Dans les années 70 et 80 du XXe siècle, lors de la montée de Solidarnosch en Pologne, le « camp socialiste » avec à sa tête la Chine et l’URSS, ainsi que d’autres pays comme la Pologne, se trouvait dans une situation d’antagonisme. Afin de montrer les méfaits apportés par une situation antagoniste, la Chine à l’époque rapportait abondamment les hauts faits de Lech Walesa et des syndicats. Ainsi, Solidarnosch et Walesa devinrent très connus. Mais, après la fin des années 80, avec l’aggravation quotidienne des problèmes sociaux et le renforcement de la résistance ouvrière, le gouvernement chinois s’effraya de plus en plus de l’influence de Solidarnosch.
Par ailleurs, les dirigeants et une partie des intellectuels considérèrent comme identiques Solidarnosch et un quelconque syndicat autonome, ainsi que le mouvement ouvrier polonais d’alors et un mouvement ouvrier ordinaire. Ceux qui parlent de mouvements ouvriers et des syndicats indépendants chinois les relient tout de suite à Solidarnosch et se rappellent que Solidarnosch a changé la Pologne et a joué un rôle politique dans les transformations de l’URSS et du bloc de l’Europe de l’Est.
La principale raison de la répression sévère des mouvements ouvriers chinois par le gouvernement chinois réside dans le processus suivant : la peur face à Solidarnosch a dérivé vers une peur face aux mouvements ouvriers chinois, qui ont peut-être suscité une peur de l’apparition d’un syndicat indépendant en Chine. C’est le principal obstacle de la formation d’un syndicat indépendant chinois.
Différence des origines des syndicats chinois et polonais
En analysant davantage la situation, on s’aperçoit qu’en réalité la peur du gouvernement chinois envers les syndicats n’a pas beaucoup de fondement. En effet, les mouvements ouvriers de Solidarnosch de l’époque et les mouvements actuels en Chine sont différents en essence. En prenant connaissance de cette différence, le gouvernement pourrait évacuer cette peur, d’un autre angle avec calme et raison regarder ces nouvelles sortes de phénomènes sociaux et peut-être modifier son attitude, de peur face au mouvement ouvrier et son hostilité devant les syndicats indépendants.
La différence réside dans l’écart de la société polonaise d’alors et de la société chinoise actuelle. A l’époque, la Pologne avait une économie planifiée centralisée et les grandes et moyennes entreprises étaient presque toutes publiques. Dans cette situation, les ouvriers et les employés luttaient contre les entreprises mais en réalité c’était contre le gouvernement. Il n’y avait pas un groupe d’investisseur avec un intérêt propre, donc il n’existait pas de conflit entre les travailleurs et les capitalistes. Le conflit entre les travailleurs et les entreprises revenaient à un conflit avec le gouvernement. Dès l’apparition du conflit, les dirigeants d’entreprises, à part prendre des engagements sur le mode de travail, ils n’avaient pas la possibilité de répondre aux questions portant sur les intérêts des travailleurs et des traitement et les salaires, point le plus crucial. Seul le gouvernement et l’Etat pouvaient répondre à ce genre d’exigences. C’est pourquoi, la résistance des ouvriers ne pouvait pratiquement pas éviter de se transformer en résistance politique, le mouvement ouvrier s’est vite dirigé vers un processus de changement des mesures politiques gouvernementales, voir un changement gouvernemental. L’objectif du mouvement politique était au fond le changement du système.
La situation chinoise aujourd’hui est complètement différente. Après plus de 20 années de réforme et d’ouverture, les sociétés privées, étrangères et joint venture abondent. Quant aux entreprises publiques, les dirigeants travaillent pour les bénéfices de l’entreprise, décident du traitement et de la protection sociale des travailleurs et peuvent librement engager ou licencier du personnel. Le gouvernement n’intervient dans l’activité économique des diverses couches des entreprises qu’avec les lois, les règlements et les mesures, la perception des impôts et des procédés indirects. A ce stade, les patrons et les dirigeants des entreprises ont clairement un intérêt indépendant. Leur intérêt et ceux de l’Etat et du gouvernement ne sont pas entièrement identiques ; avec les employés et les ouvriers, les conflits deviennent de jour en jour de plus en plus aigus. A ce niveau, la situation polonaise n’est pas comparable ; en Chine de nos jours, ce sont les patrons et administrateurs et non le gouvernement qui oppressent les ouvriers et sont responsables directement de la détérioration des conditions de travail et de la vie des ouvriers.
En quoi le mouvement est dissemblable ?
Le mouvement ouvrier actuel chinois est donc aujourd’hui distinct en nature avec celui de Solidarnosch. Le point de mire de la résistance des ouvriers, chinois et autres, est les administrateurs, et les patrons des entreprises alors que celui de Solidarnosch à l’époque était le gouvernement. Les demandes de la résistance des ouvriers chinois touche surtout les droits et les intérêts fondamentaux sociaux et économiques. En d’autres termes, le mouvement ouvrier actuel chinois n’est pas seulement éparpillé mais aussi de faible ampleur et surtout il n’a pas d’objectif et d’exigence politiques ; il reflète le conflit traditionnel des ouvriers et des capitalistes et il n’est pas un mouvement social de nature politique. C’est la différence fondamentale avec le mouvement de Solidarnosch.
Par ailleurs, la psychologie et la connaissance commune concernant la résistance des ouvriers chinois ne peuvent être comparées avec les ouvriers polonais de l’époque. Beaucoup ont encore un grand niveau de confiance et d’espoir envers le gouvernement, notamment le gouvernement central, ils croient que si le gouvernement central a conscience de leur peine et précarité, il les aidera. Dans les conditions présentes en Chine, l’apparition de syndicats autonomes n’impliquerait peut-être pas une politisation à aussi haut niveau qu’en Pologne avec Solidarnosch. De plus, la situation des gouvernements chinois et polonais diffère totalement. Le gouvernement a assez d’espace pour se placer au-dessus du conflit capital-ouvrier et prendre une position neutre afin de devenir le médiateur du conflit et des contradictions des deux parties. Il n’a vraiment aucune raison de s’effrayer lui-même avec le « fantôme » de Solidarnosch. Il devrait et il a tout à fait la capacité de changer sa façon de régler les conflits sociaux en transformant son implication actuelle dans les conflits sociaux, en passant d’un rôle au service du capitalisme à celui d’établir des règles et des accord profitables pour les groupes sociaux, en laissant les mouvements ouvriers chinois devenir des syndicats ouvrier autonomes dans la légalité. Ainsi il servirait de régulateur entre les ouvriers et le capital, ce qui serait un moyen de changer le système.
Le système de gouvernance de la société chinoise pourrait ainsi vraiment commencer à se diriger vers la modernisation. Sinon, en poursuivant la répression des mouvements ouvriers et l’interdiction de syndicats autonomes, ce gouvernement va continuer sans cesse à voir les oppositions travailleurs contre capital, l’insatisfaction envers les entreprises va se transformer en insatisfaction vers soi-même et les conflits d’intérêts entre les diverses couches sociales vont se transformer en conflits politiques contre le gouvernement, c’est la tragédie des ouvriers chinois et aussi la tragédie du gouvernement