Comment discuter avec des personnes « d’autorité » qui propose d’envoyer en prison des jeunes dès l’âge de 12 ans ? Elles savent tout et n’ont nul besoin que l’on leur rappelle : qu’il s’agit d’enfants, que le monde carcéral n’est pas un lieu d’éducation, qu’une telle mise en détention aura des conséquences destructives qui pèseront la vie entière… Elles savent – et pourtant elles présentent en ce sens un projet de loi. Gageons qu’elles n’imaginent pas que leurs rejetons, ceux de leurs amis et de leur milieu social tomberont victimes d’un tel couperet judiciaire. D’excellents avocats se porteront au secours des délinquants en herbes bien nés et les juges prendront compte des « garanties » apportées par des familles suffisamment argentées pour être considérées.
L’incarcération à 12 ans, c’est bon pour les enfants des « classes dangereuses », la racaille.
Les « élites » portent un regard étranger sur le petit peuple. De même que ces patrons qui dépensent sans compter mais trouvent que les smicards gagnent encore trop, elles font preuve d’un véritable racisme social, agissant comme si les sommets et les fondements de la société n’appartenaient pas à la même espèce, n’avaient ni les mêmes droits ni les mêmes besoins. Sans ce regard lointain, il leur serait bien difficile d’assumer l’iniquité extrême de leurs politiques.
Vu sa brutalité, la mondialisation néolibérale était déjà lourde de violent conflits de classes. A l’heure de la crise financière, l’incurie capitaliste apparaît dans sa nudité. L’ordre dominant perd toute légitimité. La spirale répressive n’a alors plus de fin. Après les peines plancher pour récidive et le démantèlement de la justice pour mineurs, la prison à 12 ans représente une véritable déclaration de guerre à la jeunesse mal née. C’est une nouvelle mesure juridique de guerre civile.