Le 22 septembre, la session extraordinaire du Parlement s’ouvrira avec le débat sur l’engagement français en Afghanistan, suivi d’un vote. L’issue ne fait aucun doute. Une fois de plus, UMP et PS, d’accord sur le fond, discuteront à la marge : pas question de retrait des troupes françaises.
« Il est inconcevable que la France, membre du Conseil de sécurité des Nations unies, cinquième puissance mondiale, envisage un retrait », fanfaronne le ministre de la Défense, Hervé Morin. Pierre Moscovici, chargé des relations internationales au PS, approuve, en précisant : « Mais les modalités de notre engagement, les missions de nos soldats, l’impulsion que nous donnons sur le plan politique doivent être profondément différentes […]. Il faut vraiment redéployer la stratégie de l’Otan et des Occidentaux en Afghanistan. » Phrases creuses, destinées à donner le change ! Le PS n’était-il pas au gouvernement quand, en 2001, Jospin et Chirac ont décidé l’envoi de soldats français en Afghanistan ?
Sarkozy n’a pas de souci : sans attendre le débat parlementaire, il poursuit l’envoi de renforts. La semaine dernière, 350 soldats du 3e RPIMa de Carcassonne ont embarqué pour Kaboul. La mort de dix soldats français dans une embuscade, le 18 août, a rappelé l’évidence : la France est en guerre contre le peuple afghan. Le député UMP Pierre Lellouche ne craint d’ailleurs pas d’affirmer : « Contrairement à ce qu’affirme le ministre de la Défense Hervé Morin, c’est une guerre, et non une opération de police internationale. » Oui, c’est bien une sale guerre que mènent les troupes françaises aux côtés des États-Unis et des pays membres de l’Otan.
Pour le justifier, Sarkozy invoque le « choc des civilisations », cher à Bush, dénonce ces « barbares moyenâgeux » et la lutte contre le terrorisme, pour la démocratie et le droit des femmes. Pourtant, en campagne électorale, Sarkozy déclarait, quand il prétendait envisager le retrait des troupes : « Aucune armée étrangère n’a réussi dans un pays qui n’est pas le sien. » Effectivement les troupes impérialistes maintiennent en place le régime fantoche de Karzaï, leur homme de main, corrompu, sans autorité sur un pays où règnent la misère et le chômage et où le trafic d’opium est la principale source de richesse. L’aide internationale ne sert qu’à alimenter la corruption, alors que les exactions des soldats de l’Otan, « les bavures » dont est victime la population civile, dressent le peuple contre l’occupation étrangère et l’envoient dans les bras des talibans.
La guerre en Afghanistan vise à transformer le pays en place forte des puissances occidentales, contre la Russie, la Chine et l’Iran. Peu importe le prix pour le peuple afghan, pour les soldats, pour les classes populaires des pays de l’Otan, qui payent les dépenses militaires. Cette guerre ne peut être circonscrite à l’Afghanistan, elle vise aussi à déstabiliser les autres États de la région, en particulier le Pakistan, où Bush vient de décider de porter des opérations militaires. Le chef d’état-major des armées américaines s’en expliquait ainsi devant le Congrès : « Je ne suis pas sûr que l’on soit en train de gagner en Afghanistan. Si on n’élimine pas leurs bases de repli au Pakistan, les ennemis vont constamment nous tomber dessus. » Pour sortir du bourbier afghan, les troupes de l’Otan n’ont d’autre issue que de s’enfoncer plus avant au Pakistan, au risque d’enchaînements militaires et politiques incontrôlables…
Pour que la France des patrons et des riches puisse avoir sa petite place parmi les grandes puissances, Sarkozy engage l’armée dans cette aventure sanglante et sans issue. Il se fait l’auxiliaire des États-Unis, en faisant de l’Union européenne un simple « pilier européen » de l’Otan, instrument de leur domination sur le monde. Et cela, au prix de l’exacerbation des tensions internationales, de guerres comme en Géorgie. Hervé Morin « en appelle à l’unité du pays dans la lutte contre le terrorisme ». Le débat parlementaire n’aura donc d’autre sens que d’essayer d’afficher, du moins sur le fond, cette unité nationale.
Nous la refusons. C’est l’intérêt de tous les travailleurs, de toute la population, de refuser leur « guerre globale contre le terrorisme », une sale guerre contre les peuples, contre leurs droits, une guerre impérialiste pour la domination et le pillage. Nous ne serons pas complices. Se taire, laisser faire, ce serait une façon de renforcer politiquement ceux qui, ici, nous font payer le prix de leurs aventures, tant militaires qu’économiques. C’est pourquoi, nous regrettons que la CGT et la FSU n’aient pas appelé à manifester le 20 septembre. L’opposition à la guerre doit se faire entendre avec ses propres moyens, dans la rue. La lutte pour nos droits, ici, est indissociable de la lutte contre les visées militaires de notre propre impérialisme, de la lutte pour les droits des peuples.