PARIS, 17 juin 2008 (AFP) - Le porte-parole de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) Olivier Besancenot a estimé mardi que face aux divisions des confédérations syndicales, les salariés devaient construire « l’unité par le bas » pour mener une « contre-offensive globale » contre le gouvernement.
« Diviser pour mieux régner, c’est ce que voulait faire Sarkozy. Pour l’instant, il y est arrivé au moins au niveau des directions confédérales. Maintenant, c’est par le bas que l’unité des travailleurs doit se faire », a-t-il déclaré en marge du défilé parisien pour la défense des retraites et des 35 heures, à l’appel de la CGT et la CFDT. Les deux confédérations n’ont été rejointes que par la FSU et Solidaires (dont les syndicats Sud). Force Ouvrière, la CFTC et la CFE-CGC ont refusé de se joindre au mouvement.
« La division syndicale était prévisible à partir du moment où le projet sur la représentativité était en train de passer », a-t-il souligné, en estimant toutefois qu’« il faut continuer à utiliser toutes les échéances de mobilisation comme des échéances de convergence possible ». « Aujourd’hui, il y a 55 réformes anti-libérales. Comme dit le gouvernement, il y a une cohérence entre elles. La cohérence, c’est de remettre en cause le modèle social, tel qu’il a été arraché par les luttes de nos anciens. A une offensive globale, il faut une contre-offensive globale », a-t-il ajouté.
La dirigeante de Lutte Ouvrière Arlette Laguiller, qui participait aussi à la manifestation parisienne, a jugée « regrettable » cette division des syndicats, « d’autant qu’ils sont tous d’accord sur les 35 heures et sur les retraites, au moins contre les 41 ans de cotisation ». « J’espère que les travailleurs passeront outre et qu’ils prendront le contrôle de ce mouvement », a-t-elle souligné. « Il faudrait un plan d’action, et pas des actions à répétition. Il faudrait une offensive générale, c’est dans l’intérêt des travailleurs », a-t-elle poursuivi. sva/im/dlm
Le 17 juin, préparer un mouvement d’ensemble
Communiqué de la LCR
Plusieurs organisations syndicales ont appelé à une journée nationale d’action et de grèves pour la défense des retraites et contre la déréglementation du temps de travail. Le passage en force du gouvernement sur les retraites et le temps de travail, comme sur l’éducation, la RGPP entre autres, a entraîné des réactions, des mobilisations multiples. Allongement des cotisations à 41 annuités, fin des 35 heures et empilement d’heures supplémentaires, flicage des chômeurs, privatisation du système de santé, suppression massive de postes dans l’éducation nationale, la fonction publique.
Méthodiquement, N. Sarkozy et sa bande de casseurs veulent détruire l’ensemble des acquis et droits sociaux et ramener les conditions de travail deux siècles en arrière. Il faut réussir le 17 juin, être nombreux en grève et dans la rue pour dire non au passage en force, aux mensonges et aux manipulations du gouvernement.
C’est pourquoi, la LCR sera présente à la manifestation du 17 juin, avec son porte-parole Olivier Besancenot, à un point fixe, à 14h, à l’entrée du Boulevard Saint Martin et de la place de la République, contre la déréglementation du temps de travail, pour une retraite à 60 ans, avec un taux de remplacement à 75% et une durée de cotisations de 37,5 annuités maximum.
Le 17 juin ne doit pas rester sans lendemain. Pour construire un rapport de force capable de faire reculer le gouvernement, c’est un mouvement d’ensemble qu’il faut préparer.
Le 16 juin 2008
Prendre nos luttes en main
Du jamais vu pour un président sous la Ve République. Avec 67 % d’opinions jugeant « mauvaise » sa politique économique, Sarkozy est devenu le champion du « travailler plus pour gagner moins ». Allongement de la durée de cotisation pour les retraites, liquidation des 35 heures, franchises médicales, précarisation du travail, casse des services publics, pressions supplémentaires sur les chômeurs afin de leur faire accepter n’importe quel travail à n’importe quel prix : c’est dans tous les domaines que son gouvernement orchestre la régression sociale, à seule fin de satisfaire les exigences du Medef, de la finance, qui réclament une part toujours plus grande des richesses produites par ceux qu’ils exploitent. À peine se font sentir, dans la vie quotidienne, les effets des attaques déjà mises en œuvre, que d’autres sont déjà programmées.
À l’offensive contre les droits sociaux s’ajoutent les atteintes aux droits démocratiques, une répression accrue contre les immigrés et contre les jeunes des milieux les plus pauvres. Cette politique suscite des résistances, des mobilisations, entre autres celles du 10 juin à la SNCF et dans la fonction publique, mais c’est avant tout contre la vie chère que se focalise le mécontentement. L’envolée des prix de l’essence et du gazole rend insupportable la baisse du pouvoir d’achat causée par la hausse des prix alimentaires, du gaz, des soins médicaux. La colère a déjà explosé chez les marins-pêcheurs, les agriculteurs ou les transporteurs routiers, et il n’en faudrait pas beaucoup pour que cette colère soit contagieuse, tant la baisse du pouvoir d’achat, qui concerne toutes les catégories de la population, est dramatique pour beaucoup.
Déstabilisé par cette poussée du mécontentement, qui fait naître des dissensions jusque dans sa majorité et son propre gouvernement, Sarkozy a tenté de reprendre la main et il y a réussi pour une part, grâce encore une fois à sa politique du « dialogue social ». Une politique de dupes à laquelle se prêtent complaisamment, depuis longtemps maintenant, les directions syndicales. En signant l’accord sur la représentativité syndicale dans le privé, les directions des deux plus grandes centrales syndicales, la CGT et la CFDT, se sont laissées prendre au piège que leur a tendu le gouvernement et qu’il a immédiatement fait jouer pour annoncer la remise en cause des 35 heures.
Le texte prévoyait la possibilité, pour chaque entreprise, d’augmenter librement le contingent d’heures supplémentaires, indépendamment de ce qui est prévu par l’accord de branche, pourvu qu’il y ait signature d’un accord d’entreprise avec un syndicat représentant 30 % des salariés. Mais voilà que le gouvernement n’a pas attendu l’examen ni le vote de la loi transcrivant cette position commune, pour clamer haut et fort qu’il servirait avant tout à ce qu’il n’y ait « plus du tout de système des 35 heures ». Et, de fait, la durée hebdomadaire du temps de travail, en réalité de 40 heures, pourrait dès lors atteindre 48 heures, la limite européenne. L’annonce faite par le secrétaire général de l’UMP, Patrick Devedjian, a été confirmée, malgré les protestations des syndicats, par le ministre du Travail, Xavier Bertrand. « Nous avons respecté l’esprit et la lettre de la position commune sur la représentativité, sur le temps de travail, ce n’est pas une surprise que nous allions plus loin. » Le Journal du dimanche a révélé que le gouvernement envisageait même que les entreprises puissent abaisser le taux de majoration des heures supplémentaire, de 25 % actuellement à 10 %.
FO a certes dénoncé la signature par la CGT et la CFDT de l’accord sur la représentativité, mais elle oublie de dire qu’elle avait auparavant signé l’accord sur le contrat de travail. Quant aux directions syndicales de la fonction publique, elles ont aussi signé un accord sur la « rénovation du dialogue social », qui prévoit, entre autres, la mise en place d’un conseil supérieur commun aux trois fonctions publiques, prélude à la mise en œuvre de la « mobilité des fonctionnaires ».
Cet épisode, comme la façon dont il a emmené avec lui au Liban les dirigeants du PS, du PCF et des Verts, est révélateur de la méthode de Sarkozy. Il utilise à plein aujourd’hui, pour mettre la dernière main à son plan de contre-réformes libérales, la complaisance des directions syndicales pour mieux les rejeter et les briser demain, une fois vidées de toute force.
Une lutte sérieuse contre la politique de Sarkozy et du Medef est incompatible avec de telles complaisances. C’est d’ailleurs ce que montre, à l’inverse, la lutte menée par la population du Finistère pour empêcher la fermeture des hôpitaux, qui a su unir dans une même mobilisation, salariés et usagers de la santé mais aussi lycéens, marins-pêcheurs, agriculteurs. Comme, également, les instituteurs et les parents d’élèves dans le nord de Paris qui organisent une « Nuit des écoles ». C’est dans cet état d’esprit que nous participerons à la journée du 17 juin, sur les retraites et les 35 heures, et que nous porterons la discussion dans nos syndicats. L’urgence est à la défense des intérêts généraux du monde du travail, en toute indépendance des intérêts de boutique avec lesquels il est temps de rompre.
Galia Trépère (Premier plan)
* Paru dans Rouge n° 2256, 12/06/2008.
FONCTION PUBLIQUE : Gros risque d’isolement
La journée du 10 juin contre la révision générale des politiques publiques (RGPP) n’a pas répondu aux nécessités de l’heure. Le débat s’amplifie sur les stratégies syndicales.
A Paris, le 10 juin, la manifestation de quelques milliers de personnes a bénéficié de la montée nationale des agents en lutte du ministère des Finances (décidée rapidement à la suite d’une montée en grève reconductible dans plusieurs régions) : cortèges d’Ille-et-Vilaine, Gironde, Indre-et-Loire, Doubs, Aix-en-Provence, Pas-de-Calais, Loire-Atlantique. C’est même aux accents d’une Internationale chantée à tue-tête que les banderoles du Syndicat national unifié des Impôts (Snui-Solidaires), suivies un peu plus loin par celles de la CGT-Impôts, ont ouvert le cortège. Avec des slogans tels que « De l’argent, il y en a ! Nous aux finances, on sait cela ! » Avant la manifestation, les grévistes s’étaient retrouvés « sur la dalle » de Bercy. Certains en sont à leur onzième jour de grève reconductible (Paris-Est, Paris-Nord). D’autres un peu moins mais, partout, les salariés cherchent à inventer des formes de lutte permettant de tenir en limitant les pertes de salaires : actions diverses sur les plages de temps libre, visites des députés, grèves tournantes d’un centre à l’autre, collectes de soutien des non-grévistes d’un jour, pour aider ceux qui supportent l’action ce jour-là, etc.
Le mouvement des finances, en y ajoutant les personnels de la culture (musées), est donc la pointe avancée (encore plus de 50 % de grévistes aux Impôts dans certains départements) de la contestation de la RGPP. Mais, sans relais, au lendemain du 10 juin, il aura du mal à se pérenniser. Il s’est cimenté sur un double refus : la fusion Impôts (calcul de l’impôt) et Trésor (recouvrement de l’impôt et gestion de la trésorerie des collectivités locales), qui sert surtout à rationaliser puis supprimer les effectifs au détriment des missions publiques (« Nous avons un devoir de service public d’équité fiscale », détruit par cette « fusion mal faite », explique une gréviste), et le refus net de la loi sur la mobilité des fonctionnaires. Personne ne croit aux promesses du cabinet d’Éric Woerth, tentant de désamorcer le mouvement en expliquant qu’il n’y aura pas de mobilité extraministérielle (alors que la loi est la même pour tous).
Les agents des douanes (18 000) sont en bagarre depuis six mois sur la contre-réforme du « dédouanement » : limitation des contrôles sous prétexte de « rendre service » aux entreprises. Là aussi, « on » vise à supprimer des bureaux et les emplois qui vont avec. Partout, « on » vante des partenariats avec des entreprises privées (exemple : le renseignement téléphonique est sous-traité aux impôts). SUD-Trésor craint une privatisation (par des banques) de la gestion des collectivités locales.
Partout ailleurs en France, les cortèges étaient faibles : 100 à 800 personnes (Grenoble, Bordeaux, Tarbes, Angers…). Le débat syndical est dans toutes les têtes : pourquoi des journées éclatées ? Comment rassembler ? Fallait-il se rabattre tous sur le 17 juin ? Etc. « Tout le monde est persuadé qu’il faut y aller tous ensemble et en reconductible, mais personne n’a trouvé la solution miracle pour y arriver » (correspondante de Pau).
Il est clair que les stratégies confédérales pèsent de tout leur poids pour désorienter, soit dans l’abandon pur et simple (CFDT, FO…), soit au profit d’une vision « confédérale » décidant d’en haut et décourageant les mouvements dans la fonction publique. Il suffit de lire la NVO CGT : pas un mot sur le 10 juin, presque rien sur les grèves aux impôts ! Les consignes sont claires, et beaucoup d’unions départementales CGT ont refusé d’assurer la logistique du 10 juin : tous les moyens devaient se concentrer sur le 17. Bien entendu, les grévistes du 10 se bagarrent aussi le 17, avec le privé, contre Sarkozy. Mais des équipes syndicales cherchent le moyen d’une stratégie unitaire, pour combattre ce pouvoir frontalement, sans esquiver la portée politique de cette lutte, seul moyen d’être à la hauteur de l’enjeu.
Dominique Mezzi
* Paru dans Rouge n° 2256, 12/06/2008.
DURÉE LÉGALE DU TRAVAIL : Réussir le 17 juin !
Le gouvernement exploite un article de l’accord sur la représentativité syndicale – signé par la CGT et la CFDT – pour faire voler en éclats la durée légale du temps de travail. Une journée de mobilisation est prévue le 17 juin.
Après que Sarkozy a affirmé qu’« il y aura toujours une durée hebdomadaire du travail en France et qu’elle sera de 35 heures », le ministre du Travail, Xavier Bertrand, par le biais de la loi sur la représentativité et le financement des syndicats, fera passer, courant juin, un article permettant à nombre d’entreprises de renégocier le temps de travail, mettant ainsi fin, dans les faits, aux 35 heures. Une journée d’action sur les retraites et le temps de travail est prévue le 17 juin prochain.
Pour fêter le dixième anniversaire des 35 heures, et après quelques couacs entre les dirigeants de l’UMP et le gouvernement, le débat semble tranché : la durée légale de travail restera à 35 heures, mais les « verrous empêchant les salariés de travailler plus » seront supprimés. Pas clair ? C’est le but du gouvernement, qui nous propose un projet de loi pouvant se résumer ainsi : mettre fin aux 35 heures, sans toucher à la durée légale du travail. Mais, à y regarder de près, le projet de loi n’a qu’un seul objectif : mettre fin à la durée légale du travail et répondre ainsi aux attentes du patronat, Medef en tête.
Ainsi, si le projet de loi est adopté, courant juin, les patrons pourront transformer individuellement le contrat de travail de tous leurs salariés, de l’employé au cadre, en un contrat fondé sur un forfait horaire hebdomadaire, mensuel ou annuel. Concrètement, cela veut dire que le salarié travaillera au-delà de 35 heures par semaine, sans que le patron ait à lui payer la moindre heure supplémentaire. Elle n’est pas belle la vie ? De plus, le projet de loi prévoit de supprimer, pour les cadres, la limite annuelle maximum de 218 jours travaillés, et les patrons auraient également la possibilité de moduler à leur guise les horaires et la durée du travail de leurs salariés.
Ce projet de loi met clairement fin au paiement des heures supplémentaires, tout en augmentant leur nombre autorisé. À travers cette loi, les salariés seront encore plus livrés au libre arbitre patronal, la flexibilité et la précarité seront encore plus la norme, permettant ainsi de baisser un peu plus le coût du travail. Le slogan de campagne du candidat Sarkozy, « Travailler plus pour gagner plus », ne fait plus illusion et il s’est transformé en « travailler plus pour gagner moins » !
C’est donc une nouvelle attaque majeure contre le monde du travail que Sarkozy et son gouvernement veulent faire passer, afin de servir une nouvelle fois ses amis, les grands patrons. Face à ce projet, la CGT et la CFDT, rejointes par la FSU et Solidaires, appellent à une journée d’action, le 17 juin prochain, « pour la défense des retraites et contre la dérégulation du temps de travail ». Cette journée est bien évidemment importante. Nous devons donc être le plus nombreux possible ce jour-là. Mais, face à l’ensemble des attaques du gouvernement – retraites, fonction publique, durée légale du temps de travail, santé, Éducation nationale, etc. –, les journées d’action isolées n’arrêteront en rien ce gouvernement.
Rappelons que ce sont les luttes des travailleurs qui ont permis d’arracher, en 1919, la limitation de la journée de travail à huit heures et, en 1936, la durée du travail hebdomadaire à 40 heures. Ne laissons pas le gouvernement imposer le retour vers le passé ! C’est d’une riposte collective, d’ensemble, que nous avons besoin pour mettre un coup d’arrêt durable à ce gouvernement. N’attendons plus.
Sandra Demarcq
* Paru dans Rouge n° 2256, 12/06/2008.
60 heures par semaine, voire plus, pas question !
Communiqué de la LCR
Les ministres européens viennent d’adopter un accord sur le temps de travail qui augure d’un dérèglement maximum.
La possibilité serait ouverte d’une semaine de travail qui irait bien au-delà de la durée hebdomadaire de 48h, la durée légale actuellement en Europe. Les ministres européens, avec l’accord du représentant du gouvernement de Sarkozy, ont ouvert la voie vers les 60 heures hebdo, voire 65 ou 70 heures. Dans la situation actuelle du marché du travail, avec l’importance du chômage, du travail précaire, et des travailleurs pauvres, les patrons imposeront leur volonté aux salariés avec le chantage au licenciement ou aux refus d’embauche en cas de besoin.
X. Bertand peut raconter ce qu’il veut pour tromper le monde, comme d’habitude, la semaine de 35h deviendra une coquille vide si cet accord est ratifié.
Cette décision confirme toutes les craintes que la LCR avait exprimé au moment du TCE, c’est-à-dire la volonté des gouvernements européens d’aligner vers le bas la législation sociale.
Pas question de laisser passer sans mobilisation une telle agression qui ramène le monde du travail tout droit au 19e siècle.
Pour contrer ce bulldozer anti-social, l’unité et la mobilisation sur la durée de l’ensemble des organisations de la gauche sociale et politique est indispensable pour construire le rapport de force nécessaire. La manifestation du 17 juin doit être une étape dans cette direction. Mais, il faut que cette mobilisation franchisse les frontières et mette en mouvement l’ensemble des salariés européens.
Le 11 juin 2008
IMPÔTS : Cap sur le 10 juin
La mobilisation est forte aux Impôts, contre les suppressions d’emplois et le projet de loi sur la mobilité des fonctionnaires.
Elle prend diverses formes, dont la grève reconductible et le blocage des centres, qui a entraîné l’intervention de la police. Elle pose la question du « tous ensemble ».
Depuis la rentrée, la participation des personnels de l’administration des Impôts aux différentes journées d’action a été importante. Qu’il s’agisse des grèves de la fonction publique ou de celles plus spécifiques à la profession. Le ministre du Budget, Éric Woerth, entend faire de Bercy un laboratoire de l’application de la révision générale des politiques publiques (RGPP). C’est ainsi que les administrations des Impôts (gestion et contrôle des déclarations) et du Trésor (recouvrement de l’impôt et gestion des finances des collectivités locales) sont en cours de fusion.
L’objectif est la suppression de milliers d’emplois et l’accroissement de la polyvalence et de la mobilité des personnels. Au détriment de leurs garanties et de leur technicité, puisque l’évolution libérale de la fiscalité tend à transformer cette administration en usine de traitement des déclarations des salariés, chômeurs et retraités – qui ne peuvent frauder, leur revenu étant déjà inscrit sur les déclarations d’impôts préremplies reçues à domicile –, au détriment des moyens destinés à lutter contre la fraude des grandes entreprises.
Après la grève des fonctionnaires pour le pouvoir d’achat, le 15 mai dernier, plusieurs centres des Impôts sont entrés dans l’action multiforme : grève reconductible, distribution des tracts et pétitions présentées à la signature des contribuables en cette période de souscription des déclarations, rencontres avec les élus qui vont subir la suppression de sites administratifs, assemblées générales communes avec d’autres administrations (les immeubles des Impôts étant souvent situés dans les cités administratives), grèves d’un seul service avec soutien financier des autres, piquets devant les centres fermés au public, souvent par des chaînes.
C’en était trop pour le gouvernement, qui a aussitôt dépêché les forces de police pour faire évacuer les piquets, à Paris et dans plusieurs villes de province. À Toulouse, c’est la brigade anticriminalité (BAC) qui est intervenue ! Pour Éric Woerth et Sarkozy, les criminels, ce sont les agents qui défendent le service public. Pas les multinationales qui placent leurs capitaux dans les paradis fiscaux. L’intervention de la police a souvent fait augmenter le nombre de grévistes – difficile d’accepter d’aller bosser entre deux rangées d’uniformes – et elle a entraîné la protestation d’élus de gauche.
La CGT, Solidaires et l’Unsa, sous la pression des mobilisations, appellent à poursuivre le mouvement, tandis que CFDT et FO, au plan national, brillent par leur absence. FO étant majoritaire au Trésor, cette administration est moins mobilisée, tandis qu’aux Impôts, une soixantaine de départements sont dans l’action. Il est intéressant de relever qu’en région parisienne, ce sont les agents les plus jeunes, entrés dans l’administration depuis peu, qui ont commencé la grève et poussé à l’action. L’effet CPE ?
L’échéance du 10 juin, grève contre le projet de loi sur la mobilité des fonctionnaires (possibilité de licenciement, recours à l’intérim avec contrats de droit privé, bref la casse à terme du statut), appelée par la CGT, Solidaires et la FSU, semble bien loin pour les agents les plus combatifs qui ont accumulé les journées de grève (et les retenues de salaire qui vont avec).
Les suppressions d’emplois, la casse du service public, la RGPP et la loi sur la mobilité concernent toutes les fonctions publiques, d’État, hospitalière et territoriale, et au-delà l’ensemble des salariés, usagers, citoyens. La mobilisation aux Impôts souligne la carence des directions syndicales confédérales qui, depuis la rentrée, ont accumulé les journées de 24 heures sans chercher à unifier et à centraliser la riposte au plan d’ensemble du gouvernement contre les salariés et leurs acquis sociaux. Cette grève souligne donc la nécessité d’un « tous ensemble » unitaire et prolongé de l’ensemble de la fonction publique.
Éric Lacombe
* Paru dans Rouge n° 2255, 05/06/2008 ?