Le brutal ralentissement touchant le secteur automobile ne s’explique pas par la hausse des matières premières et du pétrole, ou par la parité des monnaies, comme l’affirmaient, il y a encore peu, les constructeurs. Pour Patrick Pélata, directeur général de Renault, « la crise est là et bien là et elle touche Renault ». Il est rejoint par Christian Streiff, président du directoire de PSA, qui confirme que la crise « est la plus sérieuse que nous ayons connue depuis des décennies ».
Toutes les usines d’assemblage et de mécanique Renault ont été arrêtées pendant les vacances de la Toussaint. Celles de Flins (Yvelines), Douai (Nord) et du Mans (Sarthe) vont fermer deux semaines, tandis qu’à Sandouville (Seine-Maritime), deux équipes travaillent en alternance, une semaine sur deux, jusqu’à la fin de l’année. Le même traitement s’applique à PSA, avec seize jours d’arrêt à Hordain Sevelnord (Nord), treize à Sochaux (Doubs), dix à Mulhouse (Haut-Rhin), huit à Rennes (Ille-et-Vilaine). À Ford, il y aura dix semaines de fermeture à Blanquefort (Gironde) et dix-huit à GM-Strasbourg (Bas-Rhin). La quasi-totalité des sites européens des constructeurs (Espagne, Slovénie, Slovaquie, Roumanie, Hongrie et Turquie) est également touchée, dans une moindre proportion.
Par ricochet, les équipementiers et sous-traitants répercutent ces arrêts. À Florange (Moselle), le groupe Arcelor-Mittal, qui emploie 3 300 salariés, va fermer, de la mi-novembre à début janvier. Avec leur cynisme habituel, les groupes reconnaissent qu’ils « organisent » ces baisses de production afin de se prémunir des effets de la mévente et du gonflement des stocks sur le niveau de leur rentabilité, qui reste positif.
Dans un premier temps, ces baisses ne vont pas coûter un centime aux patrons de l’automobile. Les salariés vont devoir vider tous leurs compteurs attachés à l’annualisation du temps de travail : compte épargne formation, capital temps individuel, congés fin de carrière et journées dites « négatives » que le salarié devra rendre ensuite à l’entreprise. Cette utilisation maximale de la flexibilité est d’ailleurs l’enjeu d’accords récemment soumis à la signature des syndicats, afin « d’éviter d’avoir à recourir au chômage partiel, pénalisant pour tous », comme l’écrit, sans rire, la direction de Renault-Cléon.
À Renault-Sandouville, certains, avec près de 100 jours non travaillés sur 220 jours de travail en 2008, ont enregistré une perte sèche de 1500 à 2 000 euros sur l’année. Alors que l’indemnisation du chômage partiel à 100 % lui coûterait moins de 100 millions d’euros par an, Renault préfère garantir les 1 300 millions d’euros promis à ses actionnaires, en mai prochain. Le refus de payer le chômage doit être l’enjeu immédiat des prochaines mobilisations dans tout le secteur automobile.
Renaud Lenormand
Manifestation au Havre contre la suppression d’emplois chez Renault
LE HAVRE, 8 nov 2008 (AFP) - De 1.100 personnes selon la police à 3.000 selon les organisateurs ont manifesté samedi au Havre contre les réductions d’effectifs à l’usine Renault de Sandouville (Seine-Maritime), mais aussi chez les sous-traitants, à l’hôpital et dans l’Education nationale.
Aux cris de « tous ensemble, grève générale », « interdisons les licenciements », les manifestants ont marché de la maison des syndicats à l’Hôtel de Ville. La manifestation était ouverte par plusieurs centaines de salariés de Sandouville où 1.000 emplois sur 3.700 doivent être supprimés. A la suite défilaient des salariés de la raffinerie Total, de la centrale EDF, de l’usine de meubles Interior’s, des enseignants ainsi que des agents des douanes et de l’hôpital où plusieurs centaines de postes doivent disparaître.
Au milieu du cortège figurait le porte-parole de la LCR Olivier Besancenot, qui avait déjà apporté son « soutien militant » aux salariés de Sandouville le 7 octobre dernier. « Il faut favoriser tous les regroupements pour aller très rapidement vers un grève nationale », a-t-il déclaré.
La manifestation était organisée par les syndicats CGT, CFDT, FSU et Solidaires, tous les partis de gauche (PCF, PS, LCR-NPA...) et des associations comme Attac ou la Ligue des droits de l’homme.
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