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La liste des participant(e)s à la réunion se trouve en fin de compte rendu
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A l’invitation de membres du Parlement européen, une réunion s’est tenue à Bruxelles le jeudi 28 novembre. Elle avait pour objectif d’« avancer dans la mise en place du pôle européen du Réseau parlementaire international » initié à Porto Alegre en janvier 2001, de « faire le point » avant la troisième édition du Forum parlementaire mondial (les 22-24 janvier prochain), d’examiner les « résultats du Forum social européen de Florence » et de « débattre sur les perspectives du réseau ».
La réunion -présentée par Danielle Auroi (Verts/ALE), animée par Francis Wurtz (GUE/NGL) et conclue par Harlem Désir (PSE)- a été l’occasion d’un premier et fructueux échange général d’opinions sur les objectifs du Réseau, ainsi que d’une évaluation critique du Forum parlementaire mondial. Il ne s’agit ici que de donner un bref compte rendu de la réunion, en ne s’attachant qu’aux principales questions débattues et aux conclusions qui en ressortent, sans entrer dans le détail des interventions.
Les introductions au débat
L’une des préoccupations majeures de notre Réseau étant de lier l’activité des élus progressistes aux combats de la société civile et des mouvements sociaux, nous souhaitions la participation du Forum social européen à la réunion. Le débat général a été introduit par deux des animateurs de ce processus : Raffaella Bolini (Italie, militante d’Arci) et Christophe Aguiton (France, militant d’Attac). Résumons ici leurs présentations, en nous excusant de ce qu’un tel résumé implique de simplifications.
Pour Raffaella Bolini, les forums sociaux ne doivent pas se réduire à des « cérémonies de bonnes intentions » mais être des moments dynamiques d’un vaste processus militant. Avec, dans le cas du FSE, une difficulté particulière : les divergences au sein du mouvement s’expriment avec particulièrement de force au niveau européen. Elle s’est donc attaché à expliquer les choix (les « paris ») qui ont présidé à l’organisation du FSE de Florence et qui ont contribué à son remarquable succès. Assumer la confrontation franche d’opinions dans les débats. Associer à cette initiative tous les acteurs syndicaux et associatifs, les mouvements sociaux se trouvant au c ?ur du processus. Construire un consensus très large autour d’une alternative radicale et montrer ainsi que l’on peut être radical sans être minoritaire. Faire naître un « espace public européen » très ouvert, favorisant la formation « par en bas » d’une identité européenne qui ne saurait s’imposer « par en haut ». Le tout ayant été préparé par des assemblées ouvertes à tous (syndicats, associations, etc.) et qui se sont tenues dans différents pays européens pour intégrer aux prises de décisions le plus grand nombre d’organisations les plus diverses.
Puis Raffaella Bolini a formulé un certain nombre de suggestions à l’intention des élus : Participer aux prochains forums régionaux (Palestine, Asie...). Se rendre fin janvier à Porto Alegre pour le Forum parlementaire bien entendu, mais aussi pour le Forum social mondial et pour l’espace propre aux mouvements sociaux. A cette occasion, des rapports entre parlementaires et militants des mouvements sociaux pourront être noués par continents ou par campagnes pour éviter l’enfermement réciproque. Le plus urgent reste aujourd’hui de dire « Non à la guerre ! », sans que cette priorité ne s’oppose au combat pour les droits sociaux. Il nous faut construire ensemble, chacun dans son rôle, le premier moment de mobilisation mondiale contre la guerre.
Au niveau européen (construction de l’UE et intégration des pays de l’Est), les mouvements sociaux doivent savoir discuter de questions sur lesquelles il existe aujourd’hui des opinions très différentes. Par ailleurs, le lien entre les parlements nationaux et le Parlement européen apparaît souvent faible, ce qui pose problème aux mouvements : des initiatives peuvent être prises dans le cadre du PE qui ne trouvent pas d’échos dans les enceintes nationales.
Pour les parlementaires, il faudrait essayer de passer de l’idée de dialogue avec les mouvements à l’idée de travail en commun sur des campagnes, à la création d’une relation de travail en commun (voir l’exemple de la Taxe Tobin). Le développement de campagnes à l’échelle européenne devrait y aider.
Christophe Aguiton a commencé par introduire brièvement quelques éléments d’analyse sur le mouvement, notant que l’on est qu’au début d’un processus en pleine évolution où la question des alliances, des articulations, occupe une place clef ; qui a des points faibles par rapport à ce qui s’est passé dans les années 1960 (ampleur des clivages), mais aussi des points forts (implication de l’ensemble du syndicalisme et d’un très large éventail de mouvements associatifs). Vécue d’en bas, la mondialisation est avant tout perçue comme l’aggravation de la précarité sociale et la multiplication des catastrophes écologiques. C’est bien à ce vécu-là qu’il faut répondre.
Puis, Christophe Aguiton a présenté un certain nombre d’échéances militantes contenues, notamment, dans les deux appels issus de Florence :
* Contre la guerre. C’est bien l’urgence, vu le danger de guerre en Irak. La date du 15 février 2003 a été retenue pour des manifestations dans toute l’Europe. Mais il faut construire sans tarder le mouvement dans chaque pays européen. Des mobilisations très importantes ont déjà eu lieu dans certains pays (Italie, Grande-Bretagne...), mais ce n’est pas encore le cas dans d’autres (la France...) où des manifestations peuvent être organisées dès décembre. La réunion du FSM à Porto Alegre devrait être l’occasion d’initier une campagne mondiale incluant, notamment, les Etats-Unis. De même, en Europe, à la suite de Florence il doit être possible de mieux coordonner les initiatives pacifistes, telles que les missions civiles et la présence solidaire des parlementaires en Palestine.
* Le prochain G8. Du 1er au 3 juin 2003, à Evian. Une échéance très importante mais difficile (frontière franco-suisse, fêtes de l’Ascension, période d’examens universitaires...). En termes de délégations massives la France, la Suisse et l’Italie sont les premiers pays impliqués, vu leur proximité. La mobilisation devrait combiner des thèmes traditionnels d’action (sur la dette du tiers-monde et les rapports Nord-Sud par exemple) et une mise en cause de la légitimité même du G8.
* Commerce mondial et OMC. Il s’agit de rendre patent le constat d’échec (du point de vue de l’intérêt public) de l’OMC et, au fond, de bloquer le processus de libéralisation et de marchandisation du monde. Avec des échéances régulières dont mars (mobilisation sur l’AGCS) et septembre (conférence de Cancun, au Mexique).
* L’Amérique latine. C’est un dossier de grande actualité (Brésil, Bolivie, Equateur... Venezuela, Argentine, Colombie... ALCA...). Avec un enjeu politique considérable (montée des gauches). La responsabilité des Européens est engagée. Il faut interpeller nos gouvernements sur leurs politiques envers ces pays (y compris au sein du FMI) et poser publiquement la question de comment les aider. Il y a urgence : janvier-février.
* Les rendez-vous européens. L’objectif est de maintenir la dynamique ascendante du mouvement en associant de nouvelles forces (sociales et géographiques). Pour ce qui est des diverses campagnes, voir l’appel des mouvements adopté à Florence. Les échéances sont notamment rythmées par les sommets semestriels : Thessalonique en juin, Rome en décembre 2003. Nous partons des revendications telles qu’elles sont formulées par les mouvements. Mais il faut aussi projeter une alternative plus globale qu’un simple ensemble de revendications. Pour cela, des moments de réflexion sont nécessaires. C’est l’une des fonctions, en particulier, des forums sociaux européens (le prochain se tiendra en novembre à Paris-Saint-Denis), compris comme un processus où des convergences peuvent se construire progressivement et non comme un simple événement médiatique.
Un dernier point, mais important : pour faciliter leurs rapports avec vous, parlementaires, et votre réseau, les mouvements auraient besoin d’un « interlocuteur collectif ». Un petit secrétariat auquel on puisse s’adresser pour indiquer une urgence, communiquer une information, proposer une initiative (en sachant bien entendu qu’il ne nous sera pas toujours répondu).
Les thèmes marquants du débat
Présent à Bruxelles, le député bolivien Felix Santos, du MAS avait été invité à notre réunion. Il a expliqué la situation des communautés indiennes dans son pays, les difficultés auxquelles doivent faire face les nouveaux élus progressistes, dépourvus d’expérience parlementaire, et en a appelé à la solidarité de ses collègues européens. Une intervention qui entrait en résonance directe avec le point sur l’Amérique latine dans l’introduction de Christophe Aguiton.
Nous avions aussi invité des parlementaires africain et maghrébin, mais ils n’ont pu venir.
Après avoir remercié les animateurs du Forum social européen pour leurs contributions, et la façon dont ils ont « interpellé » les élus, la plupart des parlementaires présents sont intervenus dans le débat. Un large accord est apparu sur de nombreuses questions : la volonté de renforcer la capacité de dialogue et de coopération avec les mouvements sociaux -et de renouveler les formes d’action des parlementaires ; le choix de thèmes prioritaires de campagnes ; la nécessité de concevoir le prochain Forum parlementaire mondial de façon différente du précédent, la structuration du pôle européen du Réseau parlementaire.
Reprenons quatre points forts qui ressortent particulièrement des débats.
1. Une urgence : l’engagement contre la guerre
De nombreux intervenants ont souligné combien l’engagement contre le danger de guerre en Irak représentait aujourd’hui une urgence, la priorité des priorités.
Les mobilisations de la société civile sont d’ores et déjà en cours. C’est moins vrai des parlements, qui doivent être mobilisés eux aussi sur cette question.
2. Le Forum parlementaire mondial
La plupart des parlementaires présents avaient participé au second FPM (et un certain nombre au premier aussi). Ils ont jugé qu’en janvier dernier, la simple succession des interventions n’a pas permis de véritables dialogues et que les séances en plénière manquaient de ce fait singulièrement d’intérêt. De façon unanime, ils ont souhaité que le prochain Forum parlementaire soit organisé de façon très différente du précédent. Ceci concerne autant la forme (introduire un travail en atelier) que le contenu (donner des perspectives militantes pour l’année à venir). La nécessité d’un travail en atelier, notamment, a été soulignée.
Les propositions de Raffaella Bolini (que des relations de travail soient nouées à l’occasion du FPM entre le Réseau parlementaire et les représentants des mouvements sociaux) ont été entendues et appréciées.
Sur ces questions (combinaison d’ateliers et de plénières, choix de campagnes, préparation d’un calendrier d’activité, dialogue avec les mouvements...), des propositions doivent être prochainement envoyées à nos partenaires latino-américains, au nom du pôle européen du Réseau parlementaire international.
Rappel. Le prochain Forum parlementaire mondial se tiendra à Porto Alegre sur trois demi-journées : les mercredi 22 janvier (après-midi), jeudi 23 (matin) et vendredi 24 (après-midi). Le Forum social mondial commence le jeudi 23 janvier dans l’après-midi et se termine le mardi 28. Une réunion de travail sera organisée à Porto Alegre le 28 janvier dans l’après-midi pour mieux intégrer aux perspectives du réseau les conclusions du Forum social.
Le Forum parlementaire se réunira donc cette fois encore au sein du Forum social, ce qui manifeste une volonté de lier l’action des élus aux combats de la société civile. Mais deux des trois séances du FPM se tiendront avant l’ouverture du FSM, ce qui laissera les parlementaires libres de participer aux activités du Forum social.
L’inscription au FPM se fait sur le site Internet :
www.forumparlamentarmundial.rs.gov.br
3. L’organisation du pôle européen du Réseau parlementaire international
La création du Réseau parlementaire international a été initiée, dans son principe, à Porto Alegre dès janvier 2001, sur la base de la Déclaration finale du premier FPM. Son organisation par pôles régionaux a été définie lors du second FPM, en janvier 2002, et il a commencé à agir dans le cours de l’année (Déclaration « Rio + 10 », impulsion de la campagne AGCS, participation de parlementaires au FSE de Florence...). Mais il reste encore beaucoup à faire, même en Europe, pour organiser ce réseau et l’établir dans les divers pays.
Plusieurs intervenants ont souligné combien il était encore difficile de mobiliser les parlementaires nationaux sur les questions de la mondialisation libérale, alors même que les enjeux sont considérables. Les membres du Réseau parlementaire doivent évidemment agir pour changer cet état de choses (notamment en organisant des débats avec des experts ou des représentants des mouvements sociaux). Mais le rôle de la société civile peut ici aussi être très important : elle peut interpeller les élus sur cette question.
Des membres du Parlement européen ont participé dès l’origine à la préparation et l’organisation des Forums parlementaires de Porto Alegre ; ils se réunissent dorénavant très régulièrement pour faire vivre le Réseau. Une collaboration entre parlementaires européens et parlementaires nationaux doit maintenant être assurée bien mieux que cela n’est actuellement le cas (c’est l’objet même de cette réunion).
Il est proposé que dans chaque parlement national, des correspondant(e)s du Réseau soient désignés de façon à pouvoir assurer une collaboration permanente entre les parlements nationaux et le Parlement européen. Une fois cette collaboration établie, il sera possible d’animer beaucoup plus collectivement le pôle européen du Réseau... et d’offrir aux mouvements sociaux cet « interlocuteur collectif » qu’évoquait Christophe Aguiton en conclusion de sa présentation.
Une suggestion. Il serait bon de créer des adresses électroniques pour les responsables nationaux du réseau du type
Le lien entre tous les membres du réseau est assuré via la liste électronique
Outre l’engagement contre la guerre, le pôle européen du Réseau devra assurer le suivi des campagnes en cours (suites de Johannesburg, AGCS...), des mobilisations qui vont accompagner les sommets semestriels de l’UE et le Forum social européen. Il devra aussi voir comment intégrer à ses perspectives le calendrier d’activités qui sera discuté à Porto Alegre.
Pour préparer le prochain FPM et les activités du Réseau, il serait utile d’avoir un bilan de ce qui a déjà été fait dans chaque parlement (campagne taxe Tobin, etc.).
Pour l’heure, nous sommes limités par un problème pratique : il n’existe pas à proprement parler de secrétariat technique du Réseau ou de son pôle européen. Trois collaboratrices et collaborateur au Parlement européen assurent l’essentiel de ce qui est fait, mais ce n’est pas leur tâche officielle ou leur seule tâche, loin de là.
4. Les rapports entre élu(e)s, partis politiques et mouvements sociaux
La question des rapports entre partis politiques et mouvements sociaux est aujourd’hui très discutée, et fait problème, notamment en rapport avec les forums sociaux. C’est une question complexe, qui se pose sous des formes différentes suivant les régions et les pays.
Dans ses rapports avec le processus du Forum social mondial, le Réseau parlementaire international s’est engagé à respecter la Charte des principes du FSM pour qui les partis ne sont pas co-organisateurs des forums et pour qui les « politiques » ne doivent pas brouiller la visibilité d’une initiative de la société civile et des mouvements sociaux.
Plusieurs participant(e)s à la réunion ont souligné qu’il serait important d’engager une réflexion approfondie sur la question des rapports partis politiques, société civile et mouvements sociaux.
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Notons, en conclusion, que la liste électronique du RPI peut être et doit être utilisée par tous les membres du Réseau, et pas seulement par le secrétariat. Les participant(e)s à la réunion du 28 novembre qui le souhaitent peuvent ainsi compléter ce compte rendu en y diffusant leurs éléments de réflexion et leurs propositions.
Ont participé à la réunion :
Intervenants et invités : Christophe Aguiton (France), Raffaella Bolini (Italie), Felix Santos (Bolivie).
Membres du Parlement européen : Costas Allyssandrakis (GUE/NGL, Grèce), Danielle Auroi (Verts/ALE, France), Yasmine Boudjenah (GUE/NGL, FranceJean-Marie Dehousse (PSE, Belgique), Harlem Désir (PSE, France), Anne Ferreira (PSE, France), Ilda Figueiredo (GUE/NGL, Portugal), Hélène Flautre (Verts/ALE), Glyn Ford (PSE, UK), Caroline Lucas (Verts/ALE, UK), Pasqualina Napoletano (PSE, Italie), Camilo Nogueira (Verts/ALE, Espagne), Francis Wurtz (GUE/NGL, France), Olga Zrihen (PSE, Belgique).
Membres de parlements et sénats nationaux : Danielle Bidard (PC, France), Jean-Pierre Brard (app. PC, France), Valerio Calzolaio (DS, Italie), Pietro Folena (DS, Italie), Serge Janquin (PS, France), Begonia Lasagabaster (EA/ALE, Espagne), Jean-Claude Lefort (PC, France), Ulrike Lunacek (Verts, Autriche), Geneviève Perrin-Gaillard (PS, France), Roberta Pinotti (DS, Italie), Chantal Robin-Rodrigo (PRG, France), Claude Saunier (PS, France), Joan Saura (ICV Verts, Espagne).
Secrétariat au PE : Gaby Küppers (coll. Verts/ALE, Allemagne), Valérie Picquet (ass., PSE, France), Pierre Rousset (coll. GUE/NGL, France).
Collaboratrices et collaborateurs : Patrick Auzende (GUE/NGL, France), Frédéric Besnier (GUE/NGL, France), Alexandra Debaissieux (Verts/ALE, France), Catherine Dejour (Verts/ALE), Joaquin Denkinger (Verts/ALE, Allemagne), Paul-Emile Dupret (GUE/NGL, Belgique), Antonio Gambini (PSE, Belgique), Pedro Guerrero (GUE/NGL, Portugal), Lina Krokidi (GUE/NGL, Grèce), José Luis Linazasoro (Verts/ALE, Pays basque), Fabian Panzetti (PSE, Italie), Christina Platzer (PSE, Autriche), Frédérique Pondemer (GUE/NGL, France).
Se sont excusés de ne pouvoir être présents : Udo Bullmann (PSE, Allemagne), ), Carlos Carnero (PSE, Espagne), Michael Cashman (PSE, UK), Véronique De Keyser (PSE, Belgique), Genevieve Fraisse (GUE/NGL, France), Per Hilmersson (PSE, Suède), Richard Howitt (PSE, UK), Anne van Lancker (PSE, Belgique), Luigi Malabara (PRC, Italie), Lucio Manisco (GUE/NGL, Italie), Eric McNally (PSE, UK), Guido Sacconi (PSE, Italie), Francesca Sauqillo (PSE, Espagne), Karin Scheele (PSE, Autriche), Peter Skinner (PSE, UK), Maj Britt Theorin (PSE, Suède), Roseline Vachetta (GUE/NGL, France).