Yannick Jadot, directeur des campagnes de Greenpeace France et porte-parole de l’Alliance pour la planète, s’était imposé comme l’un des principaux négociateurs du Grenelle de l’environnement. Il annonce dans Libération pourquoi il quitte l’ONG pour rejoindre le rassemblement des écologistes mené par Daniel Cohn-Bendit aux européennes de juin 2009.
Pourquoi vous engagez dans le rassemblement des écologistes ?
Le 1er septembre j’ai quitté Greenpeace - qui a pour principe l’indépendance politique - afin de rejoindre cette initiative de rassemblement pour les européennes. Ces trois dernières années, le secteur associatif de l’environnement qui pèse un million d’adhérents, s’est fortement structuré. Il y a eu la montée de Nicolas Hulot et de son Pacte écologique et l’Alliance pour la planète qui a fédéré les associations pour peser sur les partis et les politiques publiques. Cela a débouché sur la notation des programmes des candidats à la présidentielle et permis de pousser l’environnement dans la campagne, jusqu’à la passe d’arme, inédite, entre Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy sur l’EPR et les OGM lors du débat télévisé de l’entre deux tours. On a lancé l’idée d’un Grenelle, et Sarkozy a dit banco : il était mal noté et c’était une façon de différer sa réponse. Le Grenelle a été un des moments clés du début du quinquennat, pas seulement une grand-messe avec Al Gore. Mais une vraie négociation démocratique entre tous les acteurs qui a permis d’aboutir à des propositions concrètes.
Vous vous adressez aux déçus du Grenelle ?
On constate un effilochement. La machine à délaver de l’administration et de la majorité UMP tourne à plein. Le vert du Grenelle a largement passé. Les ONG remplissent leur rôle de contre-pouvoir, les citoyens restent mobilisés, mais côté politique ça ne suit pas. Les partis comme le gouvernement font des discours, mais il y a un manque de constance et de courage dans la mise en œuvre. Notre ambition est de rassembler large sur l’environnement et d’incarner un mouvement qui existe implicitement dans la société. Aucun parti politique, y compris les Verts, n’en est capable.
Et quid des Verts qui décideront mi-septembre ?
Les Verts y ont leur place comme d’autres. Ils ont quelques eurodéputés sortants, mais s’ils se présentent seuls, ils n’auront quasiment pas d’élus : c’est en partie injuste mais c’est comme ça. La question n’est pas de savoir si ce rassemblement va faire des Verts un nouveau parti écologique. Notre objectif est d’aller de José Bové à Corinne Lepage en passant par Dany Cohn-Bendit, des associatifs et des personnalités. Il y a plus de proximité entre eux sur comment on se loge, on se nourrit et on se déplace en sauvegardant la planète qu’entre Emmanuelli et DSK, ou Borloo et Sarkozy.
Vous êtes donc ni à droite ni à gauche ni au centre…
Notre offre politique c’est l’écologie d’abord. Quand François Hollande va aux journées d’été des Verts, il leur dit : « Amusez-vous avec les associations, l’important est de rester dans l’union de la gauche. » Mais où est la mue écolo du PS et du PCF ? Pas à La Rochelle, où ils se sont plus consacrés à leur tambouille qu’à la pérennité de la planète. L’impératif écologique nous oblige à repenser notre modèle économique et social. Est-ce de droite ou de gauche ? Si je suis contraint de quitter Greenpeace, de sortir de mon rôle de contre-pouvoir, c’est que face à la crise écologique, l’offre politique est insatisfaisante voire indigente. A nous d’incarner cet espace qui représente largement plus de 10 % dans l’opinion.