Université recherche... Mobilisations !
Les attaques contre le service public d’enseignement supérieur et de recherche viennent de connaître une nouvelle accélération.
Ces contre-réformes constituent un pas de plus dans le processus européen de marchandisation. Elles sont la conséquence logique de la LRU et entraînent un accroissement des inégalités sociales vis-à-vis de l’accès à la connaissance. À cela s’ajoutent la suppression de 900 postes, des baisses effectives de budget et une accentuation de la précarisation des personnels de toutes catégories.
Contre toutes ces attaques, la seule solution est la mobilisation, ici et maintenant. Pas dans des formules floues de « moratoire » qui s’en remettent à vers une future alternance sociale-libérale. La mobilisation a commencé. La grève du 29 janvier, aux côtés des autres secteurs en lutte, montre qu’il est possible d’inverser le rapport de force pour imposer une autre répartition des richesses, la sauvegarde et le développement des services publics, un emploi décent pour tou-te-s ! Le NPA soutient l’appel à la grève et la manifestation du 10 février.
La commission Université-Recherche du NPA
UNIVERSITÉ : Prendre de l’ampleur pour gagner
Les contre-réformes du gouvernement se heurtent à une mobilisation généralisée des universitaires et des étudiants.
Contre l’explosion du statut des enseignants-chercheurs, contre la pseudo « mastérisation » des formations d’enseignants, contre les suppressions de postes et les restrictions budgétaires, contre la casse du CNRS et, en arrière-plan, contre la LRU, la plupart des universitaires s’impliquent maintenant à des degrés divers : depuis la grève « japonaise » jusqu’à la grève tout court, en passant par la grève administrative. Les étudiants organisent aussi des AG massives et entrent dans la grève.
La ministre de l’Enseignement supérieur, Valérie Pécresse, ne peut plus compter que sur la conférence des présidents d’université (CPU), de plus en plus fragilisée. Jeudi 5 février, à Strasbourg, où elle venait célébrer la fusion technocratique des universités de la ville devant un parterre d’invités et un président d’université strasbourgeois livide, la ministre s’est faite huer par les enseignants-chercheurs, pendant qu’à l’extérieur, les étudiants et universitaires étaient victimes de violences policières.
Certains présidents cherchent une porte de sortie, allant jusqu’à voter les motions de leurs conseils d’administration hostiles au projet de décret sur les enseignants-chercheurs. Après une prise de position publique de la présidente de Nanterre en faveur du retrait du projet, Axel Kahn, président de Paris V, pourtant cité en exemple par Sarkozy lors de son show télévisé, demande que les compteurs soient remis à zéro. Le succès des manifestations démontre que ceux qui représentent vraiment l’université ne veulent pas d’une gestion « managériale » des établissements, refusent que la recherche soit soumise aux intérêts privés, rejettent la mise en concurrence des formations sur un « marché de l’éducation », et exigent des moyens pour un service public rénové, au service de toute la population. Valérie Pécresse devait discuter d’une « charte de bonne conduite » des présidents « managers », au cours d’une réunion convoquée au lendemain de la grande manifestation nationale du mardi 10 février. Au risque de n’y retrouver que la CPU car, au même moment, devait se tenir, à Saint-Denis, une coordination des universités autrement plus représentative.
La « mastérisation » de la formation des enseignants prend aussi eau de toutes parts. L’un après l’autre, les CA décident de ne pas remonter au ministère les maquettes des futurs concours. Alors que Darcos comptait sur la concurrence entre établissements pour parvenir à ses fins, les universitaires refusent d’entrer dans son jeu.
D’ores et déjà discréditée, la CPU est la première victime collatérale des contre-réformes sarkozystes. La ministre Pécresse risque fort d’être la seconde. La jonction entre universitaires et étudiants en appelle d’autres. L’enjeu que constitue le service public mérite un large soutien, étendu à tous les secteurs de la société. Une riposte de l’ensemble de la gauche syndicale et politique est une urgente nécessité.
Jean-Luc Godet
* Paru dans Rouge n° 2286, 12/02/2009.
UNIVERSITÉ : Révolte générale
Les enseignants universitaires et les étudiants appellent à la grève illimitée pour battre les contre-réformes sur la formation des enseignants et le statut des enseignants-chercheurs.
Il y eut la loi sur les libertés et responsabilités des universités (LRU) en août 2007. Le mouvement étudiant qui suivit ne fut alors soutenu que par une minorité d’universitaires. Aujourd’hui, les conséquences de cette loi se font sentir et un vent de révolte a fini par emporter les plus sages. L’une après l’autre, les AG d’enseignants ont voté la grève et une coordination regroupant trois quarts des universités s’est mise en place. Outre le millier de suppressions de postes et une régression budgétaire considérable, deux aspects de la loi ont fait éclater la mobilisation.
C’est d’abord la prétendue « mastérisation » de la formation des enseignants. Jusqu’à présent, les concours de recrutement des enseignants du premier et du second degré se déroulaient dans l’année suivant la licence et étaient suivis par une année de stage en tant que fonctionnaire au cours de laquelle une formation professionnelle était dispensée en IUFM. C’est donc au niveau bac+5, niveau du master, que les enseignants commençaient leur carrière. Reconnaître ces cinq années de formation par un diplôme universitaire est légitime. Mais reculer d’un an le concours, supprimer l’année de stage, où il y a salaire et cotisations, par de misérables bourses et évacuer la formation professionnelle c’est tout autre chose… Derrière cette « réforme » se profilent la fin des concours et le recrutement de contractuels à la place de fonctionnaires, par les chefs d’établissement. Sommés de rendre au ministère des projets pour ces nouveaux masters dans un délai record et sans aucun cadrage national, de très nombreux universitaires ont décidé de ne pas les envoyer.
Le second plat empoisonné est la remise en cause du statut des enseignants-chercheurs. Au nom de la « modulation des services » inscrite dans la LRU, les présidents d’université auront le pouvoir d’aller jusqu’à doubler le nombre d’heures d’enseignement des enseignants-chercheurs. Ceux-ci seraient soumis aux « objectifs de l’institution » et ce serait la fin de leur indépendance et donc d’une recherche (encore) libre. Ce serait surtout un moyen économique de réguler les pénuries d’enseignants en taillant dans la recherche, au moment où Sarkozy annonce le démantèlement du CNRS. La quasi-totalité des enseignants-chercheurs et de leurs instances représentatives rejette ce projet. C’est aujourd’hui l’élément moteur de la mobilisation de ces personnels, alors que la « mastérisation » suscite celle des étudiants.
La mise en place de la LRU est susceptible de réaliser ce qui ne s’était jamais réalisé, sinon peut-être en 1968, l’unité dans la lutte des enseignants et des étudiants au niveau national. Les prochains jours seront décisifs. Décidément, la LRU ne passe pas : l’université n’est pas une entreprise, l’enseignement et la recherche ne sont pas des marchandises.
Jean-Luc Godet et Jean Malifaud
* Paru dans Rouge n° 2285, 05/02/2009.