femme occidentale : bien plus, selon lui, que le travail hors du foyer, la pilule et - cela va sans dire - l’avortement. A ce propos, une Brésilienne de 9 ans, qui attendait des jumeaux après avoir été violé à plusieurs reprises par son beau-père, a subi une IVG. L’archevêque de Recife a aussitôt excommunié la mère de la fillette, ainsi que l’équipe médicale. L’avortement, a-t-il expliqué, est plus grave que le viol. Le beau-père, lui, fait toujours partie de l’Eglise. Mais il devra se confesser, bien sûr, pour que la machine ecclésiastique lave ses péchés.
Robert Solé
* Article paru dans le Monde, édition du 10.03.09. LE MONDE | 09.03.09 | 13h29.
Le Vatican célèbre la Journée de la femme en louant le lave-linge
« Au XXe siècle, qu’est-ce qui a le plus participé à l’émancipation des femmes occidentales ? », s’interroge la journaliste Giulia Galeotti.
Plus que la pilule, la machine à laver ! L’Osservatore Romano a célébré la Journée de la femme à sa façon en estimant que le lave-linge était l’un des objets qui a « le plus participé à l’émancipation des femmes occidentales au XXe siècle », rendant un vibrant hommage à ladite machine.
Dans son édition du dimanche 8 mars, sortie samedi soir, le journal intitule un article « La machine à laver et l’émancipation de la femme – ’Mets la lessive, ferme le couvercle et détends-toi’ », en référence au manuel d’utilisation d’un des premiers modèles. « Au XXe siècle, qu’est-ce qui a le plus participé à l’émancipation des femmes occidentales ? », s’interroge la journaliste Giulia Galeotti. « Le débat est encore ouvert. Certains disent que c’est la pilule, d’autres la libéralisation de l’avortement, ou encore le fait de travailler hors du foyer. D’autres, cependant, se permettent d’aller encore plus loin [et proposent] : la machine à laver », écrit-elle.
« CHANGER ’LES DRAPS DEUX FOIS PAR SEMAINE’ »
Remontant aux origines de la machine à laver – l’invention en 1767 par le théologien allemand Jacob Christian Schaffern d’un premier modèle rudimentaire –, le quotidien du Vatican évoque « la sublime mystique de pouvoir changer ’les draps deux fois par semaine au lieu d’une’ », phrase qu’il attribue à la célèbre féministe américaine Betty Friedan.
« Au début, les machines étaient très encombrantes. Mais rapidement, la technologie mit au point des modèles plus stables, légers et efficaces » et on eut « l’image de la super-femme au foyer, souriante, maquillée et radieuse parmi les appareils électroménagers de sa maison », écrit l’Osservatore. « Les femmes n’ont pas lésiné sur les louanges à leur sauveuse », cette machine à laver qui a même « récemment été célébrée » par la chanteuse britannique Kate Bush, qui dans son morceau Mrs Bartolozzi part dans des rêveries en regardant tourner son linge, souligne le quotidien.
* LEMONDE.FR avec AFP | 09.03.09 | 13h36 • Mis à jour le 09.03.09 | 13h51.
L’excommunication de médecins brésiliens aggrave le trouble des catholiques
Dans la hiérarchie catholique, l’embarras est palpable ; chez nombre de fidèles, la consternation le dispute à l’indignation. Partout l’incompréhension domine. L’excommunication prononcée jeudi 5 mars par un évêque brésilien contre la mère d’une fillette de 9 ans, enceinte de jumeaux à la suite d’un viol, et contre les médecins qui ont pratiqué l’avortement continue de susciter une réprobation générale dans l’opinion publique.
Le soutien du cardinal Giovanni Battista Re, préfet de la Congrégation pour les évêques au Vatican, à son confrère brésilien laisse sans voix de nombreux responsables religieux. Interrogé samedi 7 mars par le quotidien italien La Stampa sur le sort de la petite Brésilienne, ce proche collaborateur de Benoît XVI a déclaré : « C’est un triste cas, mais le vrai problème est que les jumeaux conçus étaient des personnes innocentes, qui avaient le droit de vivre et qui ne pouvaient pas être supprimées. L’Eglise a toujours défendu la vie et doit continuer à le faire, sans s’adapter aux humeurs de l’époque ou à l’opportunité politique. »
Cette nouvelle décision controversée intervient alors que nombre de catholiques n’ont pas encore digéré les effets désastreux du décret du 21 janvier, signé du même cardinal Re, qui levait les excommunication d’évêques intégristes, dont un prélat négationniste. L’affaire du Brésil risque de ternir un peu plus l’image de l’Eglise, et surtout d’accentuer le décalage qui semble s’installer entre les idéologues du Vatican et les croyants, y compris chez les prêtres et au sein d’une partie de la hiérarchie.
« Après la réception négative de la levée des excommunications des intégristes, notamment en France, un fossé inquiétant se creuse entre le Vatican et les fidèles », confirme l’historien Philippe Levillain, auteur de l’ouvrage Le moment Benoît XVI (Fayard).
En sortant cette dramatique affaire du seul contexte brésilien, dans lequel certains responsables catholiques auraient souhaité la cantonner, la caution venue du Vatican interroge directement la doctrine de l’Eglise sur la question de l’avortement - canoniquement puni d’excommunication automatique - et fait douter de la capacité ou de la volonté du gouvernement de l’Eglise à parler aux croyants.
Certains, même parmi les plus fervents soutiens du Vatican, déplorent que les tenants d’une pensée rigide, réactionnaire, voire obscurantiste, présents dans l’entourage du pape, prennent désormais le pas sur ceux soucieux de faire la part entre l’enseignement doctrinal de l’Eglise, notamment en matière de moeurs, et son adaptation au terrain. Une adaptation prisée par les fidèles et intégrée par beaucoup de prêtres depuis des années.
« Avec cette nouvelle affaire, le pontificat de Benoît XVI est en train de devenir le pontificat tragique de l’incompréhension, analyse M. Levillain. Et, même si le pape n’est pour rien dans la dernière affaire en date, on ne peut que constater le paradoxe entre la levée des excommunications récentes - qui semblait signifier que le Vatican considérait ce principe comme obsolète -, et le recours à cette arme quasi médiévale dans le drame du Brésil. »
« Avec des déclarations comme celles du cardinal Re, on est face à un raisonnement essentialiste, ontologique, qui semble ne plus avoir aucune notion des situations concrètes », s’alarme aussi un évêque français. « Sous Jean Paul II, si les convictions étaient les mêmes, le système de pensée prenait davantage en compte la personne », ajoute-t-il. Certains n’hésitent pas à comparer la période actuelle à la crise de confiance qui avait suivi la publication de l’encyclique de Paul VI, Humanae vitae, en 1968. Ce texte prohibant toute forme de contraception avait amené nombre de catholiques à prendre leurs distances avec l’Eglise institutionnelle.
« Affligeant », lâche encore un évêque, visiblement affecté par une affaire qui lui a déjà valu des courriers électroniques de fidèles interloqués et des discussions dans son diocèse. « De telles prises de position sont tellement loin de l’Evangile ; il y a des fois où il vaudrait mieux se taire et se contenter d’accompagner la souffrance des gens », soupire-t-il. « L’Eglise est certes dans son rôle lorsqu’elle dit qu’il faut protéger la vie dès la conception, mais devant un tel drame, il faut porter une parole de compassion, pas excommunier », s’indigne cet évêque qui, comme beaucoup de religieux, a déjà spirituellement accompagné des femmes ayant avorté.
Signe du malaise que suscite cette affaire dans les milieux catholiques, le quotidien catholique La Croix y a consacré son éditorial, lundi 9 mars. Le journal y regrette que la « réaction de l’évêque brésilien, dans sa dureté légaliste, (aille) de fait à l’encontre du message de vie que l’Eglise veut faire entendre ». « Cette affaire donne des arguments à tous ceux pour qui le combat en faveur de la vie est une posture passéiste et ultra-consevatrice », déplore aussi le quotidien.
D’autres, comme lors de la main tendue par le pape aux évêques intégristes, préfèrent éluder le fond du problème et voir dans cette nouvelle polémique « un problème de communication et de fonctionnement de la curie ». Ils s’interrogent notamment sur le statut des déclarations du cardinal Re. « Parle-t-il en son nom propre ou au nom du pape ? Le pape cautionne-t-il sa position ? »
La gestion du dossier précédent a valu à Benoît XVI de nombreuses critiques, y compris en interne, sur les orientations et la gouvernance de l’Eglise catholique. Les atermoiements du Vatican, qui a tardé à condamner fermement l’évêque négationniste, et le manque d’explications pour justifier la volonté de ramener dans le giron de l’Eglise un mouvement opposé à une partie de son magistère, ont sapé l’autorité de Rome et mis en doute « l’infaillibilité » papale aux yeux de nombreux catholiques. Récemment, la conférence épiscopale allemande a, d’un ton inhabituellement ferme, demandé à Rome « des améliorations rapides dans le domaine de la prise de décision et de la communication avec les conférences épiscopales » et déploré que soit apparue à cette occasion une « incertitude quant au chemin de l’Eglise ».
Stéphanie Le Bars
* Article paru dans le Monde, édition du 12.03.09.
LES DEUX AFFAIRES QUI CHOQUENT
Le scandale Williamson. Le 22 janvier, Mgr Richard Williamson, évêque intégriste schismatique, déclare : « Je pense que 200 000 à 300 000 juifs ont péri dans les camps de concentration, mais pas un seul dans les chambres à gaz. » Deux jours plus tard, un décret lève l’excommunication de quatre évêques intégristes, dont Mgr Williamson. Le 4 février, le Vatican exige qu’il prenne « publiquement ses distances » avec ses déclarations. En vain.
L’avortement d’une fillette au Brésil. Le 5 mars, l’archevêque de Recife, Mgr José Cardoso Sobrinho, excommunie la mère d’une enfant violée et enceinte ainsi que les médecins ayant procédé à l’avortement. Le lendemain, le président Lula déplore cette décision. Le 7 mars, le cardinal Giovanni Battista Re, préfet de la Congrégation pour les évêques au Vatican, soutien son confrère brésilien.